Au lendemain des obsèques du ministre Pierre Gemayel, le gouvernement pro-occidental libanais se prépare à soumettre au Parlement le projet de l'ONU de tribunal sur le meurtre de Rafic Hariri, un projet que le camp prosyrien est soupçonné de vouloir torpiller. Affaibli par la récente démission de six ministres prosyriens, le Premier ministre Fouad Siniora a appelé, jeudi, les démissionnaires à réintégrer le gouvernement et participer, aujourd'hui, à une réunion extraordinaire au cours de laquelle le cabinet doit donner son feu vert au projet controversé de tribunal. Cette réunion survient à un moment de tensions extrêmes entre les camps pro et antisyriens. Jeudi, des centaines de milliers de Libanais, rassemblés à Beyrouth pour les funérailles du ministre de l'Industrie, l'antisyrien Pierre Gemayel, avaient fustigé le président prosyrien Emile Lahoud et la Syrie, pointée du doigt par certains responsables tant pour l'assassinat de M. Gemayel, mardi dernier, que pour celui de M. Hariri le 14 février 2005. Le camp prosyrien au Liban est soupçonné de vouloir entraver la création du tribunal international sur le meurtre de Rafic Hariri afin de dissimuler une éventuelle implication syrienne. Le ministre de l'Intérieur Hassan Sabeh, qui avait renoncé à ses fonctions après des émeutes en février, est revenu sur sa démission pour renforcer les rangs de la majorité après l'assassinat de Pierre Gemayel. La majorité parlementaire antisyrienne accuse les ministres démissionnaires d'avoir quitté les rangs du gouvernement pour tenter d'empêcher l'approbation par le Liban du tribunal international. Officiellement, ces ministres ont démissionné après l'échec des consultations visant à mettre sur place un gouvernement d'union nationale où l'opposition aurait une sorte de droit de veto aux décisions du cabinet. L'actuel gouvernement de 24 membres, amputé de ces six ministres, a été qualifié d'”illégitime” par le chef de l'Etat, et par le président du Parlement Nabih Berri, lui aussi prosyrien. “La question du tribunal international devrait être un facteur d'unité, il faut qu'il soit formé pour révéler la vérité sur les crimes commis et ceux qui pourraient encore advenir”, a pourtant estimé M. Siniora jeudi. Pour cela, ce projet doit revenir devant le Conseil des ministres qui, après avoir signé la convention — il s'agit d'un traité international — le transmettra pour discussion au Parlement sur proposition de son président Nabih Berri. R.I./Agences