Le PDG du groupe Sonelgaz, Nourreddine Boutarfa, a mis en exergue, hier, lors de la présentation publique du rapport annuel des comptes de gestion consolidés 2008, la situation financière critique de son groupe. Le PDG a expliqué, en présence du ministre de l'Energie et des Mines, Chakib Khelil, que le gel des tarifs, décidé par les pouvoirs publics depuis 2006 est à l'origine de cette situation. Tentant de relativiser, le premier responsable de Sonelgaz a affirmé que «les décisions d'investissement prises par Sonelgaz, si elles ont eu un impact sur la situation de l'entreprise à cause du gel des tarifs, a permis de réduire les contraintes qui pesaient lourdement sur les réseaux de l'entreprise». Le PDG de la Sonelgaz a ensuite cédé la parole au financier de l'entreprise, en l'occurrence M. Chouali. Ce dernier a, à son tour confirmé qu'il y a réellement un grand écart entre le chiffre d'affaires et les dépenses d'investissement: il est vrai que le chiffre d'affaires entre 2007 et 2008 est en accroissement de 9,26%, mais les dépenses d'investissements ont augmenté de 49,50%, a précisé le financier. Et d'expliquer qu'il y a un vrai décalage entre le prix de vente et le prix de revient. Il précise que l'entreprise a un manque à gagner de 20 milliards de DA (14 milliards de DA pour la vente de l'électricité et 6 milliards pour la vente du gaz). Boutarfa revient pour dire que l'entreprise rencontrera durant l'année 2009 d'énormes difficultés financières, vu le volume des investissements. Et d'ajouter que si l'Etat a décidé d'allouer 20 milliards de DA pour soutenir la population, il doit trouver des solutions pour assurer la durabilité du développement de l'entreprise, voire son existence. Boutarfa a rappelé que la Sonelgaz ne fonctionne plus comme dans le passé, ayant subi une restructuration qui l'a transformée en une holding de 33 sociétés, des filiales qui travaillent d'une façon transparente et autonome, et qui vivent uniquement de leur résultat. Le PDG a affirmé que les choses ne peuvent pas continuer comme ça, sachant qu'à l'horizon 2019, le groupe Sonelgaz va investir prés de 3.000 milliards de DA pour assurer l'approvisionnement en énergie et la qualité de service. Le ministre de l'Energie et des Mines, Chakib Khalil, a soutenu les propos du PDG de Sonelgaz, pour le rassurer. Il a affirmé dans ce sens, que le gouvernement connaît bien la situation, puisque aujourd'hui «tout est transparent». Il explique que la restructuration de Sonelgaz en plusieurs sociétés, gérées d'une façon autonome, permettra à l'Etat de vérifier toutes les données. Il ajoute que «aujourd'hui ces filiales travaillent dans la transparence, le nombre de consommateurs est connu, le taux d'autofinancement est connu et les chiffres d'affaires sont contrôlables». Le ministre a fait entendre que l'Etat doit en principe apporter un apport capital à l'entreprise Sonelgaz. Tout en se montrant optimiste, le ministre de l'Energie et des Mines a affirmé que l'Etat à entre ses mains plusieurs possibilités, en écartant celle d'augmenter les prix de l'électricité pour le moment. Mais à vrai dire, la situation critique sur le plan financier n'est pas due uniquement au gel des tarifs. Le financier de l'entreprise a évoqué, entre autres, le problème des créances qui s'élèvent à 40,5 milliards de DA (25% auprès des particuliers, 25% des PME-PMI et 22% de l'administration). L'autre problème de l'entreprise est la dette extérieure qui est de l'ordre de 4 milliards de DA, sans parler des pertes de change au cours des transactions d'importation. Enfin, le financier Chouali a également évoqué le cas des fraudeurs «on compte 121.261 abonnés résiliés en 2008». Pour le conférencier, la perte ne se limite pas à la fraude, mais également lors de la résiliation de l'abonnement. Le rôle de la Sonelgaz n'est pas de courir après les fraudeurs Le PDG de Sonelgaz a déploré cette situation en affirmant que la mission de Sonelgaz «n'est pas de courir après les fraudeurs». Boutarfa a exprimé son désarroi dû à la difficulté de faire face aux fraudeurs, notamment dans les bidonvilles. Avec réserve, le PDG de Sonelgaz a laissé entendre que son entreprise ne peut gérer à la fois son développement, la distribution et garantir la qualité de service tout en évitant les tensions et en gérant les affaires sociales qui, en réalité, ne lui incombent pas. Un autre facteur évoqué: les pertes enregistrés sur le réseau de distribution et qui sont en hausse de 1% par rapport à 2007. Le taux de pertes de la distribution est de l'ordre de 17,77% en 2008. Des pertes qui pèsent sur le portefeuille de l'entreprise. Le premier responsable de Sonelgaz a affirmé, sans être catégorique, que la production d'électricité durant cet été sera suffisante. «Nous n'avons pas de problème de production, la preuve, avant-hier, nous avons enregistré deux pics de consommation énergétique en raison de la canicule et nous n'avons pas eu recours au délestage», a-t-il déclaré. Et d'ajouter «mais, il se peut qu'il y ait des coupures de groupe, ce sont des choses fatales, qui sont courantes dans le monde entier», a-t-il expliqué. Pour Boutarfa, ce genre de coupures va considérablement réduire avec la mise en service du projet d'interconnexion électrique avec le Maroc, via l'Europe.