Il quitte également le bureau du syndicat et entend créer une nouvelle organisation. “Je ne veux plus être l'otage d'un courant que je ne maîtrise plus”. C'est par cette explication très sommaire, mais symptomatique que Méziane Mériane motive son renoncement au poste de coordinateur national du Conseil national des professeurs de l'enseignement secondaire et technique (Cnapest). La figure de proue du syndicat autonome a adressé une lettre de démission aux membres du Conseil, dimanche dernier. Cette missive dont les journalistes ont eu connaissance hier, a été lue par un des membres de l'instance dirigeante. “Pour des raisons familiales, je constate qu'il n'est plus possible d'assurer mes responsabilités”, invoque M. Meriane dans une correspondance manuscrite. Cependant, pour ses anciens collaborateurs, ce départ qualifié de “surprenant”, suggère plusieurs lectures. “Il a peut-être subi des pressions ou obtenu des promesses”, pense Nouar Larbi, son remplaçant provisoire à la tête du Cnapest. Pour lever les ambiguïtés, il aurait souhaité que M. Meriane vienne en personne expliquer son geste devant le conseil national réuni en session ordinaire depuis hier au siège du FFS à Alger. À l'origine, l'ordre du jour de cette réunion était focalisé sur la préparation de la grève des 15 et 16 janvier prochain, à laquelle le Cnapest prend part au même titre que d'autres formations autonomes ainsi que le syndicat d'entreprise de l'UGTA, représentant la wilaya de Béjaïa. Mais la défection de M. Meriane a bouleversé l'ordre des priorités, si bien que le conseil a décidé de rester en session ouverte. “La prochaine réunion sera tenue dans les plus brefs délais et M. Meriane y sera convié”, annonce son successeur. Des engagements familiaux ont empêché le désormais ex- coordinateur national de rendre compte de sa décision dans l'immédiat. Néanmoins, à la place de ses anciens collaborateurs, M. Meriane préfère s'exprimer devant les médias. “J'ai prévu d'organiser une conférence de presse, la semaine prochaine”, assure-t-il, visiblement contrarié par la célérité avec laquelle les membres du conseil ont rendu publique sa démission, alors que l'exclusivité d'une telle annonce lui revient. Dans sa version des faits, le divorce avec les pratiques de ses camarades syndicalistes est sa principale motivation. Exit les raisons familiales, purement formalistes. Commençant par évoquer “des divergences d'approche”, M. Meriane se livre plus amplement en déplorant des entraves à l'exercice de ses prérogatives. “Il y a un semblant de débat démocratique, mais on essaye de m'imposer des décisions prises à l'extérieur du syndicat”, proteste l'ex-patron du Cnapest dans une communication téléphonique. Refusant de nommer ses adversaires, ce “courant” qui rogne ses pouvoirs, il conteste leurs méthodes. “Un syndicat doit revendiquer puis protester et pas le contraire”, soutient M. Meriane. Aussi, après trois années de loyaux services, il compte bien mettre son expérience et son militantisme au service d'une nouvelle formation autonome. À cet égard, il invite l'ensemble des professeurs de l'enseignement secondaire à prendre part à des assises qui, selon lui, “seront tenues incessamment”. Cette initiative, somme toute estimable, comporte toutefois le risque de produire une scission au sein du Cnapest, dont les militants seront ballottés entre un syndicat et son clone. Ce qui, de toute évidence, desservira l'action des enseignants et affectera leur mobilisation en faveur d'une meilleure considération socioprofessionnelle. La démarcation prétendue de M. Meriane de la prochaine grève anticipe cette perspective fâcheuse. “Il ne faut pas que ma démission fasse l'objet de mauvaises interprétations. Je ne suis pas contre la grève. J'appelle l'ensemble des enseignants à y adhérer”, se défend l'intéressé. Dans sa rencontre avec les journalistes, le vice-président du Cnapest a clairement laissé entendre le contraire. Il a même qualifié la démission de son ancien chef de “seconde démarcation”. SAMIA LOKMANE