Le suspense autour du déroulement de la prochaine élection présidentielle a pris fin, officiellement, ce vendredi 18 janvier avec la signature du décret convoquant le corps électoral pour l'élection présidentielle qui se déroulera le 18 avril prochain. Les discussions à propos des candidats supposés, déclarés ou non, donnent le prétexte pour réfléchir sur les motivations ou les chances de ceux qui aspirent, légitimement ou pas, à assumer la fonction de président de la République. La lecture de la presse nationale de ces derniers jours nous offre déjà, l'occasion de prendre connaissance avec certains candidats qui seraient tentés «de remettre les couverts», alors qu'ils ne sont même pas éligibles à la candidature, en vertu de l'article 73 de la constitution relatif à l'exigence de la nationalité d'origine algérienne. Mais sinon, qui sera candidat à l'élection et, surtout qui ne le sera pas ? Avant d'essayer d'y répondre, autorisons-nous cette digression. Tous ces prétendants qui trépignent du pied, qui s'impatientent déjà, qui veulent la place, qu'ils sachent, au moins, que président de la République, c'est «un métier»! Sinon, comment expliquer les déclarations des grands de ce monde, qui se sont exprimés sur leur fonction. Comme Nicolas Sarkozy, par exemple, qui avait déclaré aux ouvriers, lors d'un déplacement dans un chantier naval à Saint-Nazaire : « votre métier est dur, le mien aussi ». Ce même Sarkozy, qui a eu souvent à répéter « si je ne fais pas le travail, qui le fera ?» Ou encore François Hollande qui n'a pas été ménagé en son temps par la presse qui a eu recours aux grosses manchettes, pour qualifier les difficultés de sa présidence : « le dur métier de président de la République». Quant à Barack Obama, il doit, en partie, sa victoire grâce à sa fameuse déclaration «We haven't finish the job» (nous n'avons pas fini le travail), allusion à la nécessité de lui confier un deuxième mandat, maintenant qu'il en maitrise les leviers. Abdelaziz Bouteflika dans ce registre, a eu, aussi, à s'exprimer puisqu'il a affirmé, une fois, au journaliste français El Kabbach, qui le questionnait sur ce qu'il serait devenu s'il n'était pas président, lui répondit : «de toute façon, je ne sais faire que ça !», comprendre, c'est mon métier ! Le même Bouteflika a été, également, l'auteur d'une phrase restée dans les annales : « il n'y a pas de place pour les présidents-stagiaires ». En plus du métier, il y a aussi « le costume présidentiel», et force est d'admettre que très peu d'aspirants-présidents sont faits pour le porter, tellement ce costume est lourd à porter ; il est, sans nul doute, mal taillé pour certains, qui hésitent, ne sont pas sûr de vouloir y aller, ou, tapis dans l'ombre, attendent un quelconque signal. Et puis ce costume, dans nos contrées d'ici-bas, n'a été livré que dans sa version masculine ! Bien évidemment, dans le camp des islamistes on ne s'embarrasse guère de costume et n'attendez pas de vanne à ce propos. Parenthèse fermée, qui sont-ils ces candidats putatifs pour El Mouradia ? Plus clairement, le président Bouteflika briguera-t-il un cinquième mandat ? Nul doute que c'est de la décision du chef de l'Etat que dépendra celle des autres potentiels présidentiables, sachant que les chefs des principaux partis de l'opposition ont tous fait part de leur façon de voir les choses : hors de question de s'engager dans une course perdue d'avance. Bouteflika ne se présentera pas pour perdre, titrait un quotidien, et c'est le fait qu'il n'a pas encore clairement renoncé qui explique le silence de la classe politique et le fait qu'aucune candidature de poids n'a été annoncée jusque-là, alors qu'il ne reste que trois mois pour le scrutin. La convocation du corps électoral ne signifie donc pas forcément la candidature de Abdelaziz Bouteflika, ni son renoncement ! Les Algériens devront prendre leur mal en patience, comme vient de le rappeler un chroniqueur, et garder un œil sur les chefs des partis de la majorité, véritable et unique baromètre des intentions du pouvoir ; d'ailleurs, c'est de leur silence que sont nées toutes les « fake news» distillées dernièrement: report de l'élection, tenue d'une conférence nationale, révision de la constitution, institution d'un poste de vice-président et d'un septennat. Il n'en demeure pas moins, que 9 partis et 23 candidats indépendants ont retiré les formulaires à partir du Ministère de l'Intérieur. Toutefois, tous ces partis de l'opposition majoritairement, doivent affiner leur tactique : - iront-ils avec un candidat unique comme suggéré par Soufiane Djilali ou bien c'est le chacun pour soi qui va prévaloir ? - peut-on aussi conférer un brevet de représentativité à l'opposition «désunie» du Mazafran, au regard de la faiblesse de son enracinement social réel, du caractère parfois squelettique du nombre de ses militants, de la pauvreté de sa doctrine et de l'indigence de son programme ? - et si l'on ajoute à cela les «egos» démesurés de ses chefs, ce n'est pas demain la veille qu'émergerait, de leurs rangs, une candidature consensuelle parmi les candidats déclarés ou potentiels. Pour l'heure, il faut déjà compter sur Ali Benflis qui ne désespère pas d'y aller. Le candidat malheureux des dernières élections peine à