A la bonne heure ! Il était temps ! Les journaux se décident enfin de faire front commun. De travailler la main dans la main. Il y en a marre, disent-ils, d'aller chacun dans un sens. Unissons nos rangs, nos lignes éditoriales et nos lignes téléphoniques. Les lignes de crédit, ils n'en ont pas parlé, malgré l'insistance de quelque uns. A cause de ça, la réunion pouvait tourner au flop, mais ils ont décidé d'occulter ce point de divergence. La Suisse oua ma adraka, refuse de lever le secret bancaire, alors nous, disent-ils. Qu'à cela ne tienne. Ils ne peuvent quand même pas s'entendre sur tout. Cela aurait été trop beau. C'est ainsi qu'ils ont décidé, à la veille des échéances que vous connaissez de ne plus faire dans tachrak el foum. Plus d'opposition. Plus de commentaires acerbes. Plus d'analyse qui dérange. Plus de billets provocateurs. Plus de débat contradictoire. Oualou. Que des infos officielles. Des couvertures officielles. Des photos d'agence officielle. Des verbes officiels. Avant chaque nom cité, installer le mot « Monsieur » en toutes lettres et en toutes circonstances. Comme cela on est tranquille, ya sidi. Pourquoi jouer à Zorro et risquer zéro pub ? C'est qu'ils ne sont pas dupes les éditeurs. Ils savent que l'opposition qu'ils affichent, à travers les écrits publiés sur leurs journaux, sert plus leurs opposants. Ces derniers, sur le plan international, peuvent exhiber les différentes publications et dire: «Chez nous, la liberté d'expression existe. Aucun journal n'est censuré. C'est une démocratie exemplaire qui tire sur tout ce qui bouge et en million d'exemplaires». C'est pour cela qu'ils ont décidé, dorénavant, de ne publier que les articles dans le sens du «poilitique». Offrir à l'opinion internationale le même son de cloche. Dans le style nous sommes tous ghaya. Dirou ki tebghou. Vous êtes tous des chouabine chabbine. Et nous refusons de vous servir de caution. Ceci est de la fiction, bien sûr, c'est de l'infaux !