La Cour suprême américaine doit examiner demain le cas du Yéménite Salim Ahmed Hamdan, dont l'affaire est susceptible d'invalider les dizaines de plaintes de prisonniers de Guantanamo (Cuba) devant la justice civile. Salim Hamdan, ancien chauffeur d'Oussama ben Laden, a été arrêté en Afghanistan en novembre 2001, transféré quelques mois plus tard à Guantanamo et inculpé de conspiration en juillet 2003 par un tribunal militaire d'exception. Le détenu s'est alors tourné vers la justice civile américaine pour contester la validité de ces tribunaux instaurés par le président George Bush, juste après les attentats du 11 septembre. Acceptée en première instance mais rejetée en appel, sa requête arrive devant la Cour suprême. Seuls huit des neuf juges siègeront. Le président de la Cour, John Roberts, récemment nommé à la Cour suprême, s'est récusé parce qu'il siégeait à l'époque au sein de la cour d'appel fédérale qui a rejeté la requête de Salim Hamdan. Mais avant de se pencher sur la validité des tribunaux militaires, les huit sages devront examiner leur compétence. Le gouvernement américain a, en effet, demandé à la Cour de se dessaisir de l'affaire en s'appuyant sur une loi promulguée fin décembre et qui empêche, selon lui, ce type de recours. Un article de cette loi, le “Detainee Treatment Act”, dont le but annoncé était pourtant d'éviter tortures et abus, limite strictement les possibilités pour les détenus de Guantanamo de saisir la justice civile américaine. Ils peuvent seulement, de manière très encadrée, contester leur statut d'“ennemi combattant” devant la cour d'appel fédérale de Washington, mais celle-ci n'a pas l'obligation de se saisir. Sinon, ils devront attendre d'avoir été jugés par un tribunal militaire d'exception pour pouvoir contester leur détention. À ce jour, seuls dix des quelque 490 détenus de Guantanamo, dont certains sont arrivés début 2002, ont été inculpés, et aucun n'a encore été jugé. Le gouvernement affirme qu'en instaurant une procédure unique pour les détenus de Guantanamo, la loi, rétroactive, annule les dizaines de recours déposés aux Etats-Unis avant sa promulgation. Selon un mémoire déposé par les avocats du gouvernement, seule la Cour d'appel fédérale de Washington peut désormais examiner une affaire liée à Guantanamo, et ce de manière très limitée. Les autres juridictions, y compris la Cour suprême, ne sont pas compétentes. Les avocats de Salim Hamdan avancent au contraire qu'il n'est pas possible d'annuler les affaires en cours et que les détenus ne peuvent être privés du droit constitutionnel de contester leur détention. Si la cour suit l'argumentation du gouvernement, elle entraînera dans son sillage toutes les juridictions inférieures. Tous les recours des autres détenus, dénonçant leur détention, ou des mauvais traitements, seront systématiquement rejetés.