Le Conseil national économique et social (Cnes) a élaboré un rapport sur la politique monétaire en Algérie qui sera examiné lors de sa 26e session, qui se tiendra aujourd'hui et demain au Palais des nations d'Alger. Les experts du Cnes ont souligné que “c'est avec l'application du programme de stabilisation macroéconomique 1994-1995 puis celui de l'ajustement structurel 1995-1998 que la politique monétaire, digne de ce nom, c'est-à-dire avec ses objectifs et ses instruments, a été mise à contribution”. Ces experts ont estimé qu'“elle ne l'a pas été de manière autonome puisqu'elle a été intégrée dans un package d'ensemble au côté de la politique budgétaire, de la politique de change et autres mesures telles que le rééchelonnement de la dette extérieure, la libéralisation des importations… comme l'exigeaient à la fois la situation économique à fin 1993 et la nécessité de la relance du processus de transition”. Ils ont relevé, par ailleurs, que “le principal objectif confié à la politique monétaire demeure la lutte contre l'inflation c'est-à-dire un taux à chiffre comparable à ceux des principaux pays partenaires de l'Algérie”. Pour les experts du Cnes, “le programme d'ajustement structurel, autant il a permis la consolidation des résultats du programme de stabilisation, en l'occurrence les résultats macro-financiers et macro-monétaires internes et externes, autant il a échoué dans la relance de la croissance et la stabilisation du chômage”. Et pour cause, les réformes structurelles les plus importantes comme la réforme du secteur bancaire et la privatisation des entreprises publiques n'ont même pas démarré de manière sérieuse, indiquent-ils. Ils ont soutenu, également, que “c'est à partir de 2001 que la politique monétaire commence à se déployer de manière suffisamment autonome dans un contexte macroéconomique marqué par une inflation modérée, une balance des paiements courants significativement excédentaire, une croissance économique positive et un taux de chômage très élevé”. La Banque d'Algérie a adopté, selon ces experts, depuis 2003, l'approche des règles pour la conduite de la politique monétaire en ciblant un niveau de taux d'inflation ne dépassant pas le plafond des 3%. Ils ont précisé que “si le contrôle de l'inflation relève fondamentalement du champ de la politique monétaire, il ne saurait être son unique objectif”, tout en s'interrogeant “à quoi bon d'avoir un taux d'inflation de moins de 3% et un taux de chômage de plus 17% selon l'ONS ? On pourrait même se demander si cela ne procède pas d'une stratégie en faveur de la stabilisation des prix chère au FMI ?” Cela laisse suggérer que les critères du FMI influent sur la politique de la Banque centrale. La lutte contre l'inflation, c'est-à-dire la hausse des prix, n'est pas, selon les experts du Cnes, l'affaire exclusive de la politique monétaire car la politique budgétaire et fiscale tout comme la politique des revenus ont, aussi, des effets considérables sur l'inflation. Ils ont noté que “le système bancaire algérien vit depuis 2001 une situation de surliquidité structurelle inédite suite principalement aux retombées des ressources pétrolières et subsidiairement aux débours du Trésor public au profit des banques publiques pour leur recapitalisation et son désendettement partiel envers elles”. Du coup, le système bancaire s'est retrouvé hors Banque centrale, plus de réescompte, plus de pension ou d'adjudications parce qu'il y a uniquement le marché interbancaire qui demeure fonctionnel, martèlent-ils. L'épargne bancaire : 30 milliards de dollars en 2003 Les fonds propres du secteur bancaire sont évalués, selon le Cnes, à environ 150 milliards de DA, soit l'équivalent de 2 milliards de dollars en 2003 alors que l'épargne réalisée par les banques est passée de 1 635 milliards de DA en 2001 à 2 139 milliards de DA en 2003. Ces experts ont affirmé que “l'impact de la politique monétaire sur la stabilisation des prix, à l'aide du contrôle ou de la stabilisation monétaire, n'est pas mesuré, mais on peut accepter l'hypothèse de son importance si l'on admet l'existence d'une forte corrélation positive entre les variations de la quantité de monnaie en circulation et les variations des prix”. Les rédacteurs de ce rapport ont indiqué que “le dirigisme du taux de change s'exerce de manière totalement discrétionnaire dans la mesure où aucune annonce de sa trajectoire n'est faite à l'avance”. De ce fait, les agents économiques n'ont aucune visibilité en ce qui concerne le comportement du taux de change du dinar sauf à anticiper sa dépréciation continue, sans pour autant pouvoir prendre les mesures nécessaires pour se couvrir contre le risque de change. Ceci ne leur permet pas, selon les experts du Cnes, de prendre de bonnes décisions et réaliser une meilleure allocation de leurs ressources. Ces experts ont proposé que “de continuer à appliquer ce régime avec une transparence acceptable et ce, en animant ou réanimant le marché interbancaire des changes dans ces deux compartiments au comptant et à terme”. Ils ont plaidé, également, en faveur de la stabilisation du taux de change du dinar algérien. Faïçal Medjahed