L'armée et les forces de sécurité syriennes ont commis des crimes contre l'humanité, notamment des meurtres, des actes de torture et des viols, a conclu une commission d'enquête de l'ONU dans un rapport rendu public lundi. La Syrie est «responsable d'actes arbitraires, dont des crimes contre l'humanité, commis par des membres de son armée et ses forces de sécurité», disent les trois membres de la commission dans ce rapport de 39 pages, remis au Conseil des droits de l'homme des Nations unies, à Genève. La commission, qui a interviewé 223 victimes, témoins et soldats déserteurs, appelle la Syrie à mettre un terme à «des violations de masse des droits de l'homme», à libérer les prisonniers interpellés lors des vagues d'arrestations et à ouvrir son territoire à la presse, aux travailleurs humanitaires et aux observateurs des droits de l'homme. «La commission pense, de fait, que les ordres d'utiliser des armes à feu et de recourir à des mauvais traitements contre les civils entrent dans le cadre de politiques et de directives émanant des plus hauts niveaux des forces armées et du gouvernement», affirme le rapport. «Des sources fiables indiquent que 256 enfants ont été tués par les forces gouvernementales au 9 novembre», précise Paulo Pinheiro qui présidait la commission. Les enquêteurs appellent également à l'instauration d'un embargo international sur la vente d'armes à la Syrie. La répression du mouvement de contestation du régime de Bachar El-Assad a fait plus de 3 500 morts depuis la mi-mars, selon l'ONU. Des milliers de personnes — peut-être jusqu'à 30 000 — ont été arrêtées depuis cette date, selon des opposants. Les autorités syriennes, elles, imputent les violences à des «groupes terroristes armés» soutenus par l'étranger et font état de plus de 1 000 soldats et policiers tués. Signe probable d'un début de fléchissement, la Syrie a annoncé lundi dernier son intention d'abroger un article constitutionnel qui désigne le parti Baas du président Bachar El-Assad comme la formation dirigeante du pays. Le ministre des Affaires étrangères, Walid El-Moualem, a dit avoir été informé par le chef d'une commission chargée de réviser la Constitution que, dans sa version remaniée, celle-ci autorisait le pluralisme politique et excluait toute «discrimination entre partis, ce qui signifie qu'il n'y a plus d'article 8». Dans un communiqué commun publié à Washington, les Etats-Unis et les Européens ont appelé le régime de Bachar El-Assad à «mettre immédiatement fin à la violence» et à autoriser une transition gouvernementale démocratique et pacifique. Le communiqué a été diffusé après la rencontre annuelle entre les dirigeants américains et européens qui ont également appelé à autoriser l'accès du pays aux journalistes et aux membres d'organisations de défense des droits de l'homme. Face à la poursuite de la répression en Syrie, les Etats de l'Union européenne ont décidé lundi d'imposer de nouvelles sanctions financières contre le gouvernement syrien, a déclaré un diplomate de l'UE. La Syrie fera notamment l'objet de sanctions commerciales, d'où seront exclues les produits alimentaires et les médicaments. Sont aussi concernés les prêts au gouvernement, tant sur le plan bilatéral que par le biais d'institutions financières internationales. En vertu des nouvelles mesures, qui doivent être officiellement approuvées demain par les ministres des Affaires étrangères de l'UE, les entreprises européennes se voient interdire d'effectuer des transactions liées à la dette publique de la Syrie. En outre, les banques syriennes ne pourront pas ouvrir d'agences dans les pays de l'UE. Ces mesures européennes surviennent après l'adoption dimanche de sanctions par la Ligue arabe à l'encontre de Damas. Walid El-Moualem a estimé lundi que les sanctions de la Ligue arabe bloquaient les possibilités de trouver un accord pour mettre fin à huit mois de violences.