Les agences d'El Khalifa Bank sont prises d'assaut depuis quelques jours. Aux clients inquiets du sort de leurs avoirs et voulant effectuer des retraits, les préposés aux guichets répondent qu'il faut patienter. Sans plus d'assurance. Liberté a enquêté. Depuis qu'El Khalifa Bank a fait l'objet de mesures restrictives de la part des autorités bancaires, un certain mouvement de panique s'est fait observer chez les épargnants domiciliés à cette banque, ces derniers jours. Les rumeurs sont allées bon train. On a vite conclu que les agences de Abdelmoumen Khalifa frôlaient la banqueroute ; qu'il n'y avait plus de liquidités pour satisfaire les clients. Hier, nous avons tenté de sonder un peu l'état d'esprit au sein des banques primaires d'El Khalifa, de part et d'autre du guichet. Nous sommes à l'agence de Chéraga, nous pénétrons dans la belle officine. Première image qui s'impose : il y a un monde fou dans l'enceinte de l'agence, avec tout un brouhaha de quémandeurs. Au moins, une cinquantaine de personnes. De l'autre côté des guichets, les agents de la banque sont dépassés. Ils sont tellement sous pression que nous nous ravisons de les “embêter” avec nos questions. La plupart des gens qui attendent sont de simples salariés. On nous assure d'emblée que la rumeur de faillite n'est guère fondée. La banque dispose de liquidités en dinars. C'est plutôt en devises que le problème se pose. Au guichet retrait-virement, des billets verts circulent. Des dollars. Ils sont virés au compte-gouttes. A un moment donné, un client d'un certain âge se plaint à son vis-à-vis du guichet que les chèques d'El Khalifa sont rejetés par la BEA. “Ils m'ont dit qu'ils acceptaient n'importe quel chèque, tout, sauf ceux-là !”, explique-t-il. Nous le suivons à l'extérieur de l'agence pour en savoir plus sur cette histoire. L'homme se révèle être un agent général pour la SAA. “Moi, je n'ai aucun problème avec El Khalifa Bank. C'est la société-mère qui veut retirer son argent de cette banque en raison du fait que ses chèques ne sont pas acceptés”, précise-t-il. Pour lui, il n'y a aucune raison de s'inquiéter. “El Khalifa Bank a plus d'une corde à son arc. Elle dispose d'un fonds pour rembourser ses clients. Il ne faut pas oublier que préalablement à l'ouverture de la banque, celle-ci a dû déposer une caution importante de l'ordre de plusieurs milliards”, rassure-t-il. Pendant que nous devisions avec ce client, le service d'ordre de l'agence était en branle. Notre reporter-photographe, se verra ainsi violemment interpellé dès qu'il a sorti son boîtier pour prendre quelques plans extérieurs, à partir du trottoir d'en face. Les nerfs chauffent. Les voix s'élèvent. Un lieutenant de permanence finit par départager Khalifa et la presse. “La liberté de la presse est garantie par la loi”, fait-il observer doctement à l'adresse des gorilles de la banque, sur un ton conciliant. “Les journalistes sont libres de faire leur travail. Ils sont parfaitement en règle. Hier, une équipe de K-TV est venue vous filmer. Pourquoi vous n'aviez pas protesté ?”, ajoute-t-il. Nous avions plein d'interrogations en tête. L'agence est-elle en mesure d'honorer ses engagements ? Combien de temps estime-t-on que cette “crise” va durer ? Quel est l'état d'esprit du personnel d'El Khalifa Bank ? Autant de questions qui mourront sur le perron du bureau d'ordre. M. B.