L'Algérie a réitéré mardi son refus de faire une sorte de «linkage» entre le développement de ses relations bilatérales avec le Maroc et la question, prise en charge par l'ONU, de la décolonisation au Sahara Occidental. C'est ce qu'a confirmé l'ambassadeur d'Algérie à Washington Madjid Bouguerra lors d'un débat organisé par le Think Tank américain «Center For The National Interest» sur le rôle d'Alger dans la lutte régionale contre le terrorisme. Il a expliqué aux participants de cette rencontre, dont des diplomates européens, asiatiques et arabes, ainsi que des organes de presse américains, que le dossier sahraoui, géré par les Nations Unies, ne peut être un obstacle au développement des relations bilatérales entre l'Algérie et le Maroc. Le diplomate algérien, qui a rappelé la position constante du pays sur ce dossier, en particulier le soutien de l'Algérie à une solution politique globale qui ouvrirait la voie à l'organisation d'un référendum d'autodétermination dans ce territoire non autonome, a affirmé qu'il ne peut y avoir de liens entre cette question et les relations bilatérales entre les deux pays. M. Bouguerra répondait lors de ce débat à une question d'un ancien diplomate américain, qui s'interrogeait si l'Algérie et le Maroc pouvaient coopérer ensemble en dépit des décennies de divergences sur la question du Sahara Occidental. L'ambassadeur d'Algérie dans la capitale fédérale a expliqué que «nous avons toujours dit que nous sommes prêts à travailler avec le Maroc pour améliorer nos relations bilatérales avec une seule condition : que nos frères marocains n'imposent pas de conditions», avant de souligner que le Maroc a toujours demandé que l'Algérie infléchisse sa position sur le Sahara Occidental pour faire avancer la coopération bilatérale. Pour l'Algérie, «il s'agit bien d'une question traitée au niveau de l'ONU, qui engage deux parties à savoir le Maroc et le Front Polisario», a rappelé M. Bouguerra, qui a expliqué que 'nous avons toujours appelé à séparer les deux questions.» Il a également évoqué les appels de l'Algérie au Maroc pour discuter ensemble des questions migratoires et du trafic de drogue, mais «les Marocains n'ont pas donné suite à nos appels», a-t-il dit, avant de préciser que «cela n'affecte pas notre volonté politique d'œuvrer pour le développement de nos relations.» L'ambassadeur algérien a par ailleurs expliqué aux participants à ce débat que l'Algérie est le seul pays maghrébin qui a signé et ratifié tous les accords de l'UMA (Union du Maghreb arabe). Fin novembre dernier, l'Algérie avait annoncé une initiative pour relancer l'UMA, moins de deux semaines après l'appel du roi du Maroc pour une relance des relations maroco-algériennes. «L'Algérie a saisi officiellement le Secrétaire général de l'Union du Maghreb arabe, pour l'appeler à organiser dans les délais les plus rapprochés une réunion du Conseil des ministres des Affaires étrangères de l'UMA», avait indiqué le ministère algérien des Affaires étrangères. «Cette demande a été portée à la connaissance des ministres des Affaires étrangères des pays membres de l'Union», selon un communiqué du ministère, qui précise que 'cette initiative s'inscrit en droite ligne de la conviction intime et maintes fois exprimée par l'Algérie de la nécessité de la relance de l'édification de l'ensemble maghrébin et de la réactivation de ses instances.» «La relance des réunions du Conseil des ministres, à l'initiative de l'Algérie, est de nature à introduire un effet catalyseur susceptible de redynamiser les activités des autres organes de l'Union du Maghreb arabe». L'initiative de l'Algérie est en quelque sorte une réponse officielle à l'appel du roi du Maroc, début novembre, pour une relance des relations bilatérales algéro-marocaines. Mohamed VI avait en effet, dans son discours commémorant le 43ème anniversaire de l'occupation du Sahara Occidental, affirmé «la disposition du Maroc au dialogue direct et franc (avec l'Algérie sœur), afin que soient dépassés les différends conjoncturels et objectifs qui entravent le développement de nos relations.» Et a proposé, dans la foulée, «la création d'un mécanisme politique conjoint de dialogue et de concertation'', estimant que 'le niveau de représentation au sein de cette structure, son format, sa nature sont à convenir d'un commun accord.» Mais, plus de deux mois après, Rabat n'a pas donné de réponse à l'initiative algérienne. Par ailleurs, sur la question «du manque de coopération» entre Alger et Rabat sur le dossier sécuritaire, l'ambassadeur a affirmé qu'il existait en réalité une coordination entre les services chargés de la lutte antiterroriste des deux pays, avant de souligner que le Maroc est aussi le premier partenaire commercial de l'Algérie au Maghreb. Le diplomate algérien a également fait état de l'importante coopération sécuritaire avec la Tunisie et l'excellence des relations avec la Mauritanie. Madjid Bouguerra n'a pas manqué d'ailleurs de réitérer le soutien de l'Algérie, pays voisin et observateur, à l'émissaire onusien, l'ancien président Allemand, Horst Köhler dans ses efforts pour parvenir à une solution politique qui débouche sur l'organisation d'un référendum d'autodétermination au Sahara Occidental.