Les terroristes djihadistes du Mujao, qui contrôlent la ville de Gao et viennent même de s'étendre en direction du sud du Mali, ont annoncé, dans un communiqué rendu public samedi soir, avoir exécuté le vice-consul algérien, Tahar Touati. Le ministère algérien des Affaires étrangères a exprimé sa «surprise» à l'égard des cette annonce car les «contacts avec les ravisseurs n'étaient pas rompus». Le communiqué du ministère des Affaires étrangères semblait, hier, cultiver un espoir ténu que la nouvelle de l'exécution de Tahar Touati, annoncée dans un communiqué du Mujao signé par Abou Al Walid Sahraoui et publié par le site mauritanien Sahara Media, ne soit qu'une manœuvre ou un bluff. Mais les observateurs étaient plutôt pessimistes sur le sort de l'otage sur qui pesait ces derniers jours une lourde menace. Le Mujao avait annoncé avoir reporté l'ultimatum de trois jours à la «demande d'Aqmi», pour que les autorités algériennes acceptent leurs exigences qui se focalisent principalement sur la libération de Necib Tayeb, alias Abderrahmane Abou Ishak Essoufi, un des proches d'Abdelmalek Droukdel et président de la «commission juridique». Il avait été arrêté, le 15 août dernier, avec deux autres membres d'Aqmi à un barrage à Berriane alors qu'il se dirigeait en «mission spéciale» vers le Sahel. Pour certains observateurs, les trois jours de sursis à l'exécution de Tahar Touati étaient purement médiatiques avec pour seul but de montrer «l'insensibilité» des autorités algériennes au sort des otages. Le Mujao avait fait passer une vidéo d'une minute de Tahar Touati qui semblait lire un texte préparé par ses ravisseurs dans lequel il lançait un appel au peuple algérien de le soutenir et d'amener les autorités à lui sauver la vie. Le message comportait une critique contre «ceux qui n'accordent aucun intérêt à nos vies, par leurs décisions fausses et irresponsables, courant derrière des intérêts politiques illusoires». Il soulignait à l'encontre de la politique officielle de l'Algérie, que des gouvernements étrangers n'ont pas «hésité à payer des rançons ou à échanger des détenus contre la libération des leurs». Le communiqué d'Abou Al Walid Sahraoui annonçant l'exécution, publié par le site mauritanien Sahara Media, tente d'exploiter le même filon de la culpabilisation des autorités et de la politique officielle de non-paiement de rançon et de non-libération de détenus. LE «PRESIDENT ET SES GENERAUX» Sahraoui, qui revendique l'assassinat de Tahar Touati, affirme, selon le communiqué, que les autorités algériennes «doivent assumer les conséquences de leur entêtement et des décisions erronées et irresponsables de leur président et des ses généraux». Le même communiqué de l'organisation terroriste laisse entendre que la partie algérienne a négocié un accord avant de se rétracter «à la dernière minute» dans sa mise en œuvre. La pression sur les autorités algériennes et les menaces contre les 4 otages toujours détenus (ils font partie d'un groupe de 7 fonctionnaires enlevés le 5 avril, trois ont été libérés vers le 11 juillet) sont devenues plus fortes après l'arrestation d'Abderrahmane Abou Ishak Essoufi. La situation des otages algériens est difficile car les autorités algériennes défendent au plan international une position de non-paiement de rançons et de refus de libérer les prisonniers. Selon les responsables algériens, toute autre attitude ne fait qu'encourager l'industrie de l'enlèvement au Sahel et renforcer financièrement les groupes djihadistes. UN ESPOIR TENU Dans ce contexte, le communiqué du ministère des Affaires étrangères tente de cultiver, faiblement, l'idée que l'inéluctable n'est pas arrivé pour Tahar Touati. Prudent, le communiqué ne dément pas formellement l'information sur l'exécution du fonctionnaire consulaire algérien Tahar Touati et indique qu'elle «fait actuellement l'objet de vérifications nécessaires pour s'assurer de son authenticité». Le ministère indique que les familles des fonctionnaires consulaires algériens retenus en otages dans le nord du Mali «avaient été reçues samedi matin par le secrétaire général du ministère des Affaires étrangères qui leur a rappelé en particulier que les contacts avec les ravisseurs n'étaient pas rompus». Aussi, poursuit le communiqué, l'annonce de l'exécution du fonctionnaire consulaire algérien «ne peut par conséquent que susciter la surprise et justifier les démarches engagées en vue de confirmer la véracité de l'information diffusée samedi en fin de journée». Le communiqué officiel, malgré sa tournure, peut difficilement passer pour une infirmation de la nouvelle. Il n'incite guère à l'optimisme. Aussi bien pour Touati que pour les trois autres otages.