La Grande-Bretagne et les Etats-Unis ont déclenché un compte à rebours pour la guerre en Irak à l'issue de la rencontre des dirigeants des deux pays, vendredi dernier, à la Maison-Blanche, alors que Hans Blix estime que rien ne justifie l'usage de la force. “Saddam n'a plus que six semaines pour éviter une guerre”, titre en Une le quotidien anglais Daily Telegraph et “une guerre contre l'Irak d'ici six semaines” prévient le Times. la presse britannique se fie aux déclarations des proches de Tony Blair, à l'issue de la rencontre de ce dernier avec George Bush à Washington. Les deux hommes ont mis au point “un calendrier vers la guerre qui indique un début des hostilités à la mi-mars”, affirme le Times. Le président américain et le Premier Ministre britannique accordent ainsi un délai de six semaines aux inspecteurs en désarmement pour achever leur travail. Le même délai est accordé aux services de renseignements pour persuader la France et les pays arabes réticents de rallier une action militaire contre l'Irak. A ce propos, Tony Blair estime que la position de Paris et de Berlin qui veulent laisser plus de temps aux inspecteurs, fait partie “des réticences naturelles des gens à partir en guerre”. Le locataire de Dowing Street n'est pas contre une seconde résolution du Conseil de sécurité de l'ONU et se dit assuré que cet organe votera l'autorisation de recours à la force. A ce sujet, Blair a déclaré à la BBC radio “il [Bush] tient beaucoup, et moi aussi, à ce que les débats sur une seconde résolution ne deviennent pas un moyen de repousser tout cela pendant des mois et des mois”. Dans le même entretien, le responsable britannique a réaffirmé que Saddam Hussein n'avait que quelques semaines, sans autre précision. cela n'est cependant pas l'avis de Hans Blix, le chef des inspecteurs, qui n'a pas ménagé vendredi l'administration Bush, à laquelle il reproche de lancer des accusations non étayées contre Bagdad. Il se prononce pour la poursuite des inspections. Dans des déclarations au New York Times, Blix affirme n'avoir “rien vu sur le terrain justifiant le déclenchement d'une guerre”. Il pense qu'il est inutile d'accabler l'Irak d'autres vilenies non corroborées. Le patron de la Cocovinu ira jusqu'à dire que rien ne prouve que Bagdad entretienne des liens étroits avec El-Qaïda, plus proche de pays comme l'Afghanistan, contrairement à ce qu'a déclaré le président américain dans son discours sur l'état de l'union. Blix réfute également les assertions de Bush, faisant état de l'envoi par les responsables irakiens d'agents secrets pour répondre aux inspecteurs à la place de scientifiques. Quant aux déménagements par les Irakiens d'équipements prohibés avant l'arrivée des inspecteurs sur les sites à contrôler, il affirme que ses techniciens n'ont rien observé de tel. Pour afficher son indépendance à l'égard de toutes pressions après les accusations de l'ancien inspecteur Scott Ritter, lui reprochant de favoriser la guerre, Hans Blix exprime sa préférence pour un désarmement pacifique. “Ce serait terrible si tout ça se terminait par l'usage de la force armée, et je souhaite que ce processus de désarmement se poursuive par la voix pacifique des inspections”, a-t-il précisé au quotidien new-yorkais, avant d'ajouter : “Même dans les conditions actuelles, je souhaiterais certainement plus de temps pour les inspections, parce que c'est bizarre d'avoir huit années d'inspections, puis quatre années sans et seulement deux mois d'inspections avant de faire une croix dessus.” Le Suédois a cependant tenu à rappeler que la durée des inspections est tributaire de la coopération irakienne. Les affirmations de Hans Blix viennent détruire l'argumentation américano-britannique visant à utiliser la force contre l'Irak avant que les inspections n'apportent des preuves concrètes sur la défaillance du régime de Saddam Hussein. Il faut cependant attendre la réunion du Conseil de sécurité de l'ONU, demandée par Washington pour le 5 février prochain, afin de présenter ses preuves, pour voir plus clair dans cette histoire. La suite que donneront le chef des inspecteurs et le directeur de l'agence internationale de l'Energie atomique à l'invitation de l'Irak pour de nouvelles discussions pourrait aussi influer sur le cours des évènements. Attendons pour voir ! K. A.