Les espoirs de retrouver en vie des pensionnaires d'une école primaire de Celtiksuyu, dans l'est de la Turquie, s'amenuisaient jeudi en fin de matinée, plus de 30 heures après un violent tremblement de terre qui a fait 105 morts et 499 blessés selon un dernier bilan. "Allah est grand, j'espère qu'il me rendra mon enfant", affirme d'un ton résigné Abdulgaffur Over, 37 ans, fonctionnaire à la direction des affaires religieuses, dont le fils, Geylani, âgé de 14 ans, restait prisonnier dès vendredi des décombres de l'internat, à une douzaine de kilomètres du centre de Bingol, frappé dans la nuit de mercredi à jeudi par un fort séisme. "Même s'il n'est plus en vie, j'espère pouvoir au moins récupérer son corps pour l'enterrer selon les préceptes musulmans", dit-il. Dès qu'il a entendu parler du tremblement de terre, il a pris la route depuis la province voisine d'Elazig, pour avoir des nouvelles de son fils. Arrivé au pensionnat, il n'a pu que constater que le bâtiment abritant les dortoirs était complètement démoli, alors que deux autres édifices tout à côté sont restés debout, quasiment intacts. "Comment est-ce possible?", s'interroge-t-il en pleurs, mettant en cause des "entrepreneurs véreux". Sur les quelque 180 enfants qui dormaient au pensionnat, plus de 80 ont pu être extirpés sains et saufs des débris, dont cinq dans la nuit de jeudi à vendredi, a indiqué un responsable de la cellule de crise mise en place dans la cour de récréation de l'école. Un total de 42 corps ont également été récupérés. "J'ai encore de l'espoir, je veux en avoir", affirme Gazal Gunanan, une mère qui n'a ni dormi, ni mangé depuis le séisme. "Le monde entier m'est tombé sur la tête quand j'ai appris la nouvelle", dit-elle. Elle s'exprime uniquement dans un dialecte kurde, et ses propos sont traduits en turc par son époux Mehmet Siddik, un fermier de 45 ans. Le couple a 10 enfants. L'aîné, Nihat, attend anxieusement avec ses parents des nouvelles, mais, lui, est pessimiste. "Généralement, c'est dans les premières heures du séisme qu'on retrouve le plus de survirants", souligne-t-il plus de 30 heures après le drame. Chaque fois qu'une ambulance franchit le périmètre de sécurité établi autour du pensionnat réduit en amas de ruines les parents impatients se ruent sur le véhicule pour savoir si c'est un mort ou un vivant qui est extirpé des gravats. Les secouristes, qui ont juré de travailler "jusqu'au bout", ne lâchent pas prise. Tout au long de la nuit, ils ont poursuivi sans relâche leurs efforts, se relayant régulièrement sous les lumières de puissants projecteurs. "Nous resterons ici le temps qu'il faut, mais chaque heure qui passe réduit un peu les chances de survie", souligne un agent de la défense civile d'Erzurum (est). Pour détecter le moindre bruit qui proviendrait des décombres, un officier de l'armée donne, par moment, de strictes consignes de silence aux parents et aux nombreux journalistes qui couvrent l'événement. Des équipes spéciales munies d'appareils d'écoute, scrutent les débris et appellent les chiens-sauveteurs pour flairer d'éventuels survivants. "S'il y a un survivant, mon chien le retrouvera", affirme un policier d'une branche spécialisée de la police, maître du berger allemand Rex.