Avec les réformes engagées et la généralisation des cartes bancaires, les institutions financières et les services de sécurité devront anticiper pour parer à cette nouvelle forme de crime qui pourrait sérieusement porter atteinte à l'économie nationale. La fraude par cartes bancaires : voilà un nouveau phénomène étranger à notre société et que les institutions financières du pays, à commencer par nos banques, n'ont jamais abordé, alors qu'il fait des ravages sous d'autres cieux. Autrefois définie comme une tromperie entre un marchand et sa banque émettrice qui récupère l'argent au lieu de le verser au compte des services concernés, la fraude bancaire a pris une autre tournure que les escrocs, les voleurs, les hackers et autres criminels utilisent en falsifiant les cartes à puce qu'on croyait pourtant assez protégées par les données. La dernière revue (n°22 d'avril 2007) de la Gendarmerie nationale a eu le mérite de soulever cette forme de criminalité qui pourrait porter, dans les années à venir, sérieusement atteinte à l'économie nationale et à tous les utilisateurs des cartes de crédit ou toute autre forme de cartes de paiement bancaires. Les criminels n'ont pourtant pas besoin de gros moyens pour frauder. Il leur suffit “de voler l'information contenue sur ces cartes (nom, prénom, numéro de carte et numéro de sécurité), de trouver du plastique (n'importe quel type de plastique fera l'affaire) et d'avoir un appareillage spécifique qui leur permettra de copier les informations recueillies sur la carte plastique)”, lit-on dans le même document de la Gendarmerie nationale. Les nouvelles technologies aidant, notamment l'Internet, les contrefacteurs défient toutes les lois des firewales pour craquer les données centralisées pourtant hautement protégées. Toutefois, d'autres techniques ont émergé au fil du temps. Le lieutenant Rédha Hamani, master en fraude management à l'université de Teeside, et auteur de l'étude publiée par cette revue, estime qu'on peut cerner deux types de fraude de carte de crédit. D'abord, la fraude des distributeurs de billets. Cette technique, la plus usitée, fait appel à deux procédés : un attrape-carte pour empêcher la carte de revenir à son détenteur, le temps que ce dernier aille se plaindre, avant de la subtiliser, ou encore placer une mini-caméra au-dessus du distributeur pour lire et enregistrer en temps réel toutes les données de la carte ainsi que le code secret par le biais de l'envoi d'un infrarouge. Les criminels enregistrent le maximum de données de clients, changent de distributeur et retirent l'argent en toute quiétude. Ensuite, la fraude par cartes bancaires via Internet. Les criminels se prémunissent contre tout repérage avant de procéder au piratage des données. C'est alors qu'ils envoient un courrier électronique, via un site Internet cloné, à la victime espérant l'ouvrir. Croyant qu'il s'agit d'une simple mise à jour, les victimes tombent dans le panneau ! Elles complètent alors leurs données pendant que les criminels saisissent les mêmes données sur un autre registre. Mieux, un virus informatique sera injecté sur l'e-mail de la victime pour contrôler toute opération bancaire. D'autres techniques, dont l'étude n'a pas fait référence, sont également utilisées par les criminels. Mais le propos n'est pas là : il s'agit de mettre en œuvre une dynamique à même de lutter contre ce phénomène naissant chez nous partant des récentes réformes bancaires engagées, notamment l'introduction des cartes comme nouveau moyen de paiement. Sachant que le système bancaire actuel est non seulement anarchique, mais obsolète, l'étude met évidemment en valeur le fait que ce procédé soulagera sans doute les clients des banques non sans souligner les conséquences néfastes, voire dangereuses que cela pourrait créer, notamment la fraude par cartes bancaires. Du coup, la même étude préconise d'anticiper en prenant en considération l'expérience des autres pays, les modèles existants et formuler des propositions spécifiques à l'Algérie dans ce domaine, notamment en matière de législation pour parer à ces graves délits financiers aussi complexes. Des exemples, comme ceux dEl Khalifa Bank et BCIA, ont été cités pour illustrer certains dysfonctionnements et autres scandales qui y ont découlé. Outre la nécessité de se mettre au diapason des autres pays dans ce domaine, l'Algérie devra revoir certains textes de loi qui punissent ce genre de fraude, sachant que les peines actuelles (500 à 20 000 DA) sont absolument insignifiantes et à la limite, elles ne sont même pas dissuasives. D'autres propositions ont été également formulées dans la même étude pour la Gendarmerie nationale et aux banques algériennes. Si pour les uns, il s'agit de créer des unités spéciales au niveau de chaque wilaya, avec en appoint une unité centrale de coordination pour lutter contre cette forme de crime économique, pour les autres, il s'agit de consentir des investissements à même de protéger leurs clients, comme les caméras de surveillance, et protéger leurs services, notamment le e-banking, à travers une sécurisation de leurs sites pour authentifier leurs clients. Encore faudra-t-il penser aux clients analphabètes et aux personnes âgées ! FARID BELGACEM