Par ailleurs, 63% des personnes interrogées disent penser que ce débat n'a pas été constructif et 61% jugent qu'il n'a pas permis de définir ce qu'était «être Français», ce qui est son but affiché officiellement. Deux Français sur trois (66,8%) disent en revanche ne pas souhaiter la suppression de ministère de l'Immigration. Interrogé sur France Info, le ministre de l'Immigration, Eric Besson, a reconnu pour la première fois des problèmes dans la conduite de ce débat, sans toutefois remettre en cause sa pertinence. Il a, notamment, regretté de n'avoir pas créé un comité composé d'intellectuels de gauche comme de droite, qui aurait pu commenter et orienter le débat à sa place. Dans le quotidien 20 minutes, il réfute, cependant, tout tentation électoraliste. «Cette critique n'est pas à la hauteur du débat», dit-il. Il annonce, en outre, la tenue d'un séminaire gouvernemental «dans les 15 jours», à l'issue duquel Nicolas Sarkozy annoncera des décisions et des orientations. La gauche et des associations critiquent ce débat qui s'est, selon eux, focalisé sur la question de l'islam et de l'immigration et a donné lieu à de nombreux dérapages racistes. D'après le sondage de lundi, une majorité de Français (58%) est favorable au droit de vote des étrangers non européens aux élections locales. A 68,2 %, ils estiment que l'immigration n'est pas une menace pour l'identité nationale. L'enquête d'Obea a été réalisée, fin janvier, par téléphone auprès d'un échantillon représentatif de 1 000 personnes. «Nous ne débattrons pas» a répondu Mediapart juste après le lancement officiel du débat par Eric Besson. Mediapart est un journal d'information numérique, indépendant et participatif. Il est né de la volonté de quatre journalistes : François Bonnet, Gérard Desportes, Laurent Mauduit et Edwy Plenel. Il lance avec deux cents personnalités, parmi elles Bertrand Delanoë, maire de Paris, Karima Delli, député européen Europe-écologie, Raymond Aubrac, commissaire honoraire de la République, Martine Aubry, maire de Lille, premier secrétaire du Parti socialiste, un appel à refuser le «grand débat sur l'identité nationale» organisé par le pouvoir. «Nous souhaitons que cet appel soit à l'origine d'une grande pétition citoyenne qui suscite un vaste rassemblement», souligne Mediapart avant de poursuivre : «Par principe, nous sommes favorables au débat. A sa liberté, à sa pluralité, à son utilité. C'est pourquoi nous refusons le «grand débat sur l'identité nationale» organisé par le pouvoir : parce qu'il n'est ni libre, ni pluraliste, ni utile. Il n'est pas libre, car c'est le gouvernement qui le met en scène, qui pose les questions et qui contrôle les réponses. Il n'est pas pluraliste, car sa formulation réduit d'emblée notre diversité nationale à une identité unique. Il n'est pas utile, car cette manœuvre de diversion est une machine de division entre les Français et de stigmatisation envers les étrangers. Accepter que l'Etat entende définir à notre place ce qui nous appartient, dans la variété de nos itinéraires, de nos expériences et de nos appartenances, c'est ouvrir la porte à l'arbitraire, à l'autoritarisme et à la soumission. La République n'a pas d'identité assignée, figée et fermée, mais des principes politiques, vivants et ouverts. C'est parce que nous entendons les défendre que nous refusons un débat qui les discrédite. Nous ne tomberons pas dans ce piège tant nous avons mieux à faire : promouvoir une France de la liberté des opinions, de l'égalité des droits et de la fraternité des peuples.» Le débat sur l'identité nationale «n'a pas dérapé», selon Besson. Objet de vives critiques dès son lancement en novembre, le débat sur l'identité nationale «ne se focalise pas sur l'immigration et l'islam», a insisté Eric Besson, le ministre de l'Immigration, lors d'un premier bilan sur cette initiative. Le grand débat sur l'identité nationale, lancé le 2 novembre 2009 à l'instigation du ministre français de l'Immigration, Eric Besson, ne cesse de provoquer l'ire de l'opposition ainsi que de nombreux intellectuels français qui ont demandé, notamment à travers la pétition du site d'information Mediapart («Nous ne débattrons pas») ou celle de SOS Racisme («Arrêtez ce débat»), l'arrêt d'une initiative dont ils craignent qu'elle ne stigmatise les musulmans français. Soucieux de répondre aux critiques, Eric Besson a décidé de contre-attaquer en dressant, lundi, un premier bilan des réunions organisées à travers toute la France. Lors de la conférence de presse, l'ancien socialiste a réaffirmé la volonté de son ministère et de son gouvernement de poursuivre le projet malgré les polémiques. Qualifiant son initiative d'«immense succès populaire qui dépasse les prévisions», le ministre s'est targué d'être parvenu à réunir quelque 540 000 internautes sur le site Internet créé à cet effet. Plus de 50 000 personnes ont participé au débat en y laissant un commentaire. Le débat n'est pas «focalisé sur l'immigration et l'islam ; la caricature de défouloir raciste n'a pas fonctionné», a insisté Eric Besson, qui a tenu à rappeler que seulement un tiers des 26 000 premiers commentaires laissés sur le site comportait des réactions douteuses. «Il n'y a pas eu de dérapage», a-t-il conclu avant de s'attaquer nommément à la première secrétaire du Parti socialiste, Martine Aubry, dont les récents propos sur le débat ne sont, à ses yeux, que des «bennes d'ordures à bêtises». L'opposition a immédiatement réagi au bilan dressé par Eric Besson. Pour la porte-parole des Verts, Djamila Sonzogni, «le ministre de l'Immigration nous baratine, contrairement à ce qu'a dit M. Besson, ces réunions sont axées essentiellement sur les questions de la burqa et de la religion musulmane». Le débat doit prendre fin ce mois-ci.