Les quatre hommes forts du moment de la Libye se sont engagés, hier, à Paris, à des élections législatives et présidentielle, le 10 décembre 2018. C'est du moins l'annonce phare faite par le président français Emmanuel Macron, à l'issue de la conférence internationale qui s'est tenue sous l'égide de l'ONU pour ouvrir la voie à des élections d'ici la fin de l'année en Libye. La déclaration politique approuvée oralement par le Premier ministre du gouvernement d'union nationale Fayez al-Sarraj, le maréchal Khalifa Haftar, homme fort de l'Est du pays, le président de la Chambre des représentants, Aguila Salah, et celui du Conseil d'Etat, Khaled al-Mechri, évoque un engagement commun à organiser, sous le parapluie onusien, «des élections dignes de foi et pacifiques et à respecter les résultats des élections lorsqu'elles auront lieu». Même si la déclaration n'a pas donné lieu à la signature du document, cela n'a pas empêché le locataire de l'Elysée de parler d'«une rencontre historique» et d'«une étape clé pour la réconciliation». L'objectif premier de ce rendez-vous diplomatique était de «créer les conditions d'une sortie de crise» en Libye, en «responsabilisant tous les acteurs nationaux et internationaux» avait déclaré la présidence française qui actait du coup l'échec de tous les efforts engagés à stabiliser le pays depuis la chute du régime de Kadhafi. La conférence devait également fixer le cadre d'un processus politique qui passera par l'adoption d'une «base constitutionnelle pour les élections» et des «lois électorales nécessaires» d'ici le 16 septembre prochain, comme convenu par les responsables libyens présents à cette occasion. Les forces de sécurité libyennes «seront chargées de garantir le processus électoral», avec le soutien «approprié» de l'ONU, des organisations régionales et de la communauté internationale, est-il mentionné, sans pour autant détailler ces mesures. Ces forces militaires et de sécurité, aujourd'hui émiettées en de multiples milices outre l'Armée nationale libyenne (ANL) autoproclamée du maréchal Haftar, devront aussi être unifiées sous l'égide des Nations unies, a-t-on convenu lors de cette rencontre. Par ailleurs, et parmi les démarches à entreprendre dans le but «d'améliorer le climat en vue des élections nationales», la Chambre des Représentants basée à Tobrouk devra se réinstaller à Tripoli et le gouvernement parallèle instauré dans l'Est du pays devra être démantelé à terme. Les deux Chambres devront «s'employer immédiatement à unifier la Banque centrale de Libye et d'autres institutions», a-t-on également décidé, alors que le pays est secoué par une grave crise monétaire. Si l'engagement est pris par les quatre hommes, reste que la communauté internationale est consciente que le rétablissement des institutions ne se fera pas sans heurts et dans cette optique, la déclaration indique que les responsables de toute «obstruction» au processus électoral auront à «rendre des comptes», sans en préciser leur nature. Par ailleurs, certaines milices et mouvances jihadistes risquent de s'opposer à la tenue d'un tel scrutin, y compris par la violence, redoute-t-on. Pour rappel, 12 personnes ont été tuées dans un attentat revendiqué par Daech visant le siège de la Commission électorale, le 2 mai à Tripoli. Les représentants de 19 pays impliqués dans le dossier ont participé à cette rencontre : les cinq pays membres du Conseil de sécurité de l'ONU (Etats-Unis, Chine, Russie, Royaume-Uni et France), l'Italie, ancienne puissance coloniale, l'Allemagne, les pays voisins (Egypte, Algérie, Tunisie et Tchad), les puissances régionales (Emirats, Qatar, Koweit, Turquie, Arabie saoudite et Maroc) ainsi que le président congolais Denis Sassou-Nguesso, qui dirige le comité de haut niveau de l'Union Africaine sur la Libye et le chef de la mission de l'ONU pour la Libye, Ghassan Salamé, chargé de superviser le processus.