Plus d'incertitude, ni de doute : l'Algérie participera à la cérémonie de célébration du 14 Juillet en France. C'est le ministre des Affaires étrangères, M. Ramtane Lamamra, qui a mis fin, hier, au suspense longtemps entretenu autour de cette participation. Dans le cadre de la commémoration du centenaire de la Grande Guerre de 1914, l'Algérie a été officiellement invitée par la France à participer à la parade militaire sur les Champs-Elysées, et il n'en fallait pas plus pour ranimer les passions d'une histoire tumultueuse, faite d'événements tragiques. « La mémoire est aujourd'hui un outil précieux pour discuter de cette histoire commune », estiment les dirigeants des deux pays qui ont décidé, ainsi, de passer à l'acte et mettre en pratique une volonté qui date de quelques années, toujours reportée à cause surtout de la levée de boucliers dans les milieux extrémistes d'un côté de la Méditerranée et des conservateurs de l'autre, opposés à un tel rapprochement. C'est aussi l'une des raisons qui a fait qu'on tienne en toute discrétion à la participation de l'Algérie à la cérémonie en question, à laquelle devraient prendre part près de 80 pays, selon les déclarations des officiels français. Une participation acquise qui répond à un principe de courtoisie diplomatique, certainement par égard à l'histoire commune entre les deux pays, mais surtout par une volonté manifeste affichée par les deux présidents Bouteflika et Hollande à dépasser les clivages et faire un saut qualitatif dans les relations bilatérales entre les deux pays. L'Algérie qui participe pour la première fois au défilé militaire du 14 Juillet a préféré garder le silence jusqu'au dernier moment afin de ne pas susciter trop de remous au sein des mouvements foncièrement opposés à la présence de l'Armée nationale populaire au défilé militaire des Champs-Elysées. « Le peuple algérien honore ses propres contributions à la liberté à travers le monde. L'Algérie participera dans le même format et dans les mêmes conditions que quatre-vingts autres nations dont des citoyens sont tombés sur les champs de bataille de la 1ère guerre mondiale, à la manifestation prévue à Paris à cet effet », a précisé, hier, le ministre des Affaires étrangères, M. Lamamra, en marge d'une visite d'inspection des dispositifs d'accueil des estivants de la communauté nationale à l'étranger, en compagnie du ministre des Transports et des directeurs généraux de la Sûreté nationale et des Douanes. Ajoutant dans ce contexte que «le peuple algérien assume toute son histoire et honore ses propres contributions à la liberté à travers le monde», soulignant que cette participation qui aura lieu le 14 juillet à Paris, vise à rendre «à nos valeureux aînés l'hommage qu'ils méritent pour le sacrifice de leurs vies pour la liberté d'autrui et la leur propre». Pour rappel, 173.000 Algériens ont été mobilisés pendant la Première Guerre mondiale, dont 23.000 sont morts au combat, et 150.000 pendant la Seconde Guerre mondiale, dont 16.000 sont morts au combat, et c'est pour ces combattants de la liberté qu'on devrait rendre hommage. A peu près 80 pays dont des ressortissants ont pris part à la Grande Guerre ont en effet été invités à participer aux commémorations, et seulement la venue de deux pays (Algérie et Vietnam) fait polémique. A chacun de ces pays, il a été proposé d'envoyer un représentant du gouvernement (ministre de la Défense par exemple), une petite délégation de trois militaires dont un porte-drapeau (drapeau national), qui ne défilera pas mais prendra part à l'animation d'ouverture, ainsi que quatre jeunes gens (deux filles et deux garçons) qui prendront part à l'animation finale. Bien évidemment, tout sera mis en branle pour faire de l'ombre à cette participation de l'Algérie à la célébration du 14 Juillet. Déjà, des voix s'élèvent, dont celles des harkis et des anciens combattants, pour prévenir ou menacer de leur retrait de la cérémonie « si l'armée algérienne défile à Paris le 14 juillet ». En Algérie, les opposants à cette participation, les fidèles à la ligne de la repentance et les islamo-conservateurs, ne se sont pas encore manifestés publiquement, en raison de la confirmation officielle tardive de cette participation au défilé militaire des Champs-Elysées le 14 juillet prochain, mais cela ne saurait attendre. Enfin, qu'est-ce qu'on ne ferait pas pour gâcher la fête. Profanation ces derniers jours du drapeau national, sentiments xénophobes exacerbés, tout est mis en action pour exprimer une opposition à la participation algérienne aux cérémonies de célébration du 14 Juillet. « Les relations diplomatiques et économiques imposent certaines concessions à notre pays mais il y a des limites à ne pas dépasser », clament des extrémistes et d'anciens combattants en Algérie. Il semble que la confirmation officielle de la participation de l'Algérie à la cérémonie de célébration du 14 Juillet, aussi tardive soit-elle, va provoquer une vive polémique jusque-là tue par une certaine conviction qui laissait croire dur comme fer au contraire au sein de l'opinion publique des deux pays.
