Les temps sont durs pour l'opposition en Algérie et le seront davantage avec la réélection de Bouteflika à la magistrature suprême. Il est évident que le pouvoir va maintenant tout faire pour contraindre au silence les quelques îlots qui, dans cette opposition, refusent de se confiner au respect des règles du jeu du multipartisme de façade tel que voulu par les autorités. Et ce sera une bataille perdue d'avance pour cette opposition si elle persiste dans la forme de résistance qu'elle a employée jusqu'à présent. Il semble que ses principaux chefs de file sont en train d'en prendre conscience et cherchent à changer de stratégie. Hocine Aït Ahmed, le charismatique leader du FFS, a été le premier à faire ce geste en appelant récemment les démocrates «à mettre de côté leurs divergences pour construire une alternative pour le changement». Il a été suivi par Saïd Sadi, qui a déclaré au nom de son parti être en accord avec l'appel du chef du FFS et dit que le RCD «est ouvert aux alliances politiques avec tous ceux qui s'opposent au régime et au pouvoir en place qui l'incarne». C'est à peu de chose près ce qu'ont fait savoir à leur tour Abdallah Djaballah, le président déchu du mouvement islamiste Ennahda, et l'ancien chef du gouvernement passé à l'opposition Ahmed Benbitour. A tous, il est devenu évident que l'opposition n'a de chance de faire reculer le pouvoir dans sa tentative de la normaliser qu'en faisant front contre lui dans une convergence de méthodologie d'action et d'objectifs. Ce n'est pas la première fois que cette évidence est mise en avant dans cette opposition. A un moment ou à un autre depuis l'instauration du multipartisme, des voix se sont élevées parmi elle pour préconiser qui sa convergence, qui son regroupement, qui voire la fusion entre certains de ses segments. La démarche n'a jamais dépassé le stade de l'incantation, tant les fossés qui séparent entre eux les composants de cette opposition se sont avérés plus larges que celui existant entre le pouvoir en place et eux. Cette fois, il est pourtant clair que pour survivre, cette opposition, toutes obédiences doctrinales et partisanes confondues, n'a pas d'autre choix que de tenter de faire front commun contre le rouleau compresseur de la normalisation. Ce dont apparemment des personnalités aussi éloignées l'une de l'autre que sont Saïd Sadi et Abdallah Djaballah conviennent, puisque les deux se sont dits prêts pour cette démarche, que le deuxième cité a justifiée en considérant «que tous les partis d'opposition partagent au moins un point commun : changer le système... Nous pourrons donc collaborer pour y parvenir». La question est donc posée de savoir si l'échec et la marginalisation ont vraiment mûri l'opposition au point qu'elle parvienne à se rassembler autour d'un programme d'action et de résistance a minima mais consensuel.