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à la meïda du dialogue, les règles de civilités du pays profond
Publié dans La Nouvelle République le 01 - 06 - 2019

Le «Hirak» ne sortira pas de représentants, tout simplement parce qu'il tient plus d'un mouvement sociétal aux propositions réformistes diverses que d'une furie révolutionnaire politique sectaire. Cela n'enlève bien entendu rien ni à sa détermination ni à sa maturité dont le pacifisme de la démarche est l'expression la plus achevée. Les Algériens souhaitent le changement d'un système autoritaire, paternaliste, insupportable qui les infantilise mais ne veulent pas tout renverser. Une attitude qui leur donne beaucoup de crédits aux yeux de l'ANP. La transition peut donc être initiée en dehors du «Hirak» et en dehors des représentants honnis de l'Etat dont la détestation n'a d'égale que le mépris que les Algériens ont envers les corrompus. Elle prend moins une forme juridique idoine qu'elle ne fait appel au solide bon sens et au vieux pragmatisme qui ont toujours caractérisé le peuple algérien. Si «la culture est ce qu'il reste lorsque l'on a tout oublié», alors inspirons-nous des règles du savoir-vivre de nos campagnes, lorsque surgissent de profonds différends, les hommes et femmes de ce pays s'invitent autour d'un couscous pour retrouver dans l'intimité de ce qu'ils sont, les fils du dialogue qui font de nous une grande Nation.
D'abord il nous faut lever quelques équivoques. Le «Hirak» et les espoirs légitimes qu'il soulève est une chose. Les modalités du dialogue en sont une autre. Le «Hirak» a donné un formidable coup d'accélérateur à des forces à l'œuvre de manière permanente dans la société. Ses dynamismes ne sont pas d'ordre politique. Elles relèvent de catégories supérieures, celles de la démographie, de l'économie, de la sociologie ainsi que des rapports de force à l'échelon international. Elles ne s'arrêteront donc pas en si bon chemin. De ce point de vue, les changements sont écrits à l'encre indélébile mieux que toute permanence d'ordre constitutionnelle. Rien ne pourra faire barrage à ces évolutions, comme aucune force ne saurait lutter contre les marées. C'est un film en action qui se projette dont le «Hirak» est l'acteur principal et le Peuple le spectateur privilégié. Les modalités du dialogue, c'est-à-dire celles de la transition sont une autre chose. Elles sont inspirées des circonstances, de l'éphémère, de rapports de force politiques dont on ne sait jamais avec certitude ce qu'ils adviendront tant les calculs en tous genres sont bien souvent déjoués par une réalité qui a bien plus d'imagination que toutes les fictions du monde. Elles peuvent parfaitement naître dans la Constitution pour ensuite la dépasser. La transition contrairement à ce que laisse suggérer l'idée de mouvement qui la qualifie relève de la photo que l'on regardera comme l'on range de vieux souvenirs. Et à ce propos, il est peut-être bon de rappeler ici un épisode reflétant des crispations sérieuses au sein de la révolution algérienne, lorsque le pays vivait une autre transition le détachant de la tutelle française vers son indépendance, entre ceux qui étaient en charge de négocier les accords d'Evian et l'Etat-major Général à Ghardimaou. Les premiers avaient accepté la souveraineté française sur la base militaire de Mers El-Kebir pour un bail de 15 ans à compter de la date de l'indépendance ce qui, au nom des principes révolutionnaires, avait déclenché la colère de Boumediene et de tout son Etat-Major. Pourtant l'histoire a donné raison à Krim Belkacem et Saad Dahlab puisque Mers El-Kebir fut remise par l'armée française à Chadli Bendjedid en février 1968 soit à peine cinq années après que l'Algérie devint maîtresse de son destin. La transition c'est le moment photographique du «Hirak» et elle ne signifiera jamais rien de plus qu'un instant qui ne peut en aucun cas faire pièce aux mécanismes profonds à l'œuvre dans la société algérienne. Lorsque l'on saisit la différence de nature entre le «Hirak» et la transition, on comprend dès lors que cette dernière peut parfaitement se négocier en dehors du «Hirak» ainsi qu'hors de portée des tenants de l'ancien régime, avec toutes des forces sincères au sein de la Nation qui se feront un devoir de traduire les aspirations