La sécurité de l'approvisionnement énergétique de l'Europe continue d'inquiéter les Européens. Jose Manuel Barroso, le président de la Commission européenne, a préconisé, jeudi dernier, l'instauration d'un “cadre juridique pour l'énergie dans la politique européenne de voisinage”. Premiers concernés, les principaux fournisseurs que sont l'Algérie, la Norvège et la Russie. Si d'un côté le président de la Commission européenne appelle les vingt-cinq à entretenir de “bonnes relations énergétiques” avec les principaux fournisseurs en gaz de l'Europe, il préconise néanmoins l'instauration au niveau européen d'un cadre juridique avec les pays voisins, notamment l'Algérie, la Russie et la Norvège. Sans pour autant l'expliciter, ni en définir les contours futurs. Intervenant dans un séminaire sur l'énergie et le changement climatique, Jose Manuel Barroso a annoncé que l'UE va “travailler à l'instauration d'un cadre juridique pour l'énergie dans la politique européenne de voisinage, dans lequel la dimension méditerranéenne sera extrêmement importante”. L'UE intensifie actuellement ses efforts pour renforcer les relations énergétiques dans la région euro-méditerranéenne, “notamment par une coopération accrue avec l'Algérie, l'Egypte, les pays du Machrek et le Moyen-Orient, y compris le Qatar qui détient d'importantes ressources gazières”. Elle diversifie également ses relations énergétiques dans son voisinage par la signature de protocoles d'accord sur l'énergie avec l'Ukraine, l'Azerbaïdjan et le Kazakhstan, et la poursuite de la mise en place du corridor énergétique reliant l'UE, la mer Caspienne et la mer Noire. La demande énergétique mondiale pourrait augmenter, selon lui, de 60% d'ici à 2030 “si rien n'est fait pour infléchir le cours des choses, et les importations européennes passeront de 50 à 70%”, a-t-il prévenu. Les inquiétudes européennes concernant sa sécurité d'approvisionnement énergétique se justifient, arguera-t-il, par “la capacité du marché de nos principaux fournisseurs à honorer les commandes”. Pour le président de la Commission, “la dépendance énergétique en soi n'est pas nécessairement un risque”. L'UE ayant autant besoin, selon lui, du pétrole et du gaz de ces pays que eux ont besoin du marché européen. José Manuel Barroso se fera un peu plus clair en relevant que “c'est le comportement des fournisseurs qui peut l'être”. Cette interdépendance est “mutuellement bénéfique tant qu'elle relève du jeu du marché, et non d'une partie d'échec géopolitique”. L'allusion trouve son origine dans la guerre du gaz ukraino-russe du premier trimestre 2006 et tout ce qui en a découlé comme tensions sur le marché international et de craintes au niveau européen. Elle a trait également aux différentes déclarations du président russe Vladimir Poutine au sujet de l'enjeu stratégique du gaz, à une éventuelle création d'un cartel de pays producteurs de gaz. Sans oublier la polémique qui a suivi en Europe la signature du mémorandum d'entente entre Sonatrach et Gazprom, ainsi que les tensions actuelles dans l'axe algéro-espagnol pour la révision du prix du gaz. Il reste à connaître les contours réels de ce nouveau “cadre juridique”, sachant que le domaine énergétique est régi par les accords bi ou multilatéraux, des contrats gaziers ou pétroliers ainsi que par les diktats du marché international. Cette sortie du président de la commission européenne suscite néanmoins nombre d'interrogations, notamment sur la manière dont va procéder la commission pour l'instauration de ce cadre juridique et ce qu'il va réellement contenir ou définir. L'épisode de la directive gaz européenne est encore trop vivace pour ne pas entraîner des inquiétudes chez les principaux fournisseurs de l'Europe. Sachant que la commission avait à ce moment-là agi seule sans y associer ses principaux partenaires. Samar Smati