La situation géographique de cette contrée fait de ses collines un lieu de transit pour le banditisme organisé qui écume la région : vols de véhicules notamment sur la route en direction d'Azazga (ouest). En dehors de la couverture de l'armée, la localité ne dispose pas de garde communale, ni de brigade de gendarmerie. De par son relief boisé et dense, abritant des sites naturels rarissimes, la région d'Aït Yahia, dans la commune d'Aïn El-Hammam (wilaya de Tizi Ouzou), connaît ces derniers temps une certaine agitation qui rappelle un peu les années d'insécurité. Nous nous sommes déplacés sur les lieux, du côté de Tagounits, un ensemble de sept villages distants d'une dizaine de kilomètres du chef-lieu communal. À la rentrée de l'agglomération d'AIt Yahia, un barrage mixte (ANP et gendarmerie) fait figure de forteresse, représentant un poste avancé dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. La situation géographique de cette contrée fait de ses collines un lieu de transit pour le banditisme organisé écume la région : vols de véhicules, notamment sur la route en direction d'Azazga (ouest). Les groupes criminels transitent de part et d'autre des localités de Mekla, au sud-ouest et de Boubhir (Illoula) au nord, de Aïn El Hammam et de Takhoukht au sud-est, à la limite des Ouacifs. À mi-chemin, au niveau du village Koukou, un vieil homme se demande si les militaires ne sont pas postés dans les environs. “Je dois traverser un champ pour rentrer chez moi, donc il faut faire attention, sinon…” Ici, témoigne-t-on, l'ANP vient la nuit pour faire des descentes dans la forêt. Le plus touché reste le maquis “El-Ghava Oussisnou” et “Tichache”. Passer 21h, les villageois sont soumis à une sorte de couvre-feu qui ne dit pas son nom. “Avant, on pouvait se balader la nuit, faire des parcours à pied. Mais depuis quelque temps, par précaution, l'armée nous interdit des sorties nocturnes…”, nous diront des jeunes de la localité. D'ailleurs, de nombreux villageois, notamment de Tagmount et de Tagounits, ont délaissé leurs récoltes d'olives. “Les paysans sont appelés à respecter un périmètre de sécurité et, quelquefois, à ne pas s'aventurer dans ces champs, pour éviter surtout des problèmes, des accidents…”, précisent des jeunes villageois. En dehors de la couverture de l'armée, la localité ne dispose pas de garde communale, ni de brigade de gendarmerie, ajoutent nos interlocuteurs qui relèvent que “des ratissages sont organisés de manière permanente ces derniers temps”. Certains, en revanche, soutiennent qu'“on veut juste y ramener des maux…”. C'est dire à quel point l'information fiable manque à ce niveau. À AIn El Hammam, région isolée, les citoyens attendent beaucoup de l'Etat. Car au fond des choses, cette partie de Tagounits accuse un retard considérable dans la prise en charge des problèmes des citoyens. “Le terrorisme existe dans toute l'Algérie. Ce que nos autorités ne veulent pas voir, c'est cette misère sociale…”, s'insurgent des jeunes. Au niveau de “Aïnser Azky”, aux alentours du CEM, des habitations attendent depuis toujours à être alimentées en électricité et à bénéficier du réseau d'assainissement. Des paysans sont eux aussi en attente de voir leurs hangars et locaux alimentés en électricité pour permettre leur usage utile. En raison de leur éloignement, les citoyens y éprouvent en outre le manque d'une antenne administrative, et surtout d'une structure de santé de proximité. “Il faut faire des kilomètres pour une simple injection”, nous fera remarquer un membre du comité de village. Les jeunes, eux, vivent dans l'expectative, subissant le manque d'infrastructures d'accueil et les aléas du chômage. Aucune maison de jeunes digne de ce nom n'est disponible dans les environs de Tagounits. “On veut du travail, nous sommes désœuvrés. Ici tout manque et nous sommes éloignés de tout !” témoignent-ils désarçonnés. Un vieil homme, rencontré sur le parcours d'un bout de chemin, s'étonnera en se demandant : “Comment se fait-il que certaines gens vivent comme des rois, quand d'autres n'ont pas quoi manger ? C'est injuste ! Il ne se passe pas un jour sans que la presse ne parle de quelque détournement de milliards commis par des responsables corrompus... Ça, il faut bien le dire. Ces corrompus, on doit les punir pour sortir le pays de la tourbe… Et si on réussit, les choses iront peut-être mieux.” Comment des jeunes pourraient, dans ces régions isolées de la Kabylie, nourrir encore quelque espoir quand leurs aînés, leurs propres parents, l'y aient totalement perdu ? se demandent encore de nombreux jeunes désespérés. K. T.