Désormais, l'Algérie sera dotée, à partir de 2010 d'une stratégie de gestion des prisons, un système complet qui obéit aux seules normes universelles basées sur le respect des droits de l'Homme et des droits des détenus. Cette stratégie, qui fera l'objet, à partir de juin 2008 jusqu'en juin 2010, d'une coopération algéro-britannique, sera ensuite généralisée à travers l'ensemble des maisons d'incarcération réparties sur le territoire national. Elle touchera les anciennes prisons appelées dans un futur proche à une réadaptation infrastructurelle et un profond changement de gestion, mais également les nouvelles maisons d'arrêt, appelées elles aussi, dans le cadre du désengorgement des actuelles prisons, à jouer un rôle majeur dans les changements qui devront intervenir à partir de 2010, date butoir de l'entrée en vigueur de cette stratégie. Celle-ci, inspirée du document de base établi entre les deux experts britanniques de l'Institut international des études pénitentiaires de Londres (IPCS), devra permettre, du coup, de donner un nouveau souffle au système pénitentiaire algérien qui vient de bénéficier d'une loi qualifiée par les Britanniques d'un texte de réforme digne de ce nom. Hier, lors de la cérémonie symbolique organisée à Ben Aknoun, le DG de l'administration pénitentiaire, Mokhtar Felioune, a souligné l'importance de ce document basé sur 17 critères et composé essentiellement de 36 lois internationales, régionales et des conventions ratifiées par l'Algérie. Mettant en avant les réformes engagées dans son secteur, M. Felioune dira aux présents que depuis 2005, date de la promulgation de la loi relative à la réforme pénitentiaire, les prisons algériennes ont connu une réelle métamorphose : droit des prisonniers à la communication extérieure, des visites prolongées, des libertés et des autorisations de sortie, amélioration du cadre de vie (santé, infrastructures sportives et culturelles, enseignement et formation professionnelle, prise en charge psychologique, pour ne citer que ceux-là), tous ces volets viennent s'ajouter aux programmes de visites au profit des organisations non gouvernementales et à la société civile. Ainsi, depuis 2005, près de 20 000 personnes incarcérées ont bénéficié de ces droits, sans compter les 3 000 candidats qui ont brillamment réussi à décrocher leur BEM et baccalauréat en 2007, et ce, en plus des 14 000 détenus formés dans plusieurs spécialités. M. Felioune mettra également en valeur la nouvelle application Intranet qui permet de contrôler et d'avoir des renseignements en temps réel sur la population carcérale. La formation des ressources humaines a également été évoquée, avec en appoint 5 720 fonctionnaires formés et 29 116 autres fonctionnaires qui ont bénéficié de formations spécialisées. Ceci pour arriver à dire que la coopération algéro-britannique n'est pas le fruit du hasard et relève de la volonté du ministère de la Justice d'aller de l'avant pour moderniser ce secteur. Ainsi en plus des pays, comme la France, l'Espagne, la Suisse, la Belgique et autres organisations comme l'Unicef et le Pnud, l'Algérie a engagé un ambitieux programme de coopération avec le Royaume-Uni. Cela fera dire à l'ambassadeur de Grande-Bretagne à Alger, M. Anderson, présent à la cérémonie aux côtés du représentant de l'ambassade de France à Alger et des deux experts de l'IPCS, que “cet important projet a vu le jour suite à l'appel de l'Algérie à l'expertise britannique en la matière. Cette deuxième étape constitue un nouveau départ, mais également une étape complémentaire à celle de 2007-2008. Et à travers ces échanges, nous allons voir en commun accord ce qui pourrait se traduire concrètement pour l'adapter aux prisons algériennes. Et je tiens à remercier vivement M. Felioune pour avoir tenu ses engagements et montré sa pleine volonté à fructifier cette étroite coopération dans le souci de protéger les droits de l'Homme et les droits des prisonniers”. Emboîtant le pas à M. Anderson, M. Barclay de l'IPCS de Londres dira que l'avantage de la loi algérienne réside aussi dans le fait que l'administration pénitentiaire est en contact permanent avec les prisons, d'une part, et la société civile, d'autre part. “Cela constitue en lui-même un élément positif. Tout ce que nous entreprenons, nous le faisons en parfait accord avec les responsables algériens, à leur tête M. Felioune qui a démontré que son administration ne lésinera pas sur les moyens matériels et humains pour donner un nouveau visage au système pénitentiaire algérien. Notre objectif est ainsi d'arriver à une gestion meilleure des prisons conformément à ce qui se fait dans les pays développés et mettre fin à la surcharge des maisons de rétention”, dira encore M. Barclay. Celui-ci a mis en évidence les difficultés de gestion dans les prisons, la nécessité de mettre le paquet sur les droits de l'Homme, la sécurité des infrastructures et le bon usage du document de base établi entre l'Algérie et le Royaume-Uni. “On ne peut pas changer les choses du jour au lendemain ! Cela demande beaucoup de travail de fond et d'imagination. Car, notre objectif est aussi d'arriver à diminuer le nombre de victimes du phénomène de la violence et réduire ainsi le nombre de prisonniers”, conclut M. Barclay. Il faut noter que la deuxième étape de coopération se fera à travers quatre prisons modèles choisies sur des critères définis, à savoir Tidjelabine (Boumerdès), Boufarik (Blida), Boussouf (Constantine) et El-Harrach (Alger), selon M. Ali Djelouli, directeur du projet algéro-britannique. FARID BELGACEM