La contrebande de ce carburant aux frontières persiste. La douane a saisi 190 000 litres de ce liquide en 2006 et 40 000 litres de janvier à mai 2007. Le ministre de l'Energie et des Mines, M. Chakib Khelil, propose une hausse des prix du gasoil (diesel) à partir de l'année prochaine. Il estime que la consommation de ce carburant a augmenté sensiblement ces dernières années. Elle est passée de 3,6 millions de tonnes en 2000 à 6,1 millions de tonnes en 2006, soit le double en quelques années. L'augmentation de la consommation est estimée à 10% par année en moyenne. La croissance de la demande nationale sur cette courte période représente, selon le ministre, un volume additionnel de 2,5 millions de tonnes qui serait valorisé à 1,5 milliard de dollars. La demande est de plus en plus importante et les capacités des raffineries, évaluées à environ 22 millions de tonnes/an, sont devenues insuffisantes. D'où la décision du ministère de l'Energie et des Mines de réhabiliter ces unités, d'augmenter leur production et de construire une nouvelle usine à Tiaret à même de produire 15 millions de tonnes/an. Avec l'ouverture de cette raffinerie en 2012 pour laquelle l'Etat dépensera plusieurs milliards de dollars, l'offre pourra ainsi combler le déficit. La politique du département de M. Khelil vise également à encourager la consommation des autres carburants tels que le GPL, l'essence et le gaz naturel comprimé en baissant leurs prix afin de réduire cet intérêt pour le gasoil. Le ministère a inscrit aussi dans sa démarche l'idée de mettre un frein à cette tendance vers la diésélisation du parc automobile national qui est passée de 27% en 2000 à 31% en 2006. Les automobilistes optent pour le gasoil car cela leur revient moins cher que l'essence. Or, “si nous poursuivons cette tendance, les raffineries y compris celle de Tiaret ne pourront satisfaire la demande. Pis, nous allons continuer à importer ce carburant trop cher en devises pour le vendre aux consommateurs au prix du marché local. Et la différence entre ces deux tarifs sera par conséquent supporter par l'Etat. Au lieu d'importer ce carburant, il est préférable d'utiliser cet argent à la construction d'un hôpital ou d'une école, par exemple. Ce n'est pas rationnel”, avouera M. Chakib Khelil en marge d'une journée d'étude sur la consommation du gasoil. Sonatrach a importé, à titre illustratif, plus de 100 000 tonnes pour 52 millions de dollars cette année. L'augmentation attendue de la consommation du gasoil, pour l'année 2007, se traduit, précisera-t-il, par un manque à gagner pour l'économie nationale soit une baisse des revenus d'exportation de près de 20 milliards de dollars. Pour cela, le ministre suggère de mettre en œuvre une autre politique des prix de sorte à pousser les citoyens à utiliser les autres carburants. “Chaque année, nous préconisons une évolution des prix. Il s'agit de revoir le prix relatif du gasoil afin qu'il soit plus élevé que celui des autres carburants”, affirmera-t-il. Toutefois, cette stratégie nécessite, soulignera-t-il, la collaboration des ministères des Finances, du Commerce et de l'Assemblée populaire nationale (APN). L'autre action qui diminuera l'utilisation du gasoil, mise en avant par le ministre, a trait à privilégier les transports en commun, le métro par exemple, plus économes en énergie et l'électrification des rails afin de réduire le nombre de bus et autres véhicules roulant avec ce carburant. En outre, il convient de signaler que le gasoil est un produit polluant et dangereux pour le citoyen. “C'est vrai, d'une part, nous aidons le citoyen à travers le prix du gasoil, mais d'autre part, nous créons des problèmes à l'Etat et à nos enfants à l'avenir”, tient à préciser le ministre. Un autre phénomène vient rendre encore plus complexe la problématique : la contrebande aux frontières. Le gasoil est très prisé par les contrebandiers du fait de la disparité des prix des carburants entre l'Algérie et les deux pays voisins, le Maroc et la Tunisie. Les wilayas de Tlemcen, Tébessa et Tamanrasset sont les plus ciblées par ce trafic. En 2005, la saisie effectuée par les postes-frontières, au nombre de 26, a atteint 105 852 litres de gasoil. L'année dernière, près de190 000 litres ont été saisis. De janvier à mai 2007, les services des douanes ont procédé à la saisie de près de 40 000 litres. Ce fléau est dû, relève-t-on, aux prix deux voire trois fois moins chers du gasoil en Algérie par rapport à ceux pratiqués au Maroc et en Tunisie. Le chômage et la densité des stations d'essence sont aussi deux autres raisons qui accentuent ce trafic. Badreddine KHRIS