La France et l'Algérie vont signer un accord de coopération militaire inédit, selon le journal français Le Figaro qui souligne que cet accord “marque un rapprochement politique spectaculaire” entre les deux pays. Contrairement à ses voisins du Maghreb, rentrés dans les rangs peu de temps après l'annonce du projet d'Union pour la Méditerranée (UPM), l'Algérie maintient le suspense sur sa participation au Sommet de Paris le 13 juillet prochain malgré les tentatives de la France de la convaincre d'adhérer à la future organisation méditerranéenne. Après Jean-Louis Borloo, Michèle Alliot-Marie, Bernard Kouchner, Anne-Marie Idrac et Fadéla Amara, le Premier ministre français, François Fillon, se déplace à Alger. C'est la première visite d'un Premier ministre français depuis 22 ans. Sa visite, qui va durer deux jours, devrait permettre la conclusion de deux accords dans la coopération civile nucléaire et la défense, déjà annoncés par le président Nicolas Sarkozy lors de sa visite d'Etat en Algérie en décembre dernier. M. Fillon tentera également de convaincre une Algérie hésitante de participer à l'UPM que Nicolas Sarkozy doit proclamer officiellement le 13 juillet à Paris. Le Premier ministre doit évoquer ce dossier avec le président algérien Abdelaziz Bouteflika, qui laisse planer le doute sur sa venue au sommet de lancement de l'UPM. L'Algérie avait marqué très tôt son intérêt pour ce projet cher au président Nicolas Sarkozy mais juge que son contenu est “flou”. L'Algérie et des pays arabes avaient renouvelé leurs réserves à l'égard de ce projet lors d'une réunion du Forum des pays de la Méditerranée (Formed) le 6 juin à Alger en réclamant des “clarifications sur les conséquences” politiques de l'entrée d'Israël dans l'UPM. Le jour même Nicolas Sarkozy avait répliqué en affirmant que la présence d'Israël dans l'UPM ne posait “pas de problème” à des pays arabes comme l'Egypte, la Tunisie et le Maroc. En Tunisie, où il a effectué une visite fin avril, “le président (Zine El-Abiddine) Ben Ali ne m'a pas indiqué que c'était un problème”, avait-t-il précisé lors d'un voyage en Grèce. Idem au Maroc, où il s'est rendu en octobre 2007. “Le roi du Maroc, sa Majesté Mohammed VI, non seulement chef d'Etat mais aussi chef des croyants, ne m'a pas indiqué que la présence d'Israël était un problème. Ce qui pose problème et qui fait la difficulté, c'est le processus (de paix israélo-palestinien) d'Annapolis qui semble être au ralenti”, avait précisé Nicolas Sarkozy. Dans une interview accordée au quotidien français Le Monde jeudi, le Chef du gouvernement, Abdelaziz Belkhadem, prolonge le suspense en indiquant que la venue à Paris de M. Bouteflika n'est “pas exclue”. Selon lui, l'Algérie est favorable au rapprochement des deux rives de la Méditerranée. M. Belkhadem a cependant regretté que l'initiative “exposée en 2007 par le président Sarkozy n'est plus celle qui nous est présentée aujourd'hui”. En d'autres termes, Alger déplore l'amarrage de l'UPM à l'Union européenne, au détriment de la démarche initiale qui devait associer plus étroitement les seuls pays riverains de la Méditerranée. L'Algérie continue aussi de critiquer les restrictions à la circulation de ses citoyens, tandis que la France met en avant la hausse du nombre de visas octroyés : 126 000 en 2007 contre 50 000 dix ans plus tôt. Le Chef du gouvernement français doit signer aujourd'hui un accord-cadre organisant la coopération nucléaire civile entre les deux pays. Une manière, pour l'Algérie, de préparer l'après-pétrole, et pour la France de préparer des projets industriels futurs dans ce domaine. Un protocole de coopération dans les domaines des impôts, de l'assurance et de la banque doit également être paraphé. L'objectif, indique-t-on de source française, est d'“améliorer le climat des affaires”. Une vingtaine de patrons accompagneront d'ailleurs M. Fillon dans ce voyage qui intervient quelques jours après l'attentat ayant coûté la vie à un ingénieur français près de Lakhdaria (est d'Alger). Alger et Paris vont enfin signer un accord de coopération dans le domaine de la défense, comprenant notamment un important volet de formation, qui pourrait ouvrir la voie à des contrats futurs de vente d'armes. Les patrons du groupe de construction navale militaire DCNS et du groupe européen de défense et d'aéronautique EADS font d'ailleurs partie de la délégation, alors que l'armée algérienne marquerait notamment son intérêt pour des hélicoptères militaires. Selon, le journal Le Figaro, “le protocole devrait être paraphé ce week-end par le ministre de la Défense, Hervé Morin, qui accompagne lors de sa visite, le Premier ministre, François Fillon. Le document concerne la formation et l'échange de personnels et devrait ouvrir la voie à des contrats d'armement. C'est du moins le souhait de Paris. Alger pourrait être intéressé par l'achat d'une frégate ou d'hélicoptères. D'où la présence des patrons du groupe de construction navale militaire DCNS et du consortium européen EADS”. François Fillon devrait également assister à la signature de contrats commerciaux liés à des privatisations en cours de finalisation avec le groupe Lafarge et avec le géant français des gaz industriels et médicaux Air Liquide. R. B.