A Tébessa, dans la capitale des Nememcha, le nouvel an Amazigh, Yennar pour toute la région chaoui, décrété journée nationale sur décision du président de la République Abdelaziz Bouteflika, coïncidant annuellement avec le 12 janvier, est célébré dans une atmosphère distinctive et joyeuse. De la région de Hammamet, à Negrine, à l'extrême Sud de l'antique Theveste, à Bir El Ater, Yennar est l'occasion de revisiter "la petite histoire" du grand Chachnaq, celui qui inaugura l'an Berbère, il y a de cela 2968 ans avec son accession au trône de l'Egypte antique. "Il était une fois, un roi beau et courageux des terres des Hommes libres qui s'appelait Chachnaq partit conquérir l'Egypte antique. Ne déviant point de son objectif, Chachnaq le berbère, notre ancêtre s'installa au sommet de la dynastie pharaonique dans la région de Siwa, unifia l'Egypte ancienne et conquit Jérusalem", racontent encore les grands-mères de Tébessa aux enfants et l'histoire se perpétue toujours sans fausse note. Autour d'une table bien garnie avec des gâteaux traditionnels notamment "Meltoukha" et "R'fis" préparés à base de semoule, de dattes ou "ghars", du beurre fermier et du miel local, les grands mères relatent encore que Yennar et Chachnaq ne font qu'un et l'occasion est de revisiter l'histoire amazighe de l'antique Theveste. A Tébessa, l'histoire de Chachnaq symbolise l'union et l'attachement à des traditions et coutumes lointaines qui ont certes pris beaucoup de recul sous les coups de la modernisation. Yennar, "un invité" de marque Dans la capitale des Nememcha, Yennar est "un invité" de marque et son arrivée se prépare des jours à l'avance. Beaucoup de familles à travers les 28 communes de la wilaya de Tébessa gardent la tradition de renouveler les cinq pierres servant d'appui pour le "kanoun" de cuisson. Les femmes mettent un point d'honneur à accueillir Yennar en procédant à un grand nettoyage de la maison. Elles changent également le décor de leurs intérieurs, une semaine avant le jour J et mettent des herbes vertes sur les toits de leurs maisons pour recevoir le nouvel an en joie. A Négrine, l'extrême sud de la wilaya, les femmes remplissent en eau divers ustensiles, la veille de Yennar pour symboliser la fertilité, la vie et la prospérité. Dans les zones rurales, les habitants renforcent leur attachement à leur terre à travers de nombreuses activités agricoles, au nouvel an Amazigh dont la plantation d'arbres pour ambitionner une nouvelle saison agricole, qui apportera prospérité et richesse pour tous. "Yennar" est accueilli également par un dîner qui réunit la famille autour d'un couscous ou "Chakhchoukha" aux sept légumes, au poulet et à la viande pour symboliser la richesse de la région. Le dîner se veut également l'annonce d'une nouvelle année agraire que les Tébessis souhaitent fertile avec une récolte variée et des produits agricoles divers. Yennar, un célébration, un symbole Pour Belgacem Abdelrezzak, professeur de philosophie, chercheur, spécialiste dans l'histoire amazighe de la région, la célébration du nouvel an Amazigh, au-delà des traditions culinaires et des pratiques rituelles symbolise "un ensemble de traditions constituant l'identité culturelle de l'Algérie". Dr Maha Aissoui, professeur d'histoire à l'université Laarbi Tbessi, rapporte que Yennar qui marque le début du calendrier agricole est lié au cycle des saisons, utilisé depuis l'antiquité par les Berbères. Elle ajoute que la célébration du nouvel an Amazigh est lié à "une tradition agricole et aux ressources essentielles à la vie paysanne".