Une enquête sera ouverte pour faire la lumière sur les circonstances de la mort de 76 civils, lors d'un bombardement dans le district de Shindand, à l'ouest du pays. Sur place, une manifestation d'habitants a dégénéré. La coalition sous commandement américain a annoncé, hier, qu'elle avait ordonné l'ouverture d'une enquête, après l'annonce par le ministère de l'Intérieur afghan de la mort de 76 civils, vendredi, dans un bombardement dans l'ouest de l'Afghanistan. Pour sa part, le président Hamid Karzaï a condamné le “martyr de plus de 70 innocents, pour la plupart des femmes et des enfants”, dans un communiqué, tandis que des députés ont vivement dénoncé une action “cruelle et barbare”. La coalition avait indiqué vendredi que 30 insurgés avaient été tués dans un affrontement avec les forces de sécurité afghanes et internationales et des frappes aériennes, dans le district de Shindand. Mais la police de la région a affirmé que 15 maisons ont aussi été détruites dans les bombardements. “Soixante-seize personnes, tous des civils et pour la plupart des femmes et des enfants, ont été tués”, a assuré le ministère de l'Intérieur dans un communiqué, précisant que parmi les victimes figurent 50 enfants de moins de 15 ans, 19 femmes, 7 hommes. Il était impossible de vérifier ce bilan de source indépendante, le district de Shindand se trouvant dans une zone isolée où les insurgés sont très bien implantés, mais s'il était confirmé, il s'agirait de la bavure la plus meurtrière des forces internationales depuis le renversement des talibans fin 2001. “Toutes les accusations concernant des victimes civiles sont prises très au sérieux. Les forces de la coalition font tout ce qu'elles peuvent pour éviter la perte de vies innocentes. Une enquête a été ouverte”, a expliqué la coalition dans un communiqué. Sur place, une manifestation d'habitants a dégénéré. “Des manifestants ont lancé des pierres sur des soldats afghans, qui ont tiré en l'air pour les disperser. Deux civils ont été blessés et les soldats se sont retirés pour laisser la place à la police”, a indiqué le général Akramuddin Yawer, commandant les forces de police dans l'ouest de l'Afghanistan. Les manifestants scandaient des slogans hostiles à la coalition et au gouvernement de Hamid Karzaï, selon des témoignages recueillis par un correspondant. La Maison-Blanche avait réagi avec scepticisme vendredi soir aux affirmations venant de sources afghanes. “Les états-Unis et l'Otan ont pris des mesures pour éviter la mort de civils. Je serais prudent avec les premières informations venant d'Afghanistan”, avait déclaré le porte-parole de la Maison-Blanche, Gordon Johndroe. “La question des victimes civiles est si importante que nous recommandons la plus grande vigilance. Mais nous sommes fortement préoccupés par les premières informations faisant état de très nombreuses victimes”, a souligné Aleem Siddique, porte-parole de la mission des Nations unies en Afghanistan. Le président Hamid Karzaï a envoyé sur place une délégation chargée de lui remettre un rapport d'ici une semaine. Plusieurs députés ont protesté vivement contre l'action des forces internationales au Parlement, hier, qui a voté l'envoi d'une mission d'enquête parlementaire. “Chaque jour qui passe voit la situation empirer. Les forces étrangères sont venues en Afghanistan avec leurs buts propres, pas pour améliorer la sécurité”, a estimé un député d'Herat (ouest), Aziz Nadim. “La coalition a bombardé de manière cruelle et barbare des civils”, a renchéri son collègue Saïd Shafiq. Les forces étrangères en Afghanistan sont régulièrement accusées de provoquer la mort de civils dans les affrontements avec les insurgés. Au cours des quatre premiers mois de l'année 2008, 500 civils afghans ont été tués dans des violences, dont 200 par les forces internationales, la plupart dans des frappes aériennes, avait indiqué à la mi-mai un rapporteur spécial de l'ONU, Philip Alston. En juillet, deux frappes aériennes des forces internationales avaient tué 64 civils, pour la plupart des femmes et des enfants, dans les provinces du Nouristan et de Nangarhar (est), selon des commissions d'enquête afghanes. DJAZIA SAFTA/AGENCES