Une rencontre entre troïka européenne, Américains, Russes et Chinois, pour préparer une prochaine réunion de l'exécutif de l'Aiea sur le dossier du nucléaire iranien, aura lieu lundi à Londres… Téhéran joue, dans un contexte défavorable, sur un autre front. L'Iran menace de cesser sa coopération avec l'Agence onusienne de non-prolifération nucléaire (Aiea) si son dossier nucléaire était envoyé au Conseil de sécurité de l'ONU, tout en n'excluant pas le dialogue avec les Européens, mais à ses propres conditions. Téhéran s'en tient à sa logique, à son droit à la technologie nucléaire tout en affirmant que la maîtrise de cette énergie ne servirait qu'à des fins civiles. L'ayatollah Khamenei, guide suprême de la république islamique, a donné sa caution pour la reprise des activités nucléaires, notamment le processus d'enrichissement de l'uranium, que conteste les pays occidentaux au prétexte que cette phase mène tout droit à la fabrication de la bombe atomique. Ces derniers se sont mobilisés au cours du week-end dernier pour essayer de trouver une parade à l'entêtement iranien. La troïka européenne (Grande-Bretagne, France et Allemagne) crie au scandale et menace le régime iranien de saisine auprès du Conseil de sécurité des Nations unies. Les Etats-Unis ont proféré les mêmes menaces par la bouche de la secrétaire d'Etat de Bush, Condoleeza Rice. Ces menaces, en fait, ne restent que des menaces. En cas d'envoi du dossier iranien au Conseil de sécurité, la troïka européenne perdra les moyens dont elle dispose actuellement car pour Téhéran, l'Aiea cessera d'être un interlocuteur. Conformément à la loi, l'agence de Viennes arrêtera toutes ses relations avec l'Iran, le relais sera pris par le Conseil de sécurité. À ce niveau, la cohésion n'est pas garantie. L'unanimité n'est pas acquise au sein de ses membres détenteurs du droit de veto. La Russie et la Chine ne suivront pas automatiquement les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la France. Moscou est le principal partenaire nucléaire de Téhéran et Pékin en est son principal fournisseur en armements. En outre, Washington n'est pas en mesure d'ouvrir un autre front dans la région et, de plus, Téhéran n'est pas l'Irak. Ce sont toutes ces données qui ont permis au président ultraconservateur, Mahmoud Ahmadinejad, de promulguer, en décembre dernier, une loi votée par le Parlement iranien, selon laquelle l'Iran pourrait se soustraire d'un régime renforcé de contrôle de ses activités nucléaires et reprendre l'enrichissement d'uranium si son dossier nucléaire était envoyé pour saisine ou information au Conseil de sécurité de l'ONU. Ahmadinejad a intimé l'ordre à l'Organisation iranienne de l'énergie atomique d'être prête à appliquer cette loi qui permet à l'Iran de se désengager du protocole additionnel au Traité de non-prolifération (TNP), qui soumet son programme nucléaire à un contrôle strict de la part de l'Aiea. L'adhésion au protocole a été signée par le secrétaire général de l'ONU Kofi Annan. Ce dernier a indiqué que le dirigeant iranien en charge du nucléaire, Ali Larijani, qu'il avait joint au téléphone, lui avait dit que l'Iran était toujours intéressé par une négociation sérieuse et constructive mais dans le cadre d'un calendrier. Téhéran conseille aux Occidentaux de séparer la question de la recherche de celle de la production du combustible nucléaire et de ne pas faire de la propagande à propos des activités de recherches nucléaires qui avaient été suspendues injustement. Téhéran affirme que l'enrichissement d'uranium à un niveau industriel est toujours suspendu mais ne cache pas sa volonté de le reprendre dans un avenir proche. Le bras de fer continue. D. Bouatta