Au moment où la France, la Russie et l'Allemagne insistent sur le “rôle central” que doit jouer l'ONU en Irak, Colin Powell exclut de voir les nations unies se charger de la reconstruction de ce pays. L'avenir politique de l'Irak et sa reconstruction diviseront certainement davantage les Etats-Unis et les opposants à la guerre. Leurs divergences sur le rôle que doit tenir l'organisation des nations unies dans ce cadre sont apparues au grand jour. Colin Powell a bien choisi le moment pour mettre les points sur les i, à ce sujet. En effet, le secrétaire d'Etat américain aux affaires étrangères a attendu le moment où Chirac, Schr?der et Poutine se réunissaient à Saint-Pétersbourg pour discuter de ce point précis pour trancher catégoriquement : “Nous ne sommes pas prêts à dire : “très bien, le conflit est fini et nous allons partir pour laisser la place aux nations unies”. Clair, net et précis ! L'Amérique n'est nullement disposée à partager le gâteau. Le rôle “vital” de l'ONU se limitera “essentiellement au domaine humanitaire”, a réaffirmé le chef de la diplomatie US. Ceci provoquera inévitablement une nouvelle polémique entre Washington et les trois pays qui insistent sur la mise en place d'un dispositif articulé autour des Nations unies. Paris, Moscou et Berlin ont parlé d'une seule voix, exigeant un “rôle central” pour l'ONU dans la reconstruction de l'Irak. “Dès que possible, après une phase nécessaire de sécurisation, il faudra mettre en route la reconstruction politique, économique et institutionnelle de l'Irak et il appartiendra aux nations unies d'y jouer un rôle central”, a déclaré Jacques Chirac lors d'une conférence de presse en compagnie du président russe, Vladimir Poutine, et du chancelier allemand, Gerhard Schr?der. “Elles seules ont la légitimité nécessaire”, a ajouté le président français, pour dénier le droit aux Etats-Unis de faire main basse sur tous les marchés inhérents à la reconstruction de l'Irak. Vladimir Poutine a emboîté le pas à son homologue français en insistant sur le “rôle unique de l'ONU comme mécanisme de règlement dans les affaires internationales”. Le chef de l'Etat russe n'a pas manqué au passage d'égratigner l'administration Bush en critiquant l'opération militaire qui n'a pas atteint, selon lui, “son seul but légitime”, consistant en la destruction des armes de destruction massive. “On ne sait toujours pas si Saddam en avait. Si au moment ultime, il ne s'en est pas servi, soit il n'en avait pas, soit il ne pouvait pas les utiliser. Mais alors, quel problème voulions-nous régler là-bas ?” a lancé ironiquement à la presse Poutine. Quant à Schr?der, il a estimé que toute la communauté internationale, y compris la coalition conduite par les Etats-Unis, devait accepter l'égide de l'ONU. L'inquiétude de ces trois pays et de beaucoup d'autres s'explique par les informations faisant état de l'annulation de facto de tous les contrats signés en ce sens par le régime de Saddam Hussein avant son renversement par la force. Une chose est sûre, les Etats-Unis feront face à une très forte contestation concernant l'attribution des marchés pour la reconstruction de l'Irak. Le “gâteau” est trop alléchant pour ne pas attirer les convoitises. K. A.