Le rapport annuel du FMI sur la situation économique en Algérie, rendu public le 19 mai, teinté de bonnes notes et de projections à court et moyen termes qui suscitent toutes les inquiétudes, conforte un peu les déclarations officielles du gouvernement algérien qui soutiennent que l'Algérie n'est pas en état d'effondrement économique et que le pays cherche ou sonde les voies et moyens de son salut économique. «Jusqu'à présent, le choc des cours du pétrole n'a eu qu'un effet limité sur la croissance économique, mais les soldes budgétaire et extérieur se sont considérablement détériorés», note d'emblée le FMI, qui préconise «une refonte urgente du modèle de croissance algérien». Malgré, donc, l'existence d'indicateurs économiques assez bons, à l'enseigne d' «un PIB en progression de 3,9 % en 2015», des réserves qui, tout en restant élevées, ont diminué de 35 milliards de dollars, «pour s'établir à 143 milliards de dollars», après avoir culminé à 192 milliards de dollars en 2013, et le niveau de dette extérieure qui «demeure très bas», le ton n'est pas à l'optimisme béat dans le rapport du FMI. «L'économie algérienne est confrontée à un choc extérieur de grande ampleur et probablement durable, qui nécessite de la part des autorités une réponse vigoureuse fondée sur l'assainissement des finances publiques et la mise en œuvre de réformes structurelles», soulignent les termes du rapport en question, insistant sur la nécessité de l'engagement de «réformes structurelles de grande envergure pour soutenir l'activité économique pendant l'assainissement des finances publiques et pour diversifier l'économie». Relevant dans ce contexte que «l'effondrement des cours du pétrole a mis au jour des vulnérabilités présentes de longue date dans une économie dirigée par l'Etat et excessivement tributaire des hydrocarbures». Toutefois, le FMI reconnaît implicitement que «grâce aux marges accumulées par le passé, l'Algérie a la possibilité de mener l'ajustement au choc d'une manière progressive et de reconfigurer son modèle de croissance». Et, chaque mot ayant son pesant de sens dans ce rapport du FMI, il faut noter qu'on parle seulement de la «possibilité» de mener l'ajustement au choc, et pas d'une évolution de situation acquise d'office, ou de concrétisation simple de cet état économique recherché. Le FMI énumère dans ce sens plusieurs conditions pour mener à bien cet «ajustement». Ainsi, le FMI préconise que «pour rétablir les équilibres macroéconomiques, il convient de procéder à un assainissement soutenu des finances publiques à moyen terme, accompagné d'une masse critique de réformes structurelles pour diversifier l'économie», «les politiques de change, monétaire et financière devraient appuyer ces efforts», «il sera important de bien expliquer l'action des autorités pour réunir un consensus autour des réformes nécessaires et assurer ainsi leur mise en œuvre dans les meilleurs délais». Car, rappelle-t-on, «les réformes structurelles mettant du temps à produire leurs effets, il convient de les engager sans tarder». Les risques de rater le virage de cette importante «négociation» sur le plan des réformes économiques sont latents, dont les tergiversations dans les décisions à entreprendre, d'où les inquiétudes véhiculées par ce rapport du FMI. C'est que la situation exige des décisions pas toujours populaires, dont le recours à l'endettement extérieur, l'ouverture du capital de certaines entreprises publiques à des acteurs privés (inscrit dans la loi de finances 2016 mais gelé à la suite d'une levée de boucliers au sein de l'opposition), et poursuite de la réforme des subventions tout en protégeant les populations pauvres, sont autant de recommandations faciles à dire mais pas du genre «exécution évidente». Aussi, le FMI a été très critique à l'égard de la politique des «restrictions aux importations», jugeant que cela «apporte peut-être un répit provisoire, mais elles créent des distorsions et ne sauraient se substituer aux réformes destinées à doper les exportations». Et, chose qui va dans le sens contraire de certaines appréciations internes, le rapport du FMI a encensé la Banque d'Algérie, soulignant que cette dernière «s'adapte de manière appropriée à l'évolution des conditions de liquidités en réactivant ses instruments de refinancement et en renforçant ses capacités de prévision et de gestion des liquidités». Sans pour autant se défaire de son ton imprégné de prudence, estimant que «le secteur bancaire dans son ensemble est bien capitalisé et rentable, mais la persistance de faibles cours du pétrole accroît les risques pesant sur la stabilité financière. De plus, les liens étroits entre le secteur financier, le secteur des hydrocarbures et le secteur public accentuent la vulnérabilité des banques aux risques systémiques et appellent des mesures préventives». Les autorités devraient continuer à renforcer le cadre prudentiel, notamment en étoffant le rôle de la politique macroprudentielle et en améliorant leurs préparatifs d'urgence et les capacités de gestion des situations de crise.