Les boulangers de la wilaya de Constantine n'ont pas attendu le conseil du gouvernement qui devait se tenir hier pour se pencher, notamment, sur leur situation, à travers le dossier qui lui a été présenté par leur fédération nationale, et prendre des mesures susceptibles de sortir leur profession du pétrin. Leur situation, indiquent les concernés, vient, en effet, d'atteindre le seuil critique, se traduisant par des fermetures en cascade de boulangeries qui se produisent pratiquement chaque jour. Hier dans la ville de Constantine, par exemple au quartier de Bab El-Kantara, sur 5 boulangeries il n'y avait qu'une seule d'ouverte. Cette situation a, comme il fallait s'y attendre, provoqué un rush voire même une bousculade des citoyens et une chaîne humaine formée par les habitants du quartier et de ceux venus d'un peu partout s'approvisionner en pain. Contacté dans la matinée d'hier, le secrétaire du bureau de wilaya de la fédération nationale des boulangers, M. Bouguerne, a confirmé ce phénomène en révélant une situation des plus inquiétantes. Selon ses dires, on constate que depuis la place des Martyrs à Bab El-Kantara, il ne reste plus que 3 boulangeries ouvertes alors qu'il y en avait plus d'une dizaine il y a seulement une semaine. Dans les autres localités de la wilaya ou dans le reste de la commune de Constantine, la situation n'est pas plus réjouissante. Dans le quartier périphérique de Békira, trois boulangeries sur cinq ont baissé rideaux ces derniers jours. C'est le même cas à Ibn Ziad où il ne reste plus que 2 sur 5, alors qu'elles ne sont plus que 3 sur 7 dans la ville de Zighoud Youcef ». C'est une véritable catastrophe, a commenté M. Bouguerne, car même les boulangers qui consentent à ouvrir, ne travaillent qu'à 70% de leurs capacités dans la fabrication du pain, le reste est consacré à la pâtisserie. A cette allure, toutes les boulangeries seront fermées, a assuré ce responsable, en ajoutant que son syndicat vient de constater que sur les 530 boulangeries de la wilaya, il ne reste que 130 en activité. Tout le reste a mis la clé sous le paillasson. « C'est pratiquement pareil pour tout le territoire national, a ajouté M. Bouguerne et nous, en tant que syndicat, nous n'attendons plus que la planche de salut qui pourrait venir des décisions que prendra le gouvernement dans sa réunion du 7 juin ». Le responsable du bureau de la fédération des boulangers a fait un bref rappel des contraintes qui ont conduit les gens de la profession à cette situation. Ainsi, il explique que les patrons boulangers ne peuvent plus supporter les charges inhérentes à la fabrication du pain. En plus, ils n'ont plus de main-d'œuvre qualifiée, le peu d'ouvriers boulangers qui restent demandent une rétribution s'élevant à 500 dinars par quintal de farine traité (ils touchent 300 dinars actuellement). Or, ils ne peuvent pas se permettre cela sans risquer la faillite alors qu'ils payent le quintal de farine à 2.500 dinars. Pour remédier à cette situation, le bureau de wilaya a fait quelques propositions pour sortir de la crise. Ces propositions visent à faire bénéficier le pain de mesures de soutien par le gouvernement, à l'instar de ce qui se fait pour le lait. Ce soutien pouvant se traduire, entre autres, explique M. Bouguerne, par l'affectation par l'Agence nationale de l'emploi (Anem) de trois ouvriers boulangers à chaque établissement avec la prise en charge de leur salaire, et d'un soutien sur le prix de revient de la baguette qui pourrait se situer entre 5 à 6 dinars.