Ayant pour mission de statuer sur le sort des détenus éligibles à la réduction de peine, cette structure, opérationnelle depuis un mois, ne fait aucune distinction entre les prisonniers de droit commun et les terroristes. Simple hasard du calendrier ou décision concertée, la mise en place de la commission de l'aménagement des peines par la chancellerie est intervenue en octobre dernier, après les résultats du référendum sur la paix et la réconciliation nationale, tenu le 29 septembre. Ayant pour mission de statuer sur le sort des détenus éligibles à la réduction du séjour en prison — conformément au nouveau code de l'organisation pénitentiaire et la réinsertion sociale des détenus —, cette structure ne fait aucune distinction entre les prisonniers de droit commun et les terroristes. Selon le directeur de la recherche et de la réinsertion sociale au département de l'administration pénitentiaire qui en fait partie, la commission aura à traiter les cas que lui soumettront les établissements carcéraux et les juges d'application des peines. “Elle est encore en phase de formalisation”, révèle notre interlocuteur. Il partage ses fonctions au sein de la commission avec un responsable d'établissement pénitentiaire, un représentant du ministère, deux personnalités de la société civile, choisies pour leur probité ainsi qu'un médecin. Leur chef étant un magistrat qui a le grade de président de chambre à la cour suprême. Contrairement aux commissions de liberté conditionnelle réparties localement à travers les prisons du pays, l'organisme qui a la charge d'aménager les peines des détenus est unique au niveau national. La seconde différence réside dans le fait que ses décisions ne sont que de simples avis assujettis à l'assentiment du garde des sceaux qui est en droit d'avaliser ou de rejeter une faveur accordée à tel ou tel incarcéré. Les candidats à l'allégement des peines doivent le mériter. Leur comportement en prison est un critère déterminant. Dans l'absolu, les postulants sont comptés parmi les incarcérés dont le séjour excède 24 mois. Aucune disqualification ne découle de la nature de l'infraction, si bien que les terroristes sont concernés. Dans son chapitre relatif à l'annulation des peines, la charte sur la paix et la réconciliation nationale exclut de la grâce les auteurs d'attentats à l'explosif dans les lieux publics, des massacres et des viols. À la place, ils bénéficient de mesures alternatives, dont la transformation, la commutation et l'allégement des peines. Aussi figureront-ils dans les listes qui seront examinées par la commission. Les structures ayant en charge d'étudier les dossiers de liberté conditionnelle quant à elles, ont commencé leur travail en juin dernier. Plus de 500 décisions ont été accordées à ce jour. Auparavant, la liberté conditionnelle était du seul ressort du ministre de la justice. Désormais, dans chaque prison siège une commission présidée par le juge d'application des peines. Dans son chapitre III portant sur la liberté conditionnelle, la loi fixe les conditions d'éligibilité à la bonne conduite et à la présentation de gages réels d'amendements (article 134). “45% des détenus sont des récidivistes” Le président de la république vient d'alléger les prisons de plus de 6 000 pensionnaires. Avant la grâce qu'il a décidée à la veille de l'aïd, la population carcérale était évaluée à 51 000 détenus. Cette estimation tout à fait officielle est avancée par Mokhtar Felioune, directeur général de l'administration pénitentiaire et de la réinsertion. Au cours d'un point de presse improvisé, il a esquissé une topographie du milieu carcéral en révélant, notamment, que la moyenne de la détention préventive a baissé. Elle est passée de 13 à 11,5% et concerne de ce fait entre 5 000 et 6 000 prisonniers. Selon le responsable des prisons, ce taux avoisine les normes européennes. “La majorité des pensionnaires en attente de jugement ne dépasse pas 4 à 5 mois de détention”, souligne-t-il. En revanche, la proportion des récidivistes prend une dimension alarmante. Actuellement, ils représentent 45% de la population carcérale. La faillite de la politique d'insertion appliquée jusque-là est sans doute en cause. Pourtant, la prison est loin de ressembler à une colonie de vacances. L'espace individuel réservé à chaque incarcéré ne dépasse pas 1,68 mètres. D'où un programme ambitieux concocté par le gouvernement pour la construction de 51 établissements, dont 41 d'une capacité de 36 000 places devant être livrées avant 2009. Samia Lokmane