Alors que toutes les installations de production du complexe sidérurgique El-Hadjar étaient encore paralysées hier au moment où nous mettions sous presse, était démentie l'information faisant état de l'arrestation de Aïssa Menadi par les services de sécurité. C'est en tous les cas ce qu'a tenu à indiquer Bahaeddine Tliba, député nouvellement élu, contacté hier par la Nouvelle République. Ce dernier qui avait longuement discuté avec Menadi, lundi dernier en fin d'après midi, a précisé que «lundi passé, en ma qualité de député, je m'étais longuement entretenu avec Menadi Aïssa pour le sensibiliser sur la nécessité de mettre fin à la grève de la faim qu'il avait entamée le même jour. Il s'était engagé à le faire mercredi. C'est pourquoi nous nous sommes présentés aujourd'hui (hier mercredi, ndlr) sur les lieux pour le prendre en charge et l'accompagner jusqu'à chez lui. Il n'y a pas eu d'arrestation, qui est le fruit d'une mauvaise interprétation des faits». Le même député a affirmé que Menadi reste déterminé à poursuivre sa revendication. Pour ce faire, convaincu de son bon droit, il envisage sérieusement de revenir au complexe sidérurgique El-Hadjar pour y organiser des attroupements avec les travailleurs. Mais de quel droit parle Menadi dont l'objectif est de s'imposer à la tête du secrétariat général du syndicat bien avant que n'intervienne la fin de l'actuel mandat prévu pour fin août début septembre 2012 ? Comment peut-il prétendre à cette qualité qu'alors qu'officiellement mis à la retraite, il ne fait plus partie des effectifs d'ArcelorMittal même au titre d'agent contractuel rejeté par l'employeur ? Pourquoi l'absence de toute réaction des autorités quant à mettre un terme à cette situation de véritable anarchie créée par un groupuscule de personnes mené par Menadi. Des questions du genre et bien d'autres font l'actualité de toutes les discussions sur la place publique locale. D'autant que l'occupation hier du haut fourneau par une cinquantaine de personnes, auxquelles se sont joints quelques dizaines de travailleurs, a totalement paralysé le complexe El-Hadjar. Pas une seule coulée de fonte n'a été réceptionnée hier par l'une ou l'autre installation de production de l'acier. Les indus occupants ont formellement interdit, sous peine d'agression, à quiconque de remettre en exploitation le HF. Le bras de force devrait donc se poursuivre car la suspension de la grève de la faim de Menadi n'est rien d'autre qu'une trève. Bien que judiciairement interdit de séjour dans l'enceinte du complexe sidérurgique El-Hadjar, Menadi avait pris ses aises devant la baraque du conseil syndical. Il y était depuis l'après-midi de lundi quelques minutes après avoir, avec ses partisans, forcé le portail de l'entrée principale et effectué une marche, scandant des slogans contre les cadres expatriés, contre les syndicalistes en poste et pour la réintégration de l'entreprise sidérurgique dans le portefeuille de l'Etat. Sentant la menace d'actes de vandalisme sur les installations, la direction a avancé de 24 heures la date prévue pour la mise à l'arrêt du haut fourneau, véritable poumon de l'activité sidérurgique. Ce qui a permis à un huissier de justice de constater l'intrusion de Menadi au complexe, son occupation des lieux et ses tentatives d'attroupement des salariés. Le procès verbal de constatation qui en en a résulté a été aussitôt déposé en même temps qu'une plainte en référé auprès du procureur de la République près le tribunal correctionnel d'El-Hadjar. Cette démarche n'a toujours pas abouti, en fin d'après-midi d'hier, à l'exclusion, y compris au moyen de l'usage de la force publique, des partisans de Menadi. Ils ont occupé le HF et imposé leur diktat aux travailleurs et aux cadres gestionnaires. Entre-temps, dans le milieu des syndicalistes que mènent Mourad Daïffalah, secrétaire général par intérim, et Abdelmadjid Bouraï, président du comité de participation, l'on fait tout pour éviter le contact et la confrontation avec le groupe d'opposants. C'est du reste ce qui est précisé dans le communiqué émis hier par ces deux structures représentatives des 6 000 travailleurs. «Nous cherchons plus que tout à préserver notre outil de travail, notre gagne-pain et notre seule ressource. Nous n'en avons pas d'autre et surtout pas une entreprise sous traitante comme certains», est-il souligné dans le communiqué en question signé par les deux responsables syndicaux. Dans ce paragraphe, l'allusion relative à l'entreprise sous-traitante cible sans le nommer Menadi Aïssa. Il s'agit certainement d'une réponse du berger à la bergère. La veille, l'ex-député et ex-syndicaliste avait affirmé disposer de preuves accablantes impliquant certains de ses ex-compagnons syndicalistes dans des affaires de corruption avec des entreprises privées. Apparemment, il s'agirait de simples gesticulations tendant à semer le trouble dans l'esprit de Abdelmadjid Sidi Saïd, le patron de la centrale syndicale UGTA. C'est ce qu'a indiqué un membre du conseil syndical UGTA de Annaba. Sa déclaration est corroborée par le communiqué émis mardi par la plateforme syndicale UGTA de Sidi Amar sous la compétence territoriale de Tayeb Hmarnia, secrétaire général de l'union de wilaya de Annaba. Le document, dont copie a été adressée à tous les travailleurs et les rédactions de différents titres de presse, consolide la position des syndicalistes conduits par Daïffalah et Bouraï. Il s'agit également d'un cinglant démenti apporté à l'affirmation de Menadi. Au titre de soutien à sa revendication d'élections syndicales anticipées, ce dernier avait cité le secrétaire général de la centrale syndicale et celui de l'union de wilaya au titre de parrainage de sa démarche. En enfreignant pour la énième fois la loi, notamment les dispositions de l'ordonnance judicaire lui interdisant l'accès au complexe et l'entrave des activités de la société ArcelorMittal, Aïssa Menadi a atteint les limites d'un bras de force qu'il a entamé depuis une quinzaine de jours. N'étant plus concerné par une quelconque immunité, sans soutien officiel de quelque part que ce soit, tombé en disgrâce du côté de la centrale syndicale qui l'a radié de sa liste, abandonné par ses soutiens, il risque pénalement gros. Le sait-il lui qui ne veut rien entendre ? A moins qu'il n'ait de solides appuis en haut lieu, ce qui serait synonyme de machination ayant pour objectif d'évincer adroitement l'actionnaire majoritaire le groupe luxembourgeois leader mondial de l'acier du capital social ArcelorMittal El-Hadjar.