« La seule chose qui puisse arrêter un mé-chant avec une arme nucléaire,c'est un gentil avec une arme nucléaire». La sortie de Sarah Palin a été mise par les agences de presse dans la case de l'insolite et du risible. Mais ne cédons pas à la facilité, même Sarah Palin doit connaître ce que «dissuasion» veut dire et ne peut ignorer qu'Obama ou Bush ne peuvent envoyer une arme nucléaire sur la Russie. Il faut prendre le propos pour ce qu'il est, un énoncé idéologique sur le bien et le mal. Car l'ancienne gouverneure de l'Alaska, ancienne candidate républicaine à la vice-présidence des Etats-Unis, a beau ne pas être d'une grande intelligence, elle n'en exprime pas moins l'esprit dominant dans les establishments politico-médiatiques de l'Occident. Chez les plus intelligents d'entre eux, les stratèges. Palin n'est que le fast-food de la pensée du grand establishment. Ses membres se pensent «naturellement» comme les «gentils», ne voient pas en eux-mêmes des velléités impériales agressives même quand ils envahissent et massacrent à grande échelle. C'est l'axe du bien qui a agi contre l'axe du mal. Ils sont les gentils, toujours, les méchants, c'est toujours les autres. Les grands médias et les dirigeants occidentaux ont menti sciemment et délibérément sur l'existence des armes de destruction massive de «Saddam». Ils ont admis avoir menti et sont passés à autre chose. L'Irak n'est pas passé à autre chose, il n'en finit pas d'en payer la facture. Actuellement, le grand méchant, c'est Vladimir Poutine, coupable, selon les «gentils», de vouloir restaurer «l'empire russe» et de tenter d'inverser le cours de l'histoire. Le cours de l'histoire, c'est quoi ? On aurait pu penser que le démantèlement du Pacte de Varsovie soit suivi, en toute logique «historique», par celui de l'OTAN qui, on peut le rappeler, n'a rien d'une organisation caritative. Or, depuis la chute de l'URSS, la politique occidentale est restée constamment agressive. Non seulement les compagnies occidentales se sont mis plein les poches avec les oligarques «amis» du temps de Boris Eltsine qui ont fait main basse sur les ressources pétrolières, mais l'Otan n'a eu de cesse de s'étendre à l'Est. Et que reproche-t-on à l'autoritaire Vladimir Poutine ? De ne pas faire l'Eltsine, cette incarnation achevée d'un autoritarisme russe aviné et très commode ! De s'inquiéter de voir cette alliance militaire qui n'a officiellement plus d'ennemis avec la disparition du Pacte de Varsovie s'étendre à l'Est et installer ses armes à portée de Moscou. Bien entendu, comme ils sont des «gentils», cela ne peut pas porter à conséquence ! C'est juste la «paranoïa» de Vladimir Poutine qui y voit un encerclement de la Russie. On est bien dans la variante présumée moins grossière du théorème de Palin. Les bases militaires de l'Otan qui s'approchent de la Russie ne sont pas une menace puisque les Occidentaux sont, par essence, des démocraties qui ne veulent que le bien de l'humanité. Et dans les médias occidentaux des analystes très intelligents écrivent à propos de l'Ukraine toute une théorie sur les visées impériales de la Russie fondées sur le postulat que les Occidentaux et leur bras armé, l'Otan, sont dépourvus de toutes intentions impériales. La déclinaison stratégique du fast-mind de Palin est simple : nous sommes les plus forts, les plus puissants donc on est nécessairement les gentils. Tous les autres sont les méchants. C'est vieux comme l'Empire romain. Les Russes doivent se dire heureusement que Poutine est un méchant qui a l'arme nucléaire, du gaz et du pétrole. Sinon, la gentillesse occidentale l'aurait mangé tout cru !