Même si Strelkov a tout-à-fait raison en ce qui concerne la trahison russe, il est évident qu'il porte une bonne part de responsabilité dans la défaite qui s'annonce. En tant que commandant en chef, il n'aurait jamais dû se laisser entraîner dans cette ingagnable «guerre de tranchées» de Slaviansk. A Donetsk, comme pour démentir cette vision apocalyptique, la résistance s'empare du siège régional de la Banque nationale ukrainienne «dans le but d'exercer le contrôle sur l'ensemble du système fiscal et financier» (RIA Novosti). Un immeuble voisin où se trouvent les bureaux du groupe Combustibles et Energie du Donetsk du milliardaire Rinat Akhmetov, est également occupé. L'oligarque ne paie toujours pas ses impôts à la RPD, mais comme d'habitude «des négociations sont en cours »... Pour que des mesures de nationalisation soient efficaces, il faut bien sûr que l'Etat, qui les décrète, soit maître chez lui et assez fort pour les imposer partout sans discussion. Occuper un immeuble vide, s'installer dans le bureau du patron et fumer ses cigares, peut être grisant au début. A la rigueur, on peut mettre la main sur des documents intéressants ou sur quelques millions en espèces, surtout à la banque, mais tout cela ne signifie pas qu'on va maîtriser les finances et l'économie. Le 17 juin, près de Poltava (au sud-ouest de Kharkov) attentat terroriste contre le gazoduc Russie-Hongrie. En mars dernier, le führer du Pravy Sektor, Dimitri Iaroch, avait annoncé ce genre de sabotage. De toute évidence, il vient de passer à l'action. Selon le Kyiv Post, on commence déjà à mettre en application le plan de redistribution gratuite des terres volées dans les régions de l'est soumises au nettoyage ethnique. Les premiers bénéficiaires sont des militaires et autres participants à l'expédition punitive contre le Donbass. (Les agriculteurs pauvres de l'ouest viendront sans doute plus tard, quand «l'ordre» aura été définitivement rétabli.) La bonne nouvelle du jour pour tous les amis sportifs de Slaviansk, Kramatorsk, Donetsk, Lougansk et Marioupol : Vladimir Poutine se rendra à la finale de la Coupe du monde de football au Brésil. Par ailleurs, l'Ossétie du Sud reconnaît la RP de Lougansk ; elle est la seule à le faire parmi les 15 pays implorés. La Russie, elle, n'est toujours au courant de rien... Dans ce contexte, Karine Bechet-Golovko décrit le non- terventionnisme russe ainsi: «La position de Poutine est stable et claire : la crise dans l'est de l'Ukraine est une affaire intérieure de l'Etat ukrainien, la Russie n'a pas à intervenir. Quand les populations civiles sont touchées au phosphore, la Russie demande une enquête. Quand des journalistes [russes] sont 'arrêtés', elle négocie la libération. Quand ils sont tués, elle exprime son désagrément.» (A suivre)