Bien que la dette extérieure soit d'environ 1% du PIB, la baisse drastique des réserves de change, 72,6 milliards de dollars en avril 2019, suscite à juste titre, des scénarios pessimistes sur l'avenir de l'Algérie qui risque la cessation de paiement, le dernier trimestre 2022. Car il faut être réaliste et ne pas verser dans la démagogie. La situation pourrait s'aggraver plus rapidement sans résolution de la crise politique qui paralyse toute l'économie. 1.-Evolution des réserves de change de 1999/ avril 2019 /2022 2000 : 11,9 milliards de dollars- 2001 : 17,9 milliards de dollars- 2002 : 23,1 milliards de dollars- 2003 : 32,9 milliards de dollars- 2004 : 43,1 milliards de dollars- 2005 : 56,2 milliards de dollars- 2006 : 77,8 milliards de dollars- 2007 : 110,1 milliards de dollars- 2008 : 143,1 milliards de dollars- 2009 : 147,2 milliards de dollars- 2010 : 162,2 milliards de dollars- 2011 : 175,6 milliards de dollars- 2012 : 190,6 milliards de dollars- 2013 : 194,0 milliards de dollars- 2014 : 178,9 milliards de dollars- 2015 : 144,1 milliards de dollars- 2016 : 114,1 milliards de dollars- 2017 : 97,3 milliards de dollars- 2018 -79,8 milliards de dollars -avril 2019 , 72,8 milliards de dollars, soit en quatre mois 7 milliards de dollars et au même rythme 21 milliards de dollars fin 2019. Au cours d'un baril fluctuant entre 60/65 dollars, au rythme de la dépense actuelle, sans un taux de croissance dépassant 8/9%, nous aurons 58 milliards de dollars fin 2019, 37 en 2020, 16 en 2021 et la cessation de paiement vers août/septembre 2022. Nous sommes loin des prévisions avant AL Hirak où il était prévu entre 2019/2021 selon le ministre des finances devant l'APN le niveau des réserves de change seraient fin 2019 : 62,0 milliards de dollars- 2020 : 47,8 milliards de dollar- 2021 : 33,8 milliards de dollars et en 2022 entre 12/15 milliards de dollars selon le FMI. Ce montant dépend essentiellement à la hausse ou à la baisse des recettes d'hydrocarbures, la réduction du déficit commercial en 2018 étant due à 98/99% aux recettes d'hydrocarbures. Or, les importations entre 2016/2018 biens sont évalues entre 45/46 milliards de dollars plus il faut ajouter les services qui fluctuent annuellement entre 10/11 milliards de dollars et les transferts légaux de capitaux donnant un total de sorties de devises entre 58/60 milliards de dollars pour une entrée de devises à un cours de 70 dollars d'environ 38/39 milliards de dollars et pour un cours de 60 dollars d'environ 30 milliards de dollars accélérant les tensions de la balance des paiements. 2-Contrairement à certaines déclarations hasardeuses récentes comparant le non comparable (pays développés) le cours du dinar officiel 1990/2019, est corrélé aux réserves de change. via les recettes d'hydrocarbures à plus de 70%, Pour toute comparaison, l'on devra se référer non aux pays développés (réserves de change faible, mais une structure productive) mais à l'expérience vénézuélienne. C'est que 70/80% des besoins des entreprises publiques et privées ainsi que des besoins des ménages proviennent de l'extérieur, le taux de croissance, le taux d'emploi dépendant de la dépense publique via les hydrocarbures. La période antérieure n'étant pas significative (cotation administrative en 1970 avec 5 dinars un dollar ) , récemment de 2001 à juillet 2019 la cotation est la suivante : 2001, 69,20 dinars un euro, 77,26 dinars un dollar -2002, 75,35 dinars un euro, 69,20-dinars-un-dollar-2008, 94,85 dinars un euro, 64,58 dinars un dollar -2014,106,70-dinars-un-euro,-80,06-dinars-un-dollar, 2019 (14 juillet ) une cotation- cours achat de 134,21 dinars un euro et de 119,06 dinars un dollar. Sur le marché parallèle la baisse de la cotation actuelle est transitoire pour des raisons politiques, l'écart avec le cours officiel étant d'environ 50% à l'équilibre offre/demande. Sur le plan budgétaire en cas de non recours au financement non conventionnel s'offrent trois solutions : une plus grande rigueur budgétaire avec la lutte contre le fléau de la corruption, l'endettement extérieur ciblé et le dérapage du dinar par rapport au dollar et à l'euro qui permet d'augmenter artificiellement la fiscalité hydrocarbures et la fiscalité ordinaire, cette dernière accentuant l'inflation étant supportée par le consommateur final comme un impôt indirect. 