A ceux qui ne parvenaient pas à comprendre pourquoi la France qui, officiellement, reconnaît le gouvernement d'accord national (GNA) dirigé par Fayez Sarradj en tant que seule autorité légale de Libye a mis pourtant à disposition du général Khalifa Haftar qui la lui conteste le détachement de ses forces spéciales qui opère dans ce pays, le président de la commission des affaires étrangères du Sénat italien Pier Ferdinando Casini leur fournit sans détour l'explication dans l'interview qu'il a accordée au quotidien « El Messaggero ». Pour ce sénateur italien, si en Libye la France marche dans une direction alors que l'Italie, la Grande-Bretagne et les Etats-Unis avancent dans une autre (soutien au Premier ministre et à son cabinet d'union nationale), c'est parce que avec l'Egypte elle mise sur la division du pays en trois parties. L'accusation que formule le parlementaire italien contre Paris et que le gouvernement de Rome estime probablement avérée n'est pas sans fondement malgré les dénégations françaises qu'elle provoquera. La justification fournie par les autorités françaises sur la présence de leur détachement des forces spéciales de leur pays aux côtés de « l'armée nationale libyenne » que commande le général Haftar qui refuse l'autorité du GNA est qu'elle est destinée à contribuer à rendre plus efficiente sa participation à la lutte contre Daech. Ce qu'elles taisent par contre c'est que le général Haftar refuse toute subordination de son « armée » à l'état-major des forces armées du GNA engagées elles aussi dans une offensive en cours contre l'organisation terroriste, et qu'en l'aidant militairement elles l'encouragent à persister à faire cavalier seul, ce qui ne concourt pas à conforter la dynamique d'union nationale ébauchée en Libye sous les auspices des Nations unies et dont le cabinet Sarradj en est l'émanation. En tout état de cause, il se dévoile qu'en Libye les interventions étrangères qui s'y déroulent n'ont pas pour but uniquement de mettre fin à la menace qu'est la présence de Daech dans le pays mais également de faire prévaloir les intérêts respectifs des Etats qui les ont engagées. Leur résultat risque de prolonger en l'aggravant le chaos dans lequel se trouve la Libye tant il apparaît manifeste que ces intérêts sont divergents occasionnant des rivalités entre ces Etats qui pour défendre ce qu'ils estiment leur revenir dans ce pays ne reculent pas à jouer un camp libyen contre l'autre. L'accusation formulée par le président de la commission des affaires étrangères du Sénat italien contre la France et l'Egypte n'est toutefois nullement à considérer comme la dénonciation de l'ingérence étrangère dans les affaires de la Libye. Rome ne s'oppose à Paris et au Caire que parce qu'elle estime le but de leur intervention préjudiciable aux intérêts « historiques » que l'Italie détient en Libye. Pour les contrer, Pier Fernandino Casini ne propose rien d'autre que la convocation d'un sommet européen qui sous couvert d'une position commune de l'Europe contraindrait la France à réviser sa position. Suggestion qui n'est pas excluante d'une intervention militaire étrangère coordonnée. Ce dont pourtant le gouvernement Sarradj censément appuyé par l'Italie et les autres puissances occidentales a fermement déclaré qu'il n'en veut pas. Accusateurs comme accusés jouent dans ce conflit une partition en solo dont on décèle derrière chacune les sinistres appétits de leurs exécutants. Pour l'Algérie, ces ingérences étrangères en Libye voisine n'augurent rien de bon pour sa sécurité nationale.