La presse publique et parapublique vient d'innover en consacrant la commémoration de l'anniversaire de l'élection du président de la République, le neuvième du règne de Bouteflika, pour les uns, le quatrième de son second mandat, pour les autres. La pratique démocratique voudrait que, dans l'intervalle d'un mandat, les dates anniversaires soient celles des bilans de gestion. Mais dans notre cas, on préfère souvent verser dans l'éloge lyrique que de tenter l'examen constructif d'un bilan. Au grand dam de ceux qui ne lui trouvent aucun ratage, le Président lui-même a reconnu quelques insuccès. Il l'a fait au sujet de certains délais de réalisation, de la politique de prévention des bidonvilles ou de la jeunesse. Il n'est donc pas certain que le motif de ces panégyriques soit dans le décompte des réalisations présidentielles. Il est même plus probable. L'absence de vision stratégique et une pratique politique basée sur la personnalisation excessive du régime ont contribué à transformer la vie publique en un système d'industrie du soutien. Le providentiel envol du prix des hydrocarbures, qui a coïncidé avec l'avènement du régime, a engendré un accroissement du volume de la rente et le redéploiement de sa répartition. Les candidats accourent de partout, pour “se sacrifier pour l'intérêt” du pays, un “sacrifice” si bien payé, dans un système que la manne pétrolière dispense de toute l'efficacité économique. Le mode de gouvernance, qui découle de cette situation, s'avère particulièrement perméable à l'incompétence et à l'amateurisme. D'où la précarité de beaucoup de positions. Ce qui fait que jusqu'ici, ce qui était constitutionnellement et sereinement prévisible, s'avère particulièrement redouté. Il s'observe, depuis que cette fin de règne commence à se rapprocher qu'il y a, étrangement, plus d'agitation chez les partisans de sa reconduction qu'il n'y a d'impatience chez ceux qui souhaitent son changement. Mais voilà ! Le Président tarde à se prononcer. Et la cour s'affole. Et plus il tarde, plus on lui invente des opportunités de s'exprimer : le 1er Novembre, après l'Aïd, et… l'anniversaire de son mandat ! Dans un pays qui, d'habitude, souffre d'improvisation et où les initiatives connaissent si peu de préparation, le Président a eu droit à trois moutures de révision constitutionnelle ! Il a droit à la solution parlementaire pour la voter au cas où il appréhenderait le référendum. Ziari, président de l'Assemblée nationale lui a même conçu l'argument contre l'alternance au pouvoir, “principe imposé aux Africains de l'extérieur”. Il faut dire que dans ce cas, “l'extérieur” n'a pas dû être très convaincant ; en tout cas, il n'a pas eu beaucoup de réussite. La démarche sonne comme une supplique : révisez cette Constitution, Monsieur le Président, vous avez le choix de versions et des procédures mais, de grâce, révisez-la pour un troisième mandat ! Il y a quelque chose de pathétique dans cet acharnement à vouloir l'engager pour un troisième mandat, alors qu'il lui reste la possibilité d'y renoncer. Que feront-ils si, d'aventure, il prenait ce qui serait, de leur point de vue, la mauvaise décision ? L'éloge de “l'heureux pressenti” ? M. H. [email protected]