populaires. Commençons donc par le commencement pour caractériser le dialogue et donc par contraste définissons ce qu'il ne peut être. Un dialogue politique n'est pas une rencontre de masses de personnes, ni une conférence, ni un séminaire, ni des états généraux, ni un forum. Ce n'est pas non plus une réunion où se discute un enjeu secondaire, ni un endroit où l'on vient déclamer ses certitudes, ses convictions voire ses propositions ou même ses résolutions. Un dialogue n'est absolument rien de tout cela, car ce qui vient d'être dit procède de la lutte partisane, propagandiste et n'a pas sa place autour de la meïda du dialogue. Alors qu'est-ce le dialogue ? C'est la mise en présence de groupes d'intérêts différents autour d'un enjeu mutuel mais qui ne sera pas forcément commun. Un dialogue a pour but essentiel de faire comprendre aux autres, un point de vue fondé, de manière que tous le prennent en compte formellement ; c'est-à-dire le reconnaissent en tant que tel. Un dialogue n'a donc pas pour objectif de convaincre les autres ou de les faire changer d'optique. Ce n'est ni un concours d'intelligence ni une compétition d'éloquence. Il est l'exposition d'un avis définitif, d'une conviction sincère de telle façon que les autres participants au dialogue en prennent note et aménagent leurs propres certitudes, sans les heurter, pour faire une place aux préoccupations exprimées par chacun. RèGLE NUMéRO UNE : Dans nos campagnes, lorsque le différend grandit entre deux parties opposées, le premier réflexe est de trouver la personne idoine capable dans un premier temps de parler aux parties en conflit ouvert. Chez qui tenir le repas autour d'une meïda du compromis ? En général une personne, ayant la confiance de tous en raison des vertus morales qui sont les siennes. C'est aussi celui qui facilitera le dialogue. En diplomatie on appelle cela un médiateur. Chez nous, cela peut-être le notable du village, le cheikh de la mosquée ou un homme de culture. Rien n'interdit à ce qu'une association comme celle des anciens moudjahidine, celle des zaouïas ou toute autre initiative de personnalités ayant un ascendant moral reconnu soit proposée en tant que partie médiatrice ou se présente en tant que telle. RèGLE NUMéRO DEUX : Que doit faire le médiateur ? C'est en général la partie invitante sur laquelle échoit la lourde responsabilité de définir les préoccupations communes. Ces dernières doivent être, dans cette étape, réduites au minimum pour augmenter les chances de réussite. De même les centres d'intérêt immédiats devront tenir compte des économies des ressources que la démarche inclura aussi bien que de ne pas ouvrir des chantiers juridiques qui en appelleront de trop nombreux. Pour ce qui nous préoccupe, ce sur quoi toutes les parties peuvent être en accord, c'est l'organisation d'élections présidentielles sincères et transparentes. La voie pour les organiser doit tout aussi bien tenir compte des perspectives différentes qui seront exprimées par les parties en présence que les relations inégales de pouvoir des différents camps. Toute autre proposition, en dehors de l'organisation d'élections présidentielles n'est ni sérieuse, ni réaliste pour l'exprimer élégamment lorsqu'elle ne cache pas d'autres objectifs inavoués, bassement politiciens, en défense d'intérêts particuliers bien loin de ceux de la Nation. RèGLE NUMéRO TROIS : Oublier les usages protocolaires. Lorsque les Algériens s'invitent à la meïda du dialogue, le premier geste qu'ils font est de s'asseoir au ras du sol, en position de tailleur. Voilà donc un principe inspiré de nos coutumes millénaires, un dialogue, c'est avant toute chose la stricte mise à égalité de tous les participants au regard des contraintes protocolaires. C'est pour cette raison essentielle que ce dialogue doit se réaliser en dehors de tout cadre strictement institutionnel, au sens d'environnement présidentiel ou gouvernemental, qui impliquerait une reconnaissance d'une inégalité de principe entre les participants. Mais cela ne vaut bien évidemment pas non-reconnaissance des écarts de pouvoir entre les différents participants au dialogue car ils expriment une configuration institutionnelle, un rapport social ou un statut reflétant une réalité forcément différente entre chacun et qu'il s'agit de prendre