3- Les incidences de la baisse des réserves de change En cas de baisse drastique des réserves de change à 10/12 milliards de dollars, qui tiennent la cotation du dinar algérien à plus de 70%, la banque d'Algérie sera contrainte de dévaluer le dinar officiel à environ 200/220 dinars un euro avec une envolée du cours sur le marché parallèle qui fluctuera en fonction du taux d'inflation entre 300/400 dinars un euro, ce qui accélérera le processus inflationniste. Il s'ensuit que la croissance devrait ralentir très fortement dès 2020 en provoquant une augmentation du taux de chômage. Elle se traduira aussi par la persistance des déficits budgétaires et surtout des déficits externes qui vont éliminer progressivement toutes les marges de manœuvre dont dispose l'Algérie. Comme je l'ai souligné dès sa mise en œuvre, après des discours euphoriques sur le bienfait du financement non conventionnel de certains experts organiques , ce mode de financement risque de conduire le pays vers une dérive inflationniste à la vénézuélienne (devant comparer le comparable) avec des incidences économiques, politiques et sociales négatives, les slogans politiques étant insensibles aux lois économiques applicables dans tous les pays et l'Algérie ne fait pas exception. Le recours à la planche à billets pour financer le déficit budgétaire aura un impact négatif à terme tout en favorisant, contrairement à certains discours, la baisse des réserves de change puisque en mettant à la disposition de certaines entreprises des dinars, (70% des matières premières et des équipements des entreprises publiques et privées étant importées, le taux d'intégration ne dépassant pas 15/20%) ces dernières se porteront impératrices. Certes, la poussée inflationniste n'est pas encore perceptible entre 2018 et juillet 2019 et la croissance tirée essentiellement par la dépense publique a été d'environ de 3% en 2018, contre 1,6% en 2017. Mais pour le FMI ce ne sont que des mesures conjoncturelles sans vision stratégique, le financement non conventionnel représentant 23% du PIB. Mais ce mode de financement aura aussi atteint ses limites à partir de 2020 avec des taux d'inflation élevés devant méditer la dérive vénézuélienne. Les mêmes projections sont reprises par la note de conjoncture du trésor français qui influe sur la note de la Coface ainsi que plusieurs institutions internationales. 4.-Trois paramètres stratégiques déterminent l'avenir de l'économie algérienne Après 57 ans d'indépendance politique, c'est toujours le cours du pétrole qui détermine l'évolution des réserves de change et la pression démographique (plus de 50 millions d'habitants en 2030), devant créer minimum 300.000/400.000 postes de travail nouveaux par an nécessitant un taux de croissance annuel sur plusieurs années de 8/9% en termes réel. Il faut être réaliste : en ce mois de juillet 2019, Sonatrach c'est l'Algérie et l'Algérie c'est Sonatrach. Cependant, l'économie algérienne l'Algérie possède des potentialités mais a besoin d'une vision claire, d'une cohérence dans sa politique socio-économique qui lui fait cruellement défaut, les plus grands planificateurs en management stratégique, étant les multinationales, étant de la responsabilité des seuls algériens, et donc de leurs gouvernants qui doivent cesser leurs discours euphoriques, cat la situation est grave, (personne ne peut faire des réformes à notre place). L'Algérie étant confrontée à des défis importants, posés de la baisse des prix du pétrole il y a quatre ans, les choix économiques risquent de compliquer la gestion macroéconomique, nuire à la croissance et aggraver les risques pour la stabilité politique et financière à terme. Pour relever les défis futurs, se