Au mois 28 personnes ont été tuées et des dizaines blessées, vendredi 25 avril, dans un attentat lors d'un meeting électoral d'une formation chiite à Baghdad, dernier épisode en date des violences qui ensanglantent l'Irak à moins d'une semaine des élections générales. L'Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL), groupe djihadiste surtout actif en Syrie, a revendiqué l'attentat. Il s'agit de l'attentat le plus meurtrier visant un meeting électoral depuis le début de la campagne pour les législatives du 30 avril, les premières depuis le départ des troupes américaines en décembre 2011. Vers 17 h 30 locales (16 h 30 à Paris), une voiture piégée a explosé puis un kamikaze a fait détoner sa charge lors d'un rassemblement de la branche politique de la milice chiite Assaïb Ahel Al-Haq («ligue des vertueux»), au stade Sina de Bagdad, selon le ministère de l'intérieur. Dans un communiqué mis en ligne, l'EIIL a affirmé que deux de ses combattants avaient fait «détoné au milieu d'un rassemblement d'infidèles leurs ceintures d'explosifs» et ainsi vengé «ce que les milices [chiites] font en Irak et en Syrie : tuer et torturer les sunnites». Effets du conflit syrien voisin L'EIIL, basé en Irak, combat en Syrie voisine où une guerre oppose depuis trois ans les rebelles, majoritairement sunnites, aux forces du régime, dominé par la secte alaouite, une branche du chiisme. L'EIIL y affronte le régime de Bachar Al-Assad ainsi que ses anciens alliés rebelles, excédés par la brutalité et les exactions contre les civils de l'EIIL. En outre, des Irakiens aussi bien chiites que sunnites sont partis combattre en Syrie, aux côtés du régime pour les chiites et de la rébellion pour les sunnites. La milice Assaïb Ahel Al-Haq, qui a intégré le jeu politique après le départ des troupes américaines en décembre 2011, est responsable de l'enlèvement en 2007 du Britannique Peter Moore et est accusée d'être derrière une attaque de janvier 2007 au cours de laquelle un soldat américain a été tué et quatre enlevés, puis retrouvés morts. Washington a régulièrement accusé l'Iran, qui dément, d'avoir entraîné et financé Assaïb Ahel Al-Haq. Selon un responsable du ministère de l'Intérieur, s'exprimant sous le couvert de l'anonymat, Ammar Al-Hakim, le chef du Parti des citoyens, une organisation considérée comme proche du régime iranien, participait au meeting électoral, de même que le leader de la milice chiite visée, Qaïs Al-Khazali. Cet homme avait été arrêté en 2007 par les Américains puis relâché en janvier 2010, six jours après la libération de Peter Moore. Des institutions paralysées Les divisions confessionnelles sont devenues un argument de campagne pour de nombreux candidats aux législatives. Au pouvoir depuis 2006, le Premier ministre chiite Nouri Al-Maliki espère remporter un troisième mandat, malgré sa contestation par la minorité sunnite, et les accusations de corruption et de «dictateur» lancées par ses détracteurs. De nombreuses formations chiites, dont le mouvement Ahrar, lié à l'influent chef radical Moqtada Al-Sadr, affrontent aussi M. Maliki dans ses bastions électoraux du Centre et du Sud.Les institutions politiques irakiennes sont, elles, quasi paralysées en raison de la crise politique et de l'insécurité persistante. Le Parlement a approuvé très peu de projets de loi depuis mars 2010. Ces blocages politiques interviennent sur fond d'une escalade des violences qui ont atteint des niveaux jamais vus depuis 2008, lorsque le pays sortait tout juste d'un conflit confessionnel particulièrement meurtrier, après l'invasion américaine de 2003. Depuis le début 2014, près de 3 000 personnes ont péri dans les violences, que ni l'armée ni la police, elles-mêmes régulièrement visées, ne parviennent à juguler.