en compte, le plus naturellement possible. RèGLE NUMéRO QUATRE : La meïda ne peut accueillir que quelques personnes ou entités. Un dialogue doit donc se réaliser avec un nombre limité de personnes si l'on veut le voir être couronné de succès. Seul un nombre restreint de personnes invitées, ont voix au chapitre. Les principaux partis politiques ayant une réelle influence, ceux du pouvoir comme ceux de l'opposition, de même que quelques associations professionnelles triées sur le volet, enfin des personnalités ou associations ayant une moralité au-dessus de tout soupçon. Surtout ne pas s'embarrasser de la cohorte de groupes de pressions, d'associations, d'activistes et autres militants politiques et encore moins des thuriféraires notoires du régime. Ceux-là sont de facto exclus, car ils constituent le principal obstacle au dialogue. RèGLE NUMéRO CINQ : Le repas est limité dans le temps et le dialogue ne doit en aucun cas s'éterniser sinon il perd de son efficacité. Il faut donc dès le départ annoncer un calendrier du dialogue avant même de proposer celui des résolutions issues du dialogue lui-même. Cela vise à obliger les participants à faire du mieux qu'ils peuvent pour aller vers l'essentiel sans circonvolutions pour sortir par le haut et faire du processus de dialogue dans lequel ils s'engagent un acte efficient épuisant la plupart des clarifications nécessaires à l'expression des différences de point de vue . RèGLE NUMéRO SIX : Se mettre d'accord à l'avance sur les sujets qui ne seront pas abordés et ne mettre l'accent que sur les thématiques appelées à être discutées. Il est hors de question durant le repas d'aborder des tas de problèmes au risque d'indisposer vos interlocuteurs. La conversation doit tourner autour d'un nombre très restreint de sujets qui constituent le cœur des difficultés du moment. A savoir l'organisation, les modalités des élections présidentielles et ses corollaires immédiats et certainement pas sur les contenus des différentes phases transitoires s'apparentant à une discussion sur le sexe des anges, assemblée constituante et autres Etats généraux, nature du régime à mettre en place (etc.) qui doivent être impérativement mis de côté pour les aborder dans des dialogues ultérieurs en fonction des évolutions politiques futures, dans des cadres juridiques et des formats politiques différents. RèGLE NUMéRO SEPT : Le repas doit se terminer sur des résolutions publiques, engageant les uns et les autres de manière irrévocable et irréversible. La plus grande publicité doit leur être fait, de même que tous les participants au dialogue doivent confirmer chacun de son côté son engagement plein et entier aux décisions prises en commun accord. RèGLE NUMéRO HUIT : Obtenir des résultats palpables, en d'autres termes des concessions, des groupes d'intérêt les plus
puissants en faveur de ceux qui le sont moins. Cela constitue le cœur de l'objet de la discorde et doit être de suffisamment de poids pour emporter l'adhésion des plus réticents lorsque dans l'intimité de leurs consciences ils feront le bilan cout-avantage d'un éventuel refus. RèGLE NUMéRO NEUF : Commencer par des objectifs faciles qui mettront tout le monde en accord et aborder les questions du moment par ordre croissant de difficultés, jamais l'inverse. Au cours du dialogue, il est essentiel de bien contrôler les comptes rendus, la bureaucratie du dialogue étant la prérogative exclusive du médiateur, à laquelle on ne peut substituer des enregistrements numériques. RèGLE NUMéRO DIX : S'assurer des engagements pris en fixant des échéances précises et les règles attendues des uns et des autres. L'opposition, particulièrement, celle qui a réussi à Alger à prendre la direction de la manifestation du vendredi, se fourvoie profondément si elle pense substituer à une stratégie politique de long terme, une tactique d'occupation de la rue de court terme. C'est un piège pour elle tendu patiemment par ceux dont le métier est la pensée stratégique. A ce petit jeu, cette opposition est perdante. Lorsque la meïda est servie, chacun prend son bout de viande accompagnant le couscous garni de légumes. Dans nos traditions, seul un couscous sec est de rigueur au second service pour ceux dont la faim est insatiable.


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