projeter sur l'avenir, loin de tout populisme dévastateur, une nouvelle gouvernance, un langage de vérité et la moralité des gouvernants s'imposent. Avec une plus grande rigueur budgétaire, une meilleure gouvernance, un changement de cap de la politique économique actuelle, avec un baril même à 60 dollars, l'Algérie peut s'en sortir. L'endettement est faible, 20% du PIB et la dette extérieure 2,5% du PIB. Mais attention, en cas de non changement de la politique socio-économique, donc de gouvernance, le scénario dramatique du FMI 2022, est plausible avec des incidences économiques, sociales, politiques et géostratégiques, le contexte sécuritaire ayant profondément changé par rapport à 1994/1995 ce qu'aucun algérien ne souhaite, sauf miracle d'un cours du pétrole à plus de 100 dollars. Or selon Bloomberg, l'Algérie, pour remonter son déficit budgétaire au titre de l'exercice 2019, «aurait besoin d'un baril de pétrole à 116,40 dollars, contre 95/100 dollars en 2017/2018», soulignant que «la production algérienne est restée relativement stable à environ 1 million de barils par jour, avec un cours du gaz qui représente 33% des recettes de Sonarach en nette baisse. 5.-Résoudre la crise politique pour éviter l'épuisement des réserves de change, Depuis le 9 juillet 2019, l'Algérie se trouve dans une situation inédite ou différents constitutionnalistes ont des vues contradictoires : pour les uns étant dans l'inconstitutionnalité, pour d'autres la prolongation du mandant de l'actuel chef de l'Etat rentrant dans le cadre d'une interprétation extensive de la constitution afin d'éviter le vide constitutionnel. Quelque soit les postions, la situation est très grave pouvant affecter tant les relations internationales politiques et économiques de l'Algérie, qu'un divorce Etat-citoyens au niveau interne. Je considère que le dialogue avec la réelle composante de la société et non de segments de la rente, est l'outil par excellence de la bonne gouvernance. Car, pour l'Algérie avec les tensions budgétaires 2019/2020/2025, l'on devra éviter les solutions de facilité, résoudre rapidement la crise politique. Opposition, Al Hirak et Pouvoir doivent s'entendre sur un compromis raisonnable, par le dialogue productif, afin que l'Algérie ne se retrouve dans le même scénario vénézuélien, pays en faillite bien plus riche que l'Algérie, ce qu'aucun patriote ne souhaite. Et dans ce cas, il serait illusoire tant pour le pouvoir, l'opposition ou AL Hirak de parler d'indépendance économique et politique avec de vives tensions sociales dues au blocage de l'économie. Pour éviter toute dérive déstabilisatrice, une très grave crise économique avec de nombreux impacts négatifs, il devient urgent d'aller rapidement vers l'élection présidentielle transparente, évitant les erreurs du passé, avant la fin de l'année 2019, appartenant au futur président, élu sur la base selon un programme clair d'entamer les véritables réformes politiques et économiques car assis sur la légitimité, afin d'éviter d'isoler l'Algérie de l'arène internationale. Le temps ne se rattrape jamais en économie d'où l'urgence de profondes réformes économique, politique, sociale et culturel, déterminant en ce XXIème siècle. En résumé, l'Algérie avec des détournements qui dépassent l'imagination humaine par leurs ampleurs, qui conduisaient le pays droit au mur, a besoin d'une nouvelle stratégie, loin des slogans creux populistes, s'adaptant au nouveau monde , d'un retour à la CONFIANCE pour sécuriser son avenir, de s'éloigner des aléas de la mentalité rentière, de réhabiliter la bonne gouvernance, le travail et l'intelligence. En cette période difficile de tensions budgétaires, personne n'ayant le monopole de la vérité et du patriotisme Il s'agit là de l'unique voie que doivent emprunter les Algériens afin de transcender leurs différences et trouver de nouvelles raisons de vivre harmonieusement ensemble et de construire le destin exceptionnel que nos glorieux aînés de la génération du 1er Novembre 1954 ont voulu pour eux.