Province sunnite, la région aura constitué pour “la promenade de santé” de Bush le piège de son occupation de l'Irak. La province d'Al-Anbar fut la première des dix-huit provinces irakiennes à se soulever, elle a longtemps été synonyme d'enfer pour le rêve impérial des Etats-Unis version néo-conservateur. L'US Army y a perdu, depuis 2003, plus de 1 300 hommes, soit le tiers des Gi's et marines tombés en Irak. En 2004, elle dut s'y prendre à deux fois pour mater la ville de Fallouja, l'un des principaux fiefs de l'insurrection irakienne. Al-Qaïda avait même fini par transformer la région en base d'expansion et il a fallu le retournement de plusieurs tribus sunnites pour contenir la nébuleuse de Ben Laden. La lutte contre les mercenaires d'Al-Qaïda aura été sanglante et c'est là qu'est tombé son leader pour l'Irak, le Jordanien Abou Moussab al-Zarqaoui. La sécurité s'est nettement améliorée dans cette province essentiellement désertique de 138 000 km2, limitrophe de la Syrie, la Jordanie et l'Arabie Saoudite. La décision de l'état-major américain d'en remettre le contrôle aux forces irakiennes est d'autant symbolique que ce fut la région la plus attachée à Saddam Hussein. Ce fut le fief de l'ex-président jugé et pendu dans une parodie de procès qui n'a pas livré tous ses secrets. Jouant également sur les symboles, la remise d'Al-Anbar au pouvoir de Bagdad s'est faite le premier jour du Ramadhan et à l'ouverture de la convention républicaine qui a officiellement adopté le ticket McCain pour la succession de Bush. En réalité, le retour dans le giron sécuritaire irakien est tout aussi symbolique puisque l'armée américaine y conserve des bases et 2 800 hommes, contre 37 000 jusqu'ici. L'armée américaine demeure ainsi prête à intervenir si le gouverneur lui en fait la demande. C'est la onzième des dix-huit provinces d'Irak à changer de main depuis juillet 2006 et la première à majorité sunnite. La violence a commencé à y fléchir lorsque les chefs de tribus, las de la violence sans discernement d'Al-Qaïda et payés par les Américains, ont commencé à se révolter en septembre 2006. Ils ont alors formé les groupes dits du “Sahwa” (réveil). Al-Anbar a longtemps été un cauchemar pour Washington, le Pentagone et la CIA, c'est là qu'ont été expérimentées les premières bombes artisanales qui ont causé plus de 40 % des pertes américaines. Les Etats-Unis, qui affirment remettre les clefs de toute l'Irak à ses propriétaires en 2011, les négociations se poursuivant avec les autorités de Bagdad, ont annoncé prolonger l'initiative d'Al-Anbar dans les autres provinces. C'est du moins ce qu'a affirmé le commandant en chef américain David Petraeus, citant notamment Diyala et Bagdad, en ralliant, là aussi, tribus, clans et lignages sunnites. Qualifiée de “dynamique d'en bas”, cette politique court-circuite le pouvoir de Bagdad, dont se méfie le général Petraeus. D. B.