La Journée de la femme, ce vendredi 8 mars, a été l'occasion pour des dizaines de milliers de citoyens de converger, une fois de plus, vers la Grande-Poste, à Alger-centre, venus à pieds des quartiers environnants ou acheminés par bus privés des banlieues est (El Harrach, Rouiba, Réghaïa), et ouest (Rais Hamidou, Ain Benian, Staouéli), pour faire le plein de la protestation contre la candidature du Président sortant pour un nouveau mandat, entamée le vendredi 22 février dans la protestation qui avait continué le vendredi 1er mars et les jours suivants. Hier, la protestation est ainsi montée d'un cran. Le rassemblement a débuté en fin de matinée avant midi, par la manifestation des femmes pour le 8 mars, qui s'étaient données rendez-vous Place Maurice Audin et Grande poste. Il s'est poursuivi ensuite par un afflux de manifestants qui a permis de regrouper un plus grand nombre d'opposants au 5ème mandat. A la différence des deux derniers vendredis, des familles quasiment complètes étaient présentes aux côtés des adolescents et jeunes qui ont manifesté, en très grande majorité non affiliés à un parti politique. Caractéristique nouvelle dans la manifestation d'hier à Alger: il y avait un côté festif, une sorte de balade familiale que les Algérois ont très rarement l'occasion de faire. L'ambiance stade était inévitable en fin de rassemblement avec les chansons politiques de supporters que l'on entend habituellement dans les grands derbys. Au vu de la spécificité pacifique du rassemblement, le dispositif de police chargé du maintien de l'ordre a été levé, évitant ainsi de donner le prétexte à toute éventuelle provocation. Le rassemblement d'hier prouve que les passions créées autour du 5ème mandat restent extrêmement vives apparemment alimentées par le maintien du processus engagé par le gouvernement qui tend à organiser des élections présidentielles le 18 avril. Les partis d'opposition ont été indésirables et, hier, aucun de leurs dirigeants n'a eu l'inconscience d'apparaître au milieu de la foule. La composante de la foule a été encore une fois disparate, constituée de «sensibilités» différentes, divergentes, voire opposées, qui, en dehors du slogan anti-5ème mandat, a lancé des mots d'ordre politiques et sociaux, exprimant des revendications tournant principalement autour de la justice sociale et de l'Etat de droit. Bien après que les familles aient quittées le rassemblement, adolescents et jeunes sont restés pour entonner les chants qui expriment leur mal-vie, leurs conditions de vie détériorées par la crise dont ils sont les principales victimes et leur angoisse quant à leur avenir dans le pays Quels enseignements vont tirer les partis d'opposition après les marches d'hier qu'ils ont soutenues à travers leurs déclarations publiées sur les réseaux sociaux mais dont ils sont exclus et quelle sera la réaction du pouvoir qui a déjà laissé entendre qu'il a reçu le message? Il faut noter avec satisfaction qu'il n'y a eu aucun incident tout au long du rassemblement à Alger centre. Le rassemblement a permis à des dizaines de milliers de personnes d'exprimer pacifiquement leurs opinions avec une grande maturité, y compris chez les jeunes, traduisant ainsi le pluralisme démocratique qui est désormais une réalité palpable. Les manifestants ont visiblement fait preuve d'une grande vigilance et d'une prudence qui leur fait honneur, pour empêcher une éventuelle infiltration insidieuse visant à provoquer le chaos et porter atteinte à la paix et à la stabilité, dont jouit l'Algérie et qu'ils tiennent à tout prix à préserver.