Oran va-t-elle en finir avec ses marchés informels qui ont poussé un peu partout, comme des excroissances malignes à proximité des marchés couverts réglementés et qui, peu à peu, ont fini par les remplacer par la force des choses conjugué à l'absence d'une réactivité officielle. Mais, avec le temps et la volonté des pouvoirs publics d'endiguer la déliquescence qui s'est emparée des structures commerciales locales, on assiste à un retour vers la plus élémentaire des normes administratives en vigueur. «Il n'y a qu'en Algérie où on peut voir ça, des revendeurs informels qui s'installent au vu et au su de tout le monde à quelques mètres de l'entrée d'un marché couvert et le temps, les habitudes et surtout les prix aidant, concurrencent dans une première phase les légaux avant de se substituer à eux en toute quiétude», dira un urbaniste. Cette analyse quoique sommaire résume à elle seule le schéma classique de la mainmise de l'informel sur le secteur du commerce. «C'est bien beau d'entendre le ministre de tutelle pérorer sur la lutte contre l'informel en affirmant que la responsabilité de tout un chacun est pleinement engagée, mais il oublie que la présence des institutions de la République fait force de loi et que ce sont ces mêmes pouvoirs publics qui laissent l'informel prendre racine en n'assainissant pas la situation et en n'éradiquant pas à la racine ses tenants et aboutissants», insistera Salim, économiste de formation, qui fera constater au passage la facilité déconcertante de ces poussées de l'informel un peu partout en Algérie. «Il suffit qu'un revendeur s'installe pendant deux à trois jours, en dehors des structures existantes, sans être inquiété, pour qu'au bout d'une semaine, voire deux, c'est une dizaine et davantage qui vont squatter l'espace», expliquera-t-il. La réhabilitation des marchés couverts contribuera-t-elle pour autant à remettre un peu d'ordre dans le secteur ? Les différentes opérations initiées par la direction locale du Commerce, en collaboration avec l'Union générale des commerçants et artisans algériens, et qui toucheront 25 marchés couverts, dont 18 dans la seule commune d'Oran, les sept autres sont implantés au niveau des communes de Bir El-Djir, Es-Sénia et Arzew, viennent suite aux instructions ministérielles visant à organiser le marché et lutter contre le commerce informel, ainsi qu'à assainir la voie publique et à réintégrer l'ensemble des commerçants dans le circuit légal de l'activité commerciale. «Une bonne initiative pour en finir avec ces gens qui nous concurrencent jusqu'aux pas de nos magasins», dira un commerçant. La réhabilitation de ces marchés touchera les toitures, l'étanchéité, la peinture et l'assainissement des réseaux et coûtera quelque 25 milliards de centimes. Une course contre la montre est lancée par les autorités pour les réceptionner au mois d'août prochain avant l'avènement du Ramadan dans un souci clair de contrôler l'activité durant une période cruciale de l'année. Cet empressement des pouvoirs locaux à rattraper le temps et le terrain perdus sur l'informel se traduit également par leur volonté de restructurer les grands marchés existants, dont le plus important est sans conteste celui des Halles centrales. Le transfert des 198 mandataires exerçant aux Halles centrales du chef-lieu de wilaya, prévu début 2009, n'a toujours pas été fait et le futur marché de gros des fruits et légumes d'Oran, dans la commune d'El-Kerma, attend toujours ses nouveaux locataires. Ce nouveau pôle commercial permettra à ses clients de bénéficier de locaux d'une superficie de 40 mètres carrés, contre 12 m² actuellement. Occupant une superficie de 40 hectares, le futur marché de gros a été réalisé pour un coût de 440 millions de DA. Il comprend 300 locaux et un parking de 5 ha. Ce marché, rappelons-le, est intégré dans un projet de réalisation d'un pôle commercial dans cette même région, comprenant la zone du pont logistique entre Oran et la ville espagnole d'Alicante, un marché à bestiaux et d'autres infrastructures annexes. Les anciennes Halles centrales, dont l'évacuation est programmée dans le cadre de la décentralisation extra-muros des grandes activités commerciales, seront affectées à la réalisation d'un équipement public. Une décentralisation mais également débarrasser les cités des marchés «sauvages» qui s'y sont implantés depuis des années jusqu'à faire partie du décor. Grand-Terre, les HLM, Essedikia, Boulanger, pratiquement tous les quartiers d'Oran ont fini, avec le temps, par posséder leur propre marché informel à quelques pas seulement d'un marché couvert déjà existant.