En ce début de mois de juin, le pouvoir et les opposants membres de la Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique (CNLTD) vont chacun de son côté être le protagoniste d'un show politico-médiatique. Celui du pouvoir consistera en des consultations sur la révision de la Constitution promise en 2011 par Bouteflika et dont il a décidé l'ouverture du chantier lors de son investiture pour un quatrième mandat. Celui de la CNLTD par la tenue d'une conférence nationale devant donner lieu à l'adoption d'une plateforme politique préconisant la mise en place d'une transition démocratique comme issue à la crise nationale. Chaque partie s'est affairée à la préparation de son spectacle qu'elle voudrait être plus impactant que celui de l'autre au plan politico-médiatique. Cette préoccupation n'a pas été absente de la précipitation, que rien ne laissait présager, dont la présidence de la République a fait preuve pour annoncer que le lancement du cycle des consultations dont le pilotage est confié à Ahmed Ouyahia démarrera le mardi 3 juin. Il s'agissait en l'occurrence de parasiter l'effet d'annonce produit par la décision rendue publique par la CNLTD de tenir sa conférence nationale le 10 juin. Pour les deux camps, l'enjeu est néanmoins à qui se prévaudra de la plus convaincante participation à son opération. Ce n'est pas uniquement par souci d'information que la présidence a détaillé le nombre des acteurs politiques ou autres qui ont accepté de participer aux consultations sur la révision de la Constitution. Mais pour donner à comprendre que bien peu ont été les destinataires des invitations lancées par Ouyahia à les avoir déclinées. Pour peu par conséquent que la CNLTD ne réunisse pas autant de participants pour sa conférence nationale, le pouvoir ne manquera pas de minoriser la portée de celle-ci en mettant en avant le différentiel en nombre entre les participants à ses consultations et ceux ayant accepté de répondre à l'invitation de la coordination. L'autre enjeu autrement plus fondamental qui sous-tend et l'initiative du pouvoir et celle de la CNLTD est celui de la crédibilité de l'action politique qu'elles préconisent pour sortir le pays d'une situation dont les deux parties conviennent à partir de diagnostics différents qu'elle doit être dépassée dans l'intérêt de la nation qui exige que celle-ci doit aborder les défis auxquels elle est confrontée dans la cohésion que seul un Etat de droit et une bonne gouvernance peuvent garantir. L'agenda politique pour atteindre cet objectif se résume chez le pouvoir à l'amendement de la Constitution, alors que celui de la CNLTD vise à provoquer une révolution « copernicienne » de laquelle doit naître un système politique dans le pays aux antipodes de celui qui est en place depuis cinquante-deux ans. La révision constitutionnelle à laquelle il va être procédé ne sera pas conçue dans le but de chambouler le système mais de l'adapter aux évolutions qu'a subies la société algérienne et aux revendications qu'elles suscitent en son sein mais tout en ne portant pas atteindre à sa continuité. La plateforme politique de la CNLTD est en demande de rupture de cette continuité. Au sortir de leurs shows politico-médiatiques, chacun des deux camps s'empressera de proclamer que c'est le sien dont les Algériens ont été demandeurs. Il restera entre eux toutefois la réalité du rapport de force qui pour un moment encore penche en faveur du pouvoir.