L'Agence internationale de l'énergie (AIE) dit craindre un effet retour de manivelle des sanctions occidentales contre la Russie. Dans son rapport mensuel publié hier, l'AIE, qui défend les intérêts des économies avancées, nourrit désormais sérieusement la crainte d'un "choc" sur l'offre pétrolière mondiale à la suite des sanctions contre la Russie. L'organisation a, dans la foulée, abaissé ses prévisions de la demande pour 2022. "La perspective de perturbations à grande échelle de la production russe menace de créer un choc mondial de l'offre pétrolière", écrit l'AIE dans un rapport mensuel. Outre l'embargo décrété par les états-Unis et le Royaume-Uni sur le pétrole russe, de nombreuses entreprises – compagnies pétrolières, courtiers, banques... – se sont d'elles-mêmes détournées de la Russie, ce qui fait dire à l'Agence internationale de l'énergie sa crainte quant à des conséquences considérables sur l'offre mondiale de pétrole. La Russie est le plus gros exportateur mondial avec, au compteur, 8 millions de barils par jour de pétrole brut et de produits raffinés à destination du reste du monde. L'AIE estime que 3 millions de barils par jour de pétrole russe pourraient être indisponibles à partir d'avril, un volume qui pourrait augmenter si les sanctions deviennent plus sévères ou si les condamnations publiques de la Russie prennent de l'ampleur. Face à ces pertes, "il y a peu de signes d'une augmentation de l'offre provenant du Moyen-Orient ou d'une réallocation significative des flux commerciaux", note l'AIE. L'absence d'alternative viable à l'offre russe ne fait que complexifier davantage l'équation. L'AIE, qui anticipe un retour du brut iranien sur le marché dès la levée des sanctions dans le cadre d'un nouvel accord nucléaire, avec une perspective d'un rebond d'environ un million de barils par jour sur six mois, juge, néanmoins, que les volumes attendus du pétrole iranien sont insuffisants pour compenser la perte du pétrole russe. Du côté de l'offre de l'Opep et de ses partenaires, parmi les producteurs non-Opep, les pays siégeant dans l'alliance Opep+ se sont opposés, jusqu'ici, à l'idée d'augmenter leur production pour soulager le marché, s'en tenant à un relèvement graduel de 400 000 barils par jour chaque mois. Les pays disposant de capacités de production supplémentaires – Arabie saoudite et Emirats arabes unis – ne manifestent aucune volonté d'ouvrir davantage le robinet. Au chapitre de la demande, l'AIE a également revu en baisse sa prévision de croissance pour 2022 d'environ un million de barils par jour, en raison de l'effet de l'augmentation des cours des matières premières et des sanctions contre la Russie sur l'économie mondiale. La demande mondiale est désormais attendue en hausse de 2,1 millions de barils par jour cette année, pour atteindre un total de 99,7 millions de barils par jour. Ainsi, les craintes d'un resserrement de l'offre et d'une demande moins vigoureuse qu'initialement prévu contribuent à l'alimentation du mouvement haussier des cours.