Les premiers responsables de trois syndicats autonomes de l'Education, qui appellent à une grève d'une semaine à compter d'aujourd'hui, dénient à Benbouzid, l'actuel ministre de l'Education nationale, la qualité d'interlocuteur valable. La réponse qu'il leur a fournie quand il les a reçus séparément, jeudi dernier dans son bureau, justifie ce déni de qualité. En effet, le premier responsable du secteur de l'Education nationale s'est contenté de promettre à ses hôtes de transmettre leurs revendications au gouvernement. Pour ces deux responsables syndicaux, Benbouzid a reconnu explicitement les limites de ses prérogatives et son incapacité de résoudre des problèmes qui se posent à un secteur qu'il dirige depuis plus d'une décade. Soulignons que c'est une instruction du Premier ministre qui a «mis le feu au poudre», selon les termes de MERIANE Meziane, coordinateur national du SNAPEST. En refusant l'effet rétroactif de l'augmentation du salaire, Ahmed OUYAHIA a provoqué le mécontentement des syndicats du secteur qui géraient une situation déjà explosive. Pour une autre responsable syndicale se déployant sous l'égide du SNAPAP, les représentants des institutions officielles ont perdu toute crédibilité. Deux jours avant la publication du plan de gestion des ressources humaines définissant les nouveaux critères de participation au concours d'accès à l'enseignement secondaire, le second responsable du secteur lui a promis de considérer le cas des enseignants contractuels dont certains font prévaloir une dizaine d'années d'exercice en tant que PES. Le plan de gestion en question a tout bonnement ignoré leur existence, lance-t-elle dépitée. Dans des déclarations au Quotidien d'Oran, Nouar Larbi, coordinateur national du CNAPEST tient à préciser «Nous sommes les premiers à avoir appelé à ce mouvement de protestation suite à notre dernier conseil national réuni le 19 octobre dernier. Avec l'UNPEF, un syndicat qui dispose d'une base très large au niveau du primaire et du moyen, nous avons réussi à rallier les autres organisations syndicales à notre initiative de grève. Donc, nous ne pouvons que nous réjouir de l'effet boule de neige qu'a provoqué notre appel. Nous avons essayé même avec les syndicats de la fonction publique». Hormis la paternité de l'initiative d'appel de la grève, le coordinateur national du CNAPEST n'a pas mâché ses mots quand nous lui avons demandé de s'exprimer sur sa dernière rencontre avec le ministre de l'Education nationale. «Nous mettons nos rencontres avec le ministre de l'Education nationale sur le compte de la courtoisie de notre part. Puisque M. Benbouzid n'a pas les prérogatives d'apporter des réponses aux problèmes que vit son secteur. D'autre part, nous constatons fort malheureusement que nos responsables ne sont pas encore parvenus à saisir le sens du dialogue avec le partenaire social. Pour eux, si dialogue il y a, il doit se dérouler entre représentants des Etats. La perspective de s'attabler avec le partenaire social avant ou après un mouvement de protestation demeure de l'ordre de l'inimaginable». Interrogé sur la rencontre de son syndicat avec le ministre de l'Education nationale, MERIANE Meziane a déclaré «la discussion avec le ministre accompagné de son SG a été de très courte durée. Pour cause, le ministre s'est limité de nous promettre de transmettre nos revendications au gouvernement dont il fait partie. Donc, nous avons constaté qu'il n'a pas les prérogatives pour trancher les questions qui préoccupent le corps enseignant». Pour ce syndicaliste, les choses sont très claires «la directive de M. Ouyahia, promulguée le 30 septembre dernier, est la goutte qui a fait déborder le vase. En nous privant de l'avantage de la rétroactivité, consacrée par la loi, il a mis le feu aux poudres. Selon nos propres calculs, il a tout bonnement privé l'enseignant en bas d'échelle de 12 millions de centimes et celui qui se trouve en haut de l'échelle de 19 millions. Ce qui représente vraiment des miettes comparativement aux augmentations accordées avec effet rétroactif aux députés et qui se sont chiffrées en centaines de millions pour chacun. Pour nous amadouer et nous dissuader de recourir à la protestation, certaines voix évoquent la prochaine tripartite qui examinera la question salariale. Nous ne nous leurrons plus. Tant que l'article 87 et 87 bis ne sont pas amendés, les salariés ne bénéficieront pas d'un dinar de plus quelle que soit l'augmentation du SMIG». Sans dissimuler sa conviction de voir une large adhésion du corps enseignant au mot d'ordre de grève, MERINE Meziane estime que cette protestation «vise à rendre la dignité au fonctionnaire en général et à l'enseignant en particulier». Abondant dans le même sens, Sadek Dziri, premier responsable de l'UNPEF nous confirme que le ministre «affirme toujours que les portes du dialogue sont toujours ouvertes. Mais il reconnaît en même temps que la question dépasse ses prérogatives». Concernant le mouvement d'aujourd'hui, il dira «nous sommes fin prêts et cette fois-ci, nous irons jusqu'à satisfaction de nos revendications». S'exprimant sur l'agenda immédiat de son syndicat, il annonce «au courant de la semaine nous devons rencontrer l'état-major du CNAPEST avec qui nous coordonnons nos actions. Et après le jeudi, un conseil national de l'UNPEF doit se tenir pour élaborer un bilan et décider de la suite des événements». Mais, d'ores et déjà, il n'exclut pas la radicalisation de ce mouvement de protestation : «nous ferons de telle sorte que nous obtenons gain de cause». Notre interlocuteur reconnaîtra la faiblesse de la représentation de son syndicat au niveau du secondaire où il commence à s'implanter mais défend l'idée de «représenter le secteur de l'Education, notamment au niveau du primaire et du moyen». De son côté, Mme MAAROUF Meriem, présidente de la Coordination des enseignants contractuels qui se déploie sous l'étendard de la Fédération de l'éducation du SNAPAP, nous a expliqué pourquoi son organisation participe un jour en retard à la grève à laquelle ont appelé le CNAPEST, le SNAPEST et l'UNPEF. «Ce n'est certainement pas pour se démarquer des autres organisations syndicales. Il se trouve que nous avons déposé le préavis de grève vingt-quatre heures après eux. Donc nous sommes tenus de nous conformer aux dispositions de la loi. Nous rejoindrons le mouvement auquel nous souscrivons». Concernant la plateforme revendicative de son organisation, elle dira «elle se recoupe totalement avec celle des autres organisations syndicales. Cependant, nous insistons sur notre cas spécifique». Dans ce cadre, elle nous rappelle «nous avons organisé un sit-in mardi dernier devant le siège de l'Education nationale. Nous avons été reçus par le SG du ministère qui nous a promis un examen de notre situation avec la direction de la Fonction publique. Malheureusement, quarante-huit heures après, nous avons été surpris par les conditions de concours imposées pour pouvoir participer aux concours de recrutement des PES qui exigent un master ou un magister. En clair, il nous faut revenir aux bancs de l'université au minimum deux ans pour pouvoir prétendre participer à ces concours. Notons que des spécialités tel que l'allemand ne figure même pas comme spécialité où il y a un manque à combler. Autant dire que notre situation a empiré eu égard à ces conditions imposées par la fonction publique».