Invité sur RFI pour parler des propositions politiques adoptées lors du «Forum national pour le dialogue», organisé le 6 juillet dernier par plusieurs partis politiques et des organisations de la société civile, et dont il a été le coordinateur, Abdelaziz Rahabi, ancien ministre de la Communication, a insisté sur la nécessité de «mettre en place des mesures» avant d'aller aux élections présidentielles. «Nous sommes dans un vide constitutionnel qui s'aggrave, et l'impasse politique devient chaque jour plus grande. Il est temps de mettre en place des mesures pour aller aux élections présidentielles», a déclaré Abdelaziz Rahabi lors de cet entretien. Expliquant les propositions issues du «Forum national pour le dialogue», Rahabi ajoute: «Nous avons convenu de sortir avec une plateforme qui pose les mesures de confiance et d'apaisement que le gouvernement doit prendre avant d'aller vers le dialogue, et qui propose une instance qui organiserait les élections, du fichier électoral, le suivi des élections et leur contrôle, et la proclamation des résultats». Selon M. Rahabi, cette instance est appelée à se «substituer au Conseil constitutionnel» qui «a perdu toute forme de crédibilité». De toutes façons, ajoute-t-il, «les élections présidentielles ne s'organiseront pas dans ces conditions». «Il faut qu'il y ait un environnement favorable» et que les Algériens «soient convaincus de la transparence et de la régularité du scrutin, et que leurs voix ne seront pas volées et ça ce n'est pas encore acquis», a-t-il ajouté. A propos des «mesures de confiance» que le gouvernement devrait mettre en place, Rahabi parle de la nécessité de «l'ouverture de l'audiovisuel public», de «la levée des entraves faites à l'exercice de la politique», «l'arrêt des poursuites pour des délits d'opinion», et la «libération de certains jeunes pour des délits d'opinion». L'ancien diplomate a également souligné «des gestes très forts dans le cadre de la lutte contre la corruption», notant toutefois que «la véritable lutte contre la corruption se fera lorsque le système de gouvernance changera». Pour Rahabi les «Algériens n'iront pas voter aujourd'hui». «Je ne sais pas quand est-ce qu'ils iront voter, mais pas maintenant. Les Algériens sont devenus plus exigeants. Il est difficile d'établir une confiance entre le pouvoir et les citoyens», dit-il, estimant qu'il y a une «volonté dans le discours officiel et de l'opposition d'aller vers une solution politique et de retourner vers le processus électoral». «Seules les élections pour exprimer la réelle volonté populaire» «Ce n'est pas un accord politique qui va refléter la volonté des Algériens. Seules des élections peuvent exprimer la réelle volonté populaire», a ajouté Rahabi. L'ancien ministre de la Communication est revenu sur «l'offre de dialogue» faite aux autorités lors du «Forum national pour le dialogue», rappelant qu'il ne s'agit pas de la première. «Nous avons déjà fait une offre de dialogue en 2014 et en 2016. J'espère que cette fois-ci l'accueil sera différent». Interrogé sur les «résistances au sein du pouvoir pour cette dynamique de dialogue et de changement», Abdelaziz Rahabi explique que «les résistances existent surtout dans les administrations». Ces administrations «sont réticentes aux changements parce qu'il y a des situations de rente». «Le Hirak a créé une demande très forte de transparence. Le slogan qui revient le plus souvent c'est à propos de la corruption. Les Algériens veulent contrôler les richesses nationales. Et ils savent que ce contrôle n'est possible que dans un système démocratique et une volonté politique de le faire. C'est cette volonté politique qui a toujours manqué dans la lutte contre la corruption », affirme encore M. Rahabi. Interrogé également sur les « critiques très virulentes » des jeunes, lors de la rencontre du 6 juillet, à l'égard des partis politiques, Rahabi note « le niveau de maturité » des jeunes dont les demandes « sont essentiellement politiques ». « Ces jeunes envoient un message très clair, aussi bien à l'opposition qu'au pouvoir : La transition elle est faite dans notre tête. Nous savons ce que nous voulons, et nous sommes en mesure de gérer cette période ». Quant à son rôle de « coordinateur » (du Forum national pour le dialogue, ndlr) et « un des acteurs du dialogue, Abdelaziz Rahabi affirme « croire aux vertus du dialogue ». « Nous avons manqué de dialogue dans notre culture politique. Nous avons toujours vécu par la logique des rapports de force. Un dialogue reste la voie la moins coûteuse et la moins longue pour régler une crise de la nature de celle que nous vivons maintenant », a-t-il conclu.