Les passagers empruntant habituellement le train ont été pris au dépourvu, hier, suite au mouvement de grève lancé par le personnel roulant (conducteurs et travailleurs du service maintenance), et ce, sans préavis, selon des sources proches de la Société nationale des transports ferroviaires (SNTF). “Je travaille à Blida et tous les matins je prends le train à la gare Agha d'Alger, mais ce matin point de train. J'ai appelé mon patron qui a accepté de m'accorder la journée. Le problème se posera pour moi demain t les jours prochains car la grève risque de durer”, se plaint un usager rencontré hier à la gare Agha d'Alger. Les étudiants sont les autres victimes de ce mouvement déclenché sans préavis. “Je ne peux me rendre à l'université de Bab-Ezzouar par le train, je vais essayer de prendre un bus du Cous, mais je suis sûre que je ne trouverai pas de place. J'ai toujours préféré le train pour me rendre à mes cours”, affirme pour sa part une étudiante. Point de grévistes par contre à la gare Agha ou à la gare centrale située au square Port-Saïd. Les grévistes se sont, en effet, regroupés au niveau des ateliers de maintenance attenant à la gare de Belouizdad. Dès notre arrivée sur les lieux, les protestataires ont tenu avant tout à nous montrer les conditions dans lesquelles ils exercent leur métier “pénible et périlleux” de maintenance de machines “hors d'âge”. Ouvert aux quatre vents, le semblant de garage pour locomotives n'offre aucune commodité aux travailleurs qui se plaignent du fort taux d'arthrose parmi les travailleurs du service maintenance. “Nous travaillons dans des conditions pénibles et le plus souvent de nuit. Nous souffrons de l'arthrose, nous contractons cette maladie, car nous sommes exposés aux aléas du froid de la nuit. La maladie n'est pas considérée par notre administration comme pathologie professionnelle”, affirme un syndicaliste. “Nous venons de perdre un collègue d'un cancer du poumon, et son cas n'a pas été considéré comme maladie professionnelle ; pourtant, il ne fumait pas. Beaucoup de mes collègues du service maintenance sont atteints de perforation de tympans inhérente à leur exposition à des degrés de bruit dépassant les normes autorisées”, ajoute-t-il. Pour sa part, le représentant des conducteurs de trains estime que la direction refuse d'appliquer l'article 6 du règlement intérieur propre au transport ferroviaire qui stipule que “tous les travailleurs sont égaux devant les droits et les devoirs”. Ce conducteur affirme que la direction prive le personnel roulant des primes accordées normalement pour tout le monde selon les clauses de la convention de branche. “Nous revendiquons les mêmes droits que nos collègues sédentaires qui bénéficient des primes de panier et de rendement individuel. Par ailleurs, nous réclamons la révision à la hausse de la prime kilométrique qui ne nous rapporte que 30 dinars pour le trajet Alger-Blida-Alger”, enchaîne le représentant des conducteurs. Le syndicaliste représentant les travailleurs de la maintenance revient à la charge pour se plaindre des cadences de travail qui leur sont imposées. “Nous travaillons 6 nuits par semaine à raison de 48 heures, alors que selon les textes en vigueur, nous ne devons dépasser en aucun cas un volume horaire hebdomadaire supérieur à 48 heures. Les 8 heures en plus doivent être considérées comme des heures supplémentaires, mais la direction refuse de nous entendre”. Les grévistes réaffirment leur volonté d'aller jusqu'au bout cette fois-ci et de ne mettre un terme à la grève qu'une fois toutes leurs revendications satisfaites. Ils rappellent, à cet effet, tous les efforts qu'ils avaient fourni à l'époque du terrorisme, lorsqu'ils défiaient le danger pour libérer les voies ferrées quand elles étaient la cible des attentats terroristes. Dans un communiqué rendu public hier, la direction générale de la SNTF dénonce ce fait accompli et invite les grévistes “à reprendre immédiatement le travail”. Les rédacteurs de ce communiqué réaffirment leur disponibilité à un dialogue avec les représentants des travailleurs. Bien entendu, les même rédacteurs ont tenu à mettre l'accent sur les conditions inhabituelles du déclenchement de ce mouvement entamé “sans revendications ni préavis”. La grève se poursuivra peut-être aujourd'hui et les prochains jours, car selon les grévistes, la direction les invite à un dialogue sans prendre les engagements de trouver une solution aux vrais problèmes posés par la corporation du personnel roulant. Saïd Ibrahim