Dans un commentaire au sujet de l'exécution de l'ancien chef de l'Etat irakien samedi dernier à l'aube, Rizkar Mohamed Amine, le magistrat kurde qui dirigeait la première partie du procès Doujaïl, dans lequel Saddam Hussein était jugé pour la mort en 1982 de 148 villageois de cette localité, a affirmé que la pendaison le jour de l'Aïd n'était pas légale. “L'exécution du verdict le premier jour de l'Aïd est illégale et contraire aux principes de l'islam”, a-t-il dit. Il faut dire que l'avis de ce juriste de renom en Irak, de surcroît anti-Saddam de part son origine ethnique kurde, constitue une condamnation de l'œuvre macabre du gouvernement de Nouri Al-Maliki. Le cabinet de ce dernier vit des moments difficiles suite à la diffusion sur Internet de l'intégralité de la pendaison, filmée semble-t-il par un ou deux hauts responsables de l'Etat irakien, comme l'a déclaré le procureur de la Haute cour pénale irakienne. Sans divulguer leurs identités, celui-ci a assuré que les deux responsables en question étaient les seuls parmi les présents à avoir gardé leur téléphone portable. Ces révélations mettent dans la gêne le Premier ministre irakien, qui a ouvert une enquête officielle pour déterminer l'auteur de la vidéo, qui a été visionnée par des millions d'internautes. Par ailleurs, tout indique que Nouri Al-Maliki a agi en solitaire dans l'organisation de la cérémonie d'exécution de Saddam Hussein. C'est du moins ce qu'a laissé entendre, le président irakien qui a pris mardi ses distances avec l'exécution de Saddam Hussein, en précisant qu'il s'était “tenu à l'écart” de la pendaison de l'ex-dictateur. Dans un communiqué qu'il a rendu public, Jalal Talabani explique : “Je me suis tenu à l'écart et je ne suis pas intervenu dans le décision du Haut tribunal pénal, dont l'article 27 des statuts prévoit que ses décisions finales sont sans appel”. Il souligne que l'article 27 en question précise notamment qu'aucune autorité, “pas même le président de la République, ne peut gracier les condamnés ou réduire les peines prononcées” par le Haut tribunal. Pour rappel, le 26 décembre dernier, la cour d'appel du Haut tribunal avait rejeté l'appel de Saddam Hussein, condamné à mort le 5 novembre pour “crime contre l'humanité”. Ceci étant, le chef de l'Etat irakien réaffirme “son opposition à la peine de mort, mais il n'interfère pas dans les décisions de la justice, qui est indépendante”. Considéré comme un opposant convaincu à la peine de mort, il a toujours refusé de signer les autorisations d'exécution des condamnés, s'absentant de Bagdad à ces moments et laissant ses deux vice-présidents le faire à sa place. Autre révélation de taille, le communiqué de Jalal Talabani indique que “le Président ne savait pas à l'avance quand serait pendu Saddam”. Une chose est sûre, la polémique sur la vidéo pirate de l'exécution de Saddam Hussein prend des allures d'affaires d'Etat et met en difficulté le Premier ministre Nouri Al-Maliki. L'assassinat du Cheikh Hamed Mohammed Souhaïl, 75 ans, un modéré, qui dirigeait la tribu irakienne des Béni Tamim, dont les membres sont également établis dans la quasi-totalité des pays arabes du Moyen-Orient, complique davantage la situation. K. ABDELKAMEL