Cette visite du ministre de l'Intérieur français entre dans le cadre d'une tournée maghrébine qui le mènera également à Rabat et Tunis. Le ministre français de l'Intérieur, Nicolas Sarkozy, effectuera, aujourd'hui et demain, une visite de travail au Maroc, en Algérie et en Tunisie pour discuter avec ses homologues maghrébins de la lutte contre le terrorisme. M. Sarkozy a dû annuler sa visite en Corse prévue pour les mêmes dates. Dans un bref communiqué rendu public, hier, le ministère de l'Intérieur indique que “le niveau de la menace terroriste dans le monde, encore confirmé par les récents attentats de Casablanca et de Riyad, exige une actualisation des modalités de la coopération entre les pays”. Toutefois, le communiqué précise qu'“aucun élément ne permet de penser que (la France) soit actuellement l'objet d'un projet précis”. La visite de Nicolas Sarkozy intervient moins d'une semaine après la série d'attentats terroristes qui ont touché le Maroc. Vendredi dernier, la ville de Casablanca a été secouée par cinq attentats kamikazes qui ont fait 41 morts. Selon les premiers éléments de l'enquête, les auteurs seraient des Marocains, appartenant à Essirat el Moustaqim, un mouvement islamiste interdit par Rabat. Les services de sécurité et les officiels marocains affirment également que les kamikazes seraient liés à un réseau terroriste international. D'où, sans doute, l'urgence d'une coopération accrue entre les différents pays de la rive méditerranéenne. En effet, quelques heures après les attentats de Casablanca, on annonce l'envoi de plusieurs experts français et espagnols au Maroc pour renforcer les équipes d'enquêteurs sur place. Dimanche 18 mai, les ministres de l'Intérieur espagnol, britannique, italien, allemand et français, se sont réunis à Jérez de la Frontera, au sud de l'Espagne, pour décider de la création d'un groupe permanent d'experts européens sur le terrorisme. La réunion a, en outre, débouché sur un constat : la nécessité de se concerter tous les trois mois pour “analyser l'évolution du problème du terrorisme au sein de chacun de leur pays et de l'UE”. Les ministres seront dès lors appelés à examiner “les problèmes de l'immigration dans leur pays et l'application des politiques communes”. Le ministre italien de l'Intérieur a indiqué, à l'issue de ce mini-colloque, que “la question du contrôle des frontières maritimes doit être approfondie… La Méditerranée orientale serait contrôlée à partir de Chypre et de Malte, alors que le contrôle de la Méditerranée occidentale serait assuré par l'Espagne et la France…” Les résolutions prises dimanche dernier en Espagne n'ont donc pas tardé à se concrétiser avec le séjour maghrébin de Nicolas Sarkozy. La coopération entre l'Algérie et la France en matière de lutte contre le terrorisme s'est vu accroître ces dernières années. Les services de renseignement des deux pays échangent régulièrement des informations en dépit du fait qu'Alger s'est plainte à maintes reprises des réticences de Paris quant à la vente de matériel militaire pour la lutte antiterroriste. Dans une interview accordée le 17 janvier 2003 à l'hebdomadaire Le Point, le chef de l'état-major, Mohamed Lamari, s'en est fait l'écho. “Avec la DST et la DGSE, affirme-t-il, nous partageons une même analyse sur les menaces terroristes. Ce n'est pas de ce côté que nous avons un problème. Mais bien avec nos amis politiques, les dirigeants français. Ils nous soumettent à un embargo de fait sur tous les moyens de lutte antiterroriste. Nous n'avons même pas pu acquérir en France quelques milliers de cartouches de chasse pour nos gardes communaux ! Mais, la lutte antiterroriste, ce n'est pas que les moyens de nos services. Seuls, nous ne réglerons pas le problème. Or la mobilisation internationale ne vient pas. Pis, lorsque nous avons voulu faire une loi antiterroriste vingt fois moins contraignante que celle mise en œuvre aux Etats-Unis, nous avons eu le monde entier contre nous.” Dans une réplique à peine voilée aux critiques du général, Jacques Chirac répond, la veille de sa visite officielle en Algérie, en déclarant qu'“en ce qui concerne les demandes d'équipements militaires, celles-ci sont examinées au cas par cas, selon nos procédures propres”. Autant dire, que ce n'est pas demain que Paris accédera aux demandes algériennes. Est-ce à dire que la visite de Nicolas Sarkozy sera celle-là même qui devrait donner le vrai coup d'accélérateur à la coopération antiterroriste ? Tout porte à le croire. Car la menace terroriste est, hélas, bien réelle. Les islamistes ont prouvé qu'ils sont en mesure de frapper où ils veulent et quand ils veulent. F. A.