A la faveur du conflit militaire à Ghaza du 7 octobre 2023, de la mort du jeune Thomas Perotto à Crépol, le 19 novembre 2023, du vote sur la loi immigration du 26 janvier 2024 qui proposait de porter atteinte au droit du sol à l'Assemblée nationale et surtout de la séquence des élections européennes du 9 juin 2024 puis des législatives anticipées du 30 juin – 7 juillet 2024 où l'on n'a pas hésité à parler de fin de la double nationalité, l'extrême-droite française et la droite réactionnaire ont pu poser de nouveaux jalons pour mettre en œuvre leur projet de société néocoloniale en France.La criminalisation de la consommation pour les Blancs est demeurée largement formelle. Avec l'« épidémie du crack » des années 1980 touchant massivement les jeunes étudiants blancs, les législateurs au grand cœur, pensant certainement à leurs enfants, ont d'ailleurs mis fin à cette hypocrisie en modifiant les lois pour alléger sensiblement les peines pour les consommateurs. Une fois ce correctif apporté au dispositif, les peines pour le deal de drogues ont connu un durcissement incessant, notamment avec l'introduction de peines planchers. Par ailleurs, la police, militarisée, a reçu carte blanche au nom de la « guerre contre la drogue » pour se livrer à un harcèlement permanent des jeunes Noirs (rejoints rapidement par les Hispaniques) dans les ghettos, avec des raids dans la rue et dans les lieux publics mais aussi aux domiciles. 2. L'organisation du trafic de drogue dans les banlieues par les services secrets (DST et DGSE) : A partir de la fin des années 1970 et du début des années 1980, l'essentiel des filières de la French connexion spécialisées dans le trafic d'héroïne, principalement corses, sont éliminées par une action conjointe entre les Etats-Unis et la France. Dans la foulée, les services secrets français, notamment les anciens barbouzes du SAC de Charles Pasqua, reprennent en main les circuits en jachère en apportant deux changements : ils rajoutent à l'héroïne le cannabis importé du Maroc, via de nouvelles filières clandestines mises en place avec la complicité du Makhzen marocain, bras armé de la DGSE française. D'autre part, ils commencent à inonder les banlieues de drogue, suivant l'approche de leurs homologues américains, en mettant en place une pyramide de réseaux de dealers maghrébins dans les banlieues, notamment à Marseille qui demeure une des principales plaques tournantes de la drogue en France. Quant aux circuits « logistiques » de gros, ils restent tenus par les Etats : circuit marocain pour la production et une partie de l'acheminement de gros du cannabis via l'Espagne et circuit français, notamment via le Sahel, depuis 2012, et les opérations Barkhane et Cie grâce au contrôle des bases militaires et des pistes d'atterrissage dans le Nord du Mali et du Niger qui permettent de fusionner de nouveaux réseaux d'acheminement vers l'Europe de l'héroïne d'Amérique latine avec la route sahélienne du cannabis du Maroc. Tout comme aux Etats-Unis, la France lance, avec moins de théâtralité que les Etats-Unis, sa « guerre contre la drogue » pour stigmatiser les banlieusards, notamment maghrébins puis noirs. Elle s'appuie sur la loi très dure de 1970 ciblant à la fois les consommateurs et les fournisseurs de drogues dures et de cannabis. Dans les faits, comme aux Etats-Unis, son application différenciée et raciste a consisté à épargner les consommateurs, majoritairement Français de souche dont une très grande partie de la population étudiante, nos « enfants » pour la frange raciste, bénéficiant d'une grande indulgence, pour se concentrer sur une répression très dure des jeunes de banlieue, Noirs ou Maghrébins : contrôle au faciès continuels, présomption d'être des dealers, plantage de paquets de drogue pour les piéger avec la complaisance de magistrats membres de l'Establishment pour les condamnations. Tout comme aux Etats-Unis, le trafic de drogue a permis de faire un coup « multi-gagnant » : freiner l'ascension économique et sociale des Maghrébins de banlieue dans la société française en les détournant des voies légales et légitimes via l'appât du gain financier facile, discréditer les Maghrébins (puis les Noirs africains) en les associant au deal, moyen de les stigmatiser et de les couper du reste de la population française, provoquer des dégâts massifs dans l'ensemble du tissu social des banlieues et, enfin, procurer des ressources financières considérables pour l'Establishment sécuritaire hors budget c'est-à-dire sans contrôle parlementaire, voire quelquefois exécutif. 3. La guerre culturelle contre les populations immigrées via le gangsta rap : Le gangsta rap a été encouragé par l'Establishment pour faire la promotion de la violence, d'un « mode de vie » et d'un « nouveau statut social de gangster ». Tout comme aux Etats-Unis, l'objectif était d'installer une contre-culture servant à décérébrer les jeunes de banlieue, à diffuser de fausses valeurs et à accentuer la fracture avec le reste du corps social français. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si l'un des fils de Nicolas Sarkozy a fait une carrière de producteur dans ce business juteux qui permet de gagner beaucoup d'argent tout en sapant les valeurs et la personnalité d'« ennemis de classe » ou si Canal Plus de l'ère Vincent Bolloré produit et diffuse la série Validé faisant la promotion de cette sous-culture aux « valeurs » toxiques. 4. La manipulation de l'intégrisme religieux dans les banlieues à partir des années 1990, principale nouveauté du plan COINTELPRO français par rapport aux Etats-Unis : – La propagation de l'intégrisme dans les banlieues, coup double de politique intérieure et extérieure Dans les années 90, l'Establishment droitier français et ses alliés sionistes et anglo-américains mettent en place un plan pour diffuser l'intégrisme salafiste dans les banlieues françaises, en marge de leur projet de déstabilisation de l'Algérie. En Algérie, les Occidentaux et particulièrement la France soutiennent le parti politique intégriste islamique révolutionnaire du FIS (aujourd'hui, on dirait salafiste) affilié au réseau des Frères musulmans et co-dirigé par l'agent du MI6 britannique Abassi Madani, formé dès les années 60 en Angleterre. Conformément à la stratégie politico-militaire des Frères musulmans, le FIS tente d'abord de prendre le pouvoir par les urnes puis, après l'arrêt du processus électoral de décembre 1990, actionne son réseau souterrain de multiples branches armées composées d'anciens membres des « légionnaires-combattants de la liberté » en Afghanistan contre l'URSS (comme les appelait alors la presse occidentale) comme le FIDA (pour assassiner les intellectuels), l'AIS (pour assassiner les militaires et les malheureux civils pris dans la nasse), puis le GIA (pour assassiner tout le monde), et enfin le GSPC pour le terrorisme à basse intensité pour freiner le développement dans les zones stratégiques. Mohsen Abdelmoumen