l'évidence à s'affirmer comme le chef de file de l'opposition. Le titre lui est contesté par le chef du MSP, lui-même en butte à Abou djerra Soltani qui, lui aussi, tente d'obtenir le parrainage de ses pairs du MSP, ce qui promet une belle empoignade entre les deux hommes D'autres chefs de formations politiques, comme Ali fawzi Rebaine, Abdelaziz Belaid, sont partants. Tout comme Moussa Touati et Louisa Hanoune semble-t-il ; en revanche, le challenge, pour cette dernière reste différent dans le sens où elle va certainement concourir pour battre le record de participations à une présidentielle, détenu jusque là, par une certaine Arlette Laguillé, en retraite depuis. Plus sérieusement, les présidentielles, doivent être ouvertes, à tous et à toutes, à fortiori, pour la secrétaire générale du Parti des Travailleurs, qui peut, à juste titre, s'enorgueillir d'un long parcours militant et d'être l'une des rares femmes politiques arabes à postuler à la candidature présidentielle. Pas d'élections aussi sans la cohorte des candidats indépendants avec à leur tête l'inénarrable Rachid Nekkaz qui ne manque pas l'occasion de se manifester et de faire parler de lui. Il est déjà en campagne ! Ou cette candidature du général major en retraite, Ali Ghediri, dont les observateurs n'arrivent pas à en percer le mystère, encore moins les intentions réelles de ce «candidat surprise», ou le poids des supposés soutiens dont il disposerait réellement. Les lectures n'en finissent pas et on se perd en conjectures ! Ce qui n'est pas le cas des 29 candidats indépendants qui ne se posent aucune question! On a un peu l'illusion d'un trop-plein de candidatures. Mais encore une fois, c'est une chose d'annoncer être candidat, c'est totalement autre chose d'être candidat et de pouvoir, sans appareil politique, réunir par exemple les 600 parrainages d'élus requis. Ce n'est pas impossible que les réseaux sociaux donnent l'illusion à quelqu'un qu'il est écouté parce qu'il commence à avoir des «followers» sur Facebook ou Instagram ; il peut avoir l'impression que le pays entier l'écoute, alors qu'au fond, il sait très bien qu'il ne s'adresse qu'à lui-même, même si certains l'encourage par leurs commentaires. Cette multitude de candidatures peut aussi donner l'illusion d' « une démocratisation », d'une ouverture ou d'une facilité de la candidature à l'élection présidentielle. On en vient même à parler «d'une réduction de la distance entre le président et le citoyen ». C'est cette illusion qui à pu donner le sentiment à certains citoyens ou autres chefs de partis microscopiques de croire, qu'eux aussi, ils peuvent, « légitimement », postuler à la magistrature suprême. Au grand dam de certains qui prétendent, au contraire, que c'est la fonction présidentielle qui est dévaluée avec cette pléthore de candidatures du « tout venant » ! Mais, bizarrement, les observateurs avisés accordent plus d'attention aux petits pas de Chakib Khalil qui dit se tenir «à la disposition de son pays » ! L'homme c'est vrai dispose d'un carnet d'adresses des plus étoffés, en plus de son expérience indéniable dans le monde du pétrole qui lui a valu néanmoins quelques «casseroles». Devant la persistance de la crise, les «tenants du pouvoir réels», dit-on, réfléchissent sérieusement aux « profils» de Chakib Khalil et d'Ahmed Ouyahia, malgré les dénégations de ce dernier. Il semblerait que ces deux hommes sont programmés pour jouer des rôles importants, dans une situation économique et sécuritaire, très difficile, tant à l'intérieur qu'à l'international : 1. l'ancien ministre de l'Energie, parce qu'il bénéficie d'un préjugé favorable des institutions financières internationales, le FMI notamment, et qu'il serait susceptible d'en obtenir les meilleures conditionnalités en cas de retour à l'endettement externe du pays. 2. l'actuel premier ministre, parce qu'il est l'homme à poigne indispensable pour conduire un pays en crise. Il n'en reste pas moins que pour l'heure on se perd en conjectures en s'interrogeant sur les intentions du président de la République désespérément muet : 1. va-t-il rempiler et de ce fait éliminer tous les candidats du système ? 2. où renoncer au 5éme mandat et ouvrir « tout grand » les portes d'El Mouradia à un candidat qu'il aura lui-même adoubé ? Cela fait maintenant neuf mois que l'idée d'un cinquième mandat fait parler, sans que l'on sache vraiment s'il s'agit d'une option inéluctable ou d'un vœu rendu impossible par la santé du président! A trois mois de la date fatidique d'Avril 2019, on en est encore à conjecturer à moins que le président de la République ne se déclare partant pour un 5e mandat comme suggéré par l'éditorialiste du quotidien El Moudjahid, donnant ainsi le tempo à la campagne électorale. Et partant, freiner les ardeurs des uns et des autres, et surtout renvoyer à leur triste quotidien tous les farfelus et autres fantaisistes qui auront quelques lignes dans les journaux, d'ici et d'ailleurs. Cela est suffisant pour leur assurer une gloire éphémère au sein de leur famille et du quartier ! Autant dire que les rêves qui les ont animés ne suffisent pas, car la fonction de président de la République, c'est la rencontre d'un homme avec son peuple, comme aimait à le répéter le général De Gaulle.