Les nouvelles taxes imposées sur l'achat des véhicules neufs visent, selon le ministre des Finances, à atténuer la frénésie des achats, notamment à crédit, pour une raison bien simple : le réseau routier national, déjà saturé, ne pourra supporter davantage de véhicules. Le ministre de l'?nergie avait reconnu, pour sa part, que l'augmentation du parc roulant, notamment en diesel, allait obliger le gouvernement à importer du carburant, en raison de l'incapacité des raffineries actuelles de répondre aux besoins sans cesse croissants. Mais il y a une autre raison, plus grave et plus urgente, qui concerne le nombre impressionnant d'acquéreurs de nouvelles voitures et qui sont, en grande majorité, de nouveaux conducteurs. Ces derniers sont mis à l'index dans la hausse des accidents de la circulation. Les nouvelles voitures dotées, pour bon nombre d'elles, d'options, telles que la direction assistée et le système de freinage ABS, jouent des tours, parfois mortels, aux nouveaux conducteurs qui ne savent pas trop bien s'en servir. Pour les jeunes n'ayant pas déboursé grand-chose pour l'acquisition de leur premier véhicule (crédits ou cadeau des parents), la voiture constitue un jouet, mais un jouet qui risque de tuer. Il suffit de prendre la route des plages, par ces temps de grande chaleur, pour constater que les dépassements dangereux, la conduite sur la bande d'arrêt d'urgence et l'utilisation du téléphone portable sont des pratiques courantes, notamment chez les jeunes. Les cortèges de mariage offrent, quant à eux, des spectacles effarants d'une jeunesse encouragée par les parents, et qui se permettent des acrobaties dignes des films d'Hollywood. Le durcissement de la législation routière, notamment avec l'introduction des retraits de permis, n'a pas découragé les jeunes. L'introduction récente de nouvelles mesures visant à durcir davantage l'obtention du permis de conduire, notamment en relevant le seuil d'inscription à 30 000 DA, vise à limiter le rush sur les auto-écoles. Mais lorsqu'on constate que des parents ont acheté et sont prêts à acheter des permis de conduire à leur progéniture, quel qu'en soit le prix, et que ces mêmes parents interviennent pour récupérer les permis de leurs enfants, retirés par les policiers ou les gendarmes pour infraction, on se demande si ces mesures auraient un quelconque effet. Les parents font preuve souvent d'une irresponsabilité criminelle, dans la mesure où ils encouragent leurs enfants à braver les interdits et à prendre des risques mortels. Des parents offrent des voitures à leurs enfants, comme ils leur ont offert des téléphones portables. ? la différence que la voiture tue. Une nouvelle mouture de la législation routière est en gestation. Elle prévoit l'introduction d'un permis à points. Ces derniers pourraient être rachetés par les contrevenants. La nouvelle mouture prévoit surtout que le retrait du permis serait, désormais, du ressort de la justice. En attendant, force est de reconnaître que les jeunes, qui n'ont pas peiné pour acquérir leur première voiture neuve, sont quelque peu inconscients des dangers que représente la route, surtout en Algérie où l'état de la chaussée est lamentable et réserve souvent de mauvaises surprises aux conducteurs (trous béants, ronds-points mal ajustés, dos d'âne trop élevés, chaussées glissantes, défaut de signalisation, absence d'éclairage…). Les banques, tout comme les concessionnaires, offrent des formules avantageuses et alléchantes aux nouveaux acquéreurs, avec des formules de crédits inimaginables il y a cinq ans. Ces facilités obnubilent tout le monde, au point que beaucoup de citoyens, ne disposant ni de logement ni du minimum vital, se jettent dans l'achat à crédit d'un véhicule, quelle que soit sa qualité, pour paraître comme tout le monde. Plein de chômeurs se retrouvent avec des voitures qui leur servent à aller prendre un café, s'acheter leurs cigarettes, ou faire le taxi clandestin, de temps à autre, pour assurer leur argent de poche. La justice sociale, c'est bien. Encore faut-il que l'effort soit érigé en notion sacrée. Ce qui n'est pas le cas chez nous. Mais il ne faut pas accabler les jeunes conducteurs de tous les maux. Les auto-écoles ont une grande part de responsabilité, dans la mesure où, souvent, des jeunes détenteurs de permis de conduire ne connaissent même pas le code de la route et ne maîtrisent pas les conditions élémentaires de la conduite. Les auto-écoles ne sont pas non plus totalement responsables de cet état de fait, dans la mesure où elles travaillent dans des conditions impossibles, avec l'absence de circuits pour l'apprentissage de la conduite et l'absence de toute assistance du gouvernement à leur mission